Mama Horror

III

Il s'était réfugié dans sa chambre, dans son lit la tête enfouie dans l'oreiller. Il y pleura de rage, étouffant tous ses ressentiments. Il ressassait les dernières heures, hurlant en son fort intérieur à l'injustice. On l'avait trompé et tout mis sur le dos. Et pire encore les regards dédaigneux à son encontre alors que lui aussi était victime. Il se vit alors en éternel bouc émissaire, tout était de sa faute, quoi qu'il faisait.

Il entendit la porte de sa chambre grincer, quelqu'un entrer sans frapper, faire trois pas et poser quelque chose d'encombrant sur sa table de chevet. Malgré les mouvements il ne daigna pas lever la tête, l'intrus finirait bien par repartir assez vite, autrement c'était faire preuve d'inconscience. Puis, aucun son perceptible n'atteignit ses os temporaux comme si l'intrus, qui n'en était pas un, s'était volatilisé ou bien l'épiait, immobile. « Va-t-il enfin dégager ? » râla-t-il intérieurement « Qu'on me foute la paix ! ».

- Me suis dit que tu aurais faim, lui dit posément une voix basse reconnaissable.

Killer se détacha de son oreiller et vit Horror au-dessus de lui. Il dériva ses pupilles vers la table de chevet où, en effet, un plateau repas venait d'être déposé. Il revint ensuite sur son partenaire avant de se tourner vers le mur pour lui faire dos en soufflant. Le squelette mutilé était silencieux, cherchant à trouver les bons mots. Après mûre réflexion, il décida finalement de ne rien dire et tourner des talons afin de prendre des nouvelles de Dust. Mais à peine eut-il ouvert la porte pour sortir qu'il entendit le squelette à l'âme ciblée parler dans sa barbe.

- Y en a toujours que pour l'« autre » ...

- Pardon !?

- Tu sais très bien de quoi je veux parler...

Horror apprécia peu la pirouette.

- Killer, à ce que je sache ce n'est pas lui qui t'as brisé une clavicule ! Le reprit-il sèchement.

- Ah oui ? Et si c'était le cas j'aurais quand même été le gros enfoiré dans l'histoire !

- Tu sous-entend quoi là ?

- Dust ! Toujours Dust ! Dust, Dust, Dust ! Quand il s'agit de lui tu ne sais pas être neutre ! Et les autres c'est pareil !

Horror soupira.

- C'est des conneries et tu le sais ! Là c'est toi qui te rend malade tout seul ! Tu dois te calmer d'abord, je repasserai plus tard.

Il laissa Killer encore emplit d'amertume et se dirigea au salon pour aller voir Dust.

Ce-dernier s'était réveillé et ne faisait rien d'autre que regarder le plafond. Cross était resté près de lui. Horror attrapa un siège et s'installa à côté d'eux.

- Ça va ? Comment tu te sens ?

- Je ne sais pas trop, répondit Dust, ça fait moins mal mais je me sens...

- Coupable ?

Le poussiéreux fit une mou.

- Désolé de te dire ça mais même si ça ne valait pas tout ça tu l'as quand même cherché.

- Je sais...

Horror chercha toutefois à comprendre.

- Mais enfin Dusty, pourquoi avoir jeté le couteau de Killer dans le feu ? Tu savais pourtant qu'il y tenait. Et l'avoir fait tourné en bourrique ça n'a pas aidé.

- Je savais que ça allait lui faire du mal, qu'il allait se mettre en colère. Alors j'ai préféré lui faire croire qu'il était perdu.

Le poussiéreux respira profondément et se prit un temps avant d'en dire plus. Il se remettait encore de ses émotions et était fatigué. Horror et Cross l'observèrent avec attention et compassion tout en respectant le calme imposé par son bref silence. Puis il leur raconta ce qui était arrivé à l'objet dont Killer tenait tant d'une voix éraillée dans une forme de chagrin.