Je me lève de ma place dans les premiers après une heure de bus, et me positionne devant les portes de celui-ci pour être la première à sortir, après avoir été la première à monter.
La transition entre l'intérieur et l'extérieur est violente : d'un espace chauffé je me retrouve face au vent maritime de la région, en fin novembre.
D'autres personnes sont arrivées, il est sept heures vingt, et le lycée n'ouvre qu'à sept heures trente, ce que je n'ai jamais trouvé normal. Les jours de pluie on pourrait se mettre à l'abri mais non, on reste sous les arbres devant le bâtiment, et les grosses gouttes qui tombent des branches continuent de nous surprendre.
J'attends ma meilleure amie, dont le bus est encore en retard je suppose. À vrai dire je commence à m'y faire.
Tout le monde autour de moi est accompagné, certains attendent des bus, d'autres fument, certains font les deux, puis des couples s'embrassent langoureusement dès sept heures et demie, ce qui a le don de faire monter cette question en moi : pourquoi ?
Des professeurs attendent de pouvoir monter en salle des profs pour prendre un bon café, à vrai dire ils ont de quoi en profiter ; les leurs sont à trente-cinq centimes pendant que les nôtres sont à cinquante.
Soudainement un cri strident parvient à mes oreilles, gelées d'ailleurs. Je sursaute, regarde autour de moi de qui cela pourrait provenir, mais je ne vois personne dans une situation assez difficile pour hurler ainsi. De plus j'ai l'impression que je suis la seule à l'entendre, ce cri.
Cela dure longtemps, et je mets près d'une minute à comprendre que ça vient de la gare. Des sifflements de trains en réalité, non pas un hurlement, mais ceux-ci sont beaucoup plus forts que ceux qu'on entend d'ici d'habitude, comme si deux d'entre eux allaient s'entrechoquer et criaient en chœur "non !"
Puis plus rien. Je m'attends à une suite, mais elle ne vient pas.
Je ne décroche pas mon regard de la pointe de la gare, qui est le seul élément de cette dernière que je peux voir depuis le lycée, me posant mille-et-une questions sur ce qu'il vient de se passer. Pourquoi ai-je été surprise à ce point ? À vrai dire des trains qui sifflent ici on en entend des dizaines par jour ? Juste qu'aujourd'hui j'y ai porté attention, ou peut-être qu'un événement a lieu là-bas ?
Enfin après, je me suis toujours posée trop de questions.
— Salut la moche ! entendis-je derrière moi.
— Oh Esther tu m'as fait peur ! répondis-je en me retournant vers elle, comme si j'avais vu un revenant.
— Je vois ça, j'ai l'impression que je te ramène de loin là. Ça va ? T'as l'air un peu ailleurs ?
— Oui, ça va. Tranquille. Et toi ?
— Je me suis levée en retard, j'ai failli louper le bus, j'ai renversé du jus d'orange sur mon pantalon mais j'ai pas eu le temps de me changer et pour couronner le tout j'ai oublié mon casque donc zéro musique dans le bus. À ton avis ?
— Ah, alors c'est pour ça que tu m'as pas demandé de me taire quand je te disais bonjour ! Oui, c'est vrai que ça m'a paru un peu bizarre.
— Très drôle, fit-elle en me tapant l'épaule. Le lycée ouvre, on va directement devant la salle ?
— Tu veux pas un café pour te remettre sur le bon pied ?
— Si c'est pour qu'il finisse comme le jus d'orange c'est même pas la peine.
——————————
Esther me rejoint au même endroit qu'hier, avant-hier et tous les jours depuis le début de l'année, et cette fois-ci je la retrouve.
— Coucou !
— Ta gueule c'est le meilleur moment.
— Et c'est une nouvelle fois Esther qui remporte le prix de la plus mignonne de toutes les amies.
— Écoute ça !
— Oh sérieux dès le matin là ?
— Oui, tu vas adorer !
Elle me colle son casque sur les oreilles sans que je n'aie le temps de placer un mot, elle augmente un peu le volume pour que, je cite, "je puisse profiter à donf de la sensation, des frissons, de la jouissance que cette masterclass procure". Tu parles, j'écoute à peine quelques secondes qu'Esther me l'arrache aussi vite qu'elle me l'as mis pour profiter du meilleur moment.
Au moment où je la vois danser, un surveillant arrive pour ouvrir le lycée, mais alors qu'on s'y rend le même sifflement de train qu'hier vient briser mes tympans en milliers de petits grains de sable. Violent, aigu, fort et désagréable.
J'essaie de faire abstraction devant ma meilleure amie, qui elle semble à peine l'entendre, en même temps vue sa musique elle va finir par devenir complètement sourde...
Nous rentrons dans le lycée comme... bah tous les jours, puis nous allons au foyer car cette fois Esther n'a pas peur de se renverser du café sur le jean, et enfin nous partons devant notre salle où nous attendent deux heures de philosophie. Le bonheur à l'état pur.
Ces deux merveilleuses heures passées, le quart d'heure de pause s'annonce, et contrairement à nos habitudes, ma meilleure amie m'entraîne devant le lycée car elle doit partir pour une urgence.
— Bah t'es con, moi je peux t'avancer pour ce midi !
— On a pas le temps de passer au self, on a que vingt minutes à cause de la vie de classe !
— Eh bah on passe prio !
— Ça marche jamais ça, nan je vais nous acheter des sandwichs et ça sera beaucoup mieux ! En plus ça sera meilleur que la bouffe du self.
— On y va ensemble alors, je vais pas te laisser y aller toute seule !
— Nan, prends-moi les cours s'te plaît ! finit-elle en commençant à partir.
— Tu fais vite hein ! Ça va saouler l'autre vieux ! lui criai-je avant de retourner dans l'enceinte du lycée.
——————————
Le midi arrive très longuement, en même temps j'étais seule pour les deux autres heures alors je me suis un chouïa ennuyée.
Je tente de joindre Esther que je n'ai pas vue revenir en regardant pendant toute l'heure de cours par la fenêtre, mais elle ne répond pas. Super, pensai-je. Je n'ai pas le temps de manger, il faudrait que je passe par l'intendance parce que je n'ai pas réservé de repas et vu le temps que ça prend il me resterait dix minutes pour passer prio et manger.
Alors j'ai sauté le repas, quelques gens de ma classe m'ont rapporté ce qu'ils ont pu, un bout de pain et une pomme. C'est mieux que rien.
En fin de journée après mon dernier cours je reçois un message d'Esther, que je n'ai pas revue.
Esther
17:06
Je suis désolée j'aurais dû te prévenir plus tôt mais je me suis pété la jambe maladroitement tout à l'heureEsther
17:06
Mes parents m'ont emmenée à l'hôpital j'ai dû faire tous les examens et j'ai complètement oublié de te prévenir, j'avais pas mon téléphone à côté de moiVous
17:07
Oh merde ma pauvre ! J'espère que t'iras mieux assez viteEsther
17:07
Oui t'inquiète, demain je viendrai pas parce que le médecin m'a dit de me reposer le plus possibleEsther
17:07
Mais comme je vais pas rester toute la journée au lit tu pourras m'envoyer les cours stp ?——————————————————
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Les sifflements des trains - LEW
Fanfic- J'ai envie de m'en aller Euiwoong... - On y est presque Ava... Ils se sont déjà croisés mais ne se sont jamais adressés la parole, jusqu'à ce jour. J'ai pas l'habitude d'écrire ce genre d'histoires, mais tout ce que je peux dire c'est que c'est lo...