Chapitre 2 / Ash

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─ Alors, combien ?

Liv se penche dans ma direction, attrapant l'évaluation que le professeur venait de nous rendre. Sans même avoir pris la peine de jeter un coup d'œil à la la note, je lui montre. De toute façon, je me moquais royalement d'avoir un quatre ou un vingt. J'observe son visage se décomposer, avant que son regard furieux ne me foudroie sur place. N'arrivant pas à déterminer si je pouvais me moquer d'elle, je tourne la feuille dans ma direction, essayant de décrypter l'infâme écriture de notre professeur de maths. Cette écriture légendaire dont on n'observait qu'une succession de petits ponts, notre mission première consistant en les décrypter : « Cherche un sens à la phrase « faire un effort». Peut faire beaucoup mieux. La seule chose qu'il te manque, c'est de la motivation, et je crois que tu l'entends assez souvent. »

─ Douze... Je n'ai pas eu envie de bosser, je marmonne, fournissant une réponse inaudible à notre prof.

Liv me jette un magnifique six sur vingt au visage.

─ Moi non plus ! S'exclame-t-elle.

Elle plaque sa copie sur la table, et, le visage contracté par sa colère, envoie son dos cogner contre le dossier de sa chaise. Je la regarde à peine. Ce qui n'est pas le cas du professeur, qui la dévisage littéralement.

─ C'est bon, je t'aiderai la prochaine fois, je lui assure.

─ Mais tu es agaçant !

Je soupire. J'avais besoin de ce genre de rappel.

─ Ha oui, tu peux soupirer !

─ Ce n'est pas ce que je viens de faire ? Je réplique, un petit sourire ironique souhaitant fortement apparaître.

─ J'hallucine ou il se moque de moi... Lâche-t-elle, discutant probablement avec une entité inexistante.

─ Pas du tout, rétorque celle que j'étais.

Liv paraît sur le point de m'égorger. La colère dévastatrice que je lis dans ses yeux est presque drôle, et je devais dire que je l'imaginais déjà en train de me sauter à la gorge. Un vrai carnage se profilait.

─ Même l'autre t'expliques que tu peux avoir de meilleurs résultats, et tu ne fais toujours rien ! S'exclame-t-elle, Moi regarde, je suis une cause perdue...

Je ne l'écoute plus, me perdant dans mes pensées. Si je cherchais une professionnelle du monologue, je pouvais faire appel à Liv, elle remplissait ce rôle à merveille. À l'instant où elle comprend que je ne prête plus attention à sa comédie, en bonne voie à s'égosiller pour rien, la sonnerie retentit, participant efficacement à mon sauvetage. Telle une enragée, Liv se lève, bousculant sa chaise, enfournant ses affaires dans son sac.

─ Allez, allez, allez, fait-elle d'un ton satisfait.

Elle me bouscule pour passer derrière moi. Je laisse l'animal s'enfuir, n'opposant aucune résistance. J'attrape simplement mon sac, range les quelques affaires que j'avais déballés et la rattrape en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Liv ouvre grand la porte en hurlant un « au revoir » furieux au professeur, qui nous observe disparaître comme si nous n'avions jamais mis les pieds dans sa salle. Nous traversons le couloir, Liv les yeux rivés sur son portable. Risqué, d'autant plus en arrivant dans les escaliers. Liv n'avait jamais été à l'abri d'une chute et moi d'un fou rire.

─ Benjamin et les autres nous attendent à la sortie... Grommelle Liv, le regard toujours plantés sur son téléphone.

Je ne réponds pas. De toute façon, c'était là que nous nous rendions, sans nous poser la question. Nous sortons du lycée, traversant la cour vers le portail principal. Depuis la seconde, Liv et moi avions toujours été dans la même classe. Cela faisait donc environ trois ans que nous nous supportions quotidiennement. Enfin, trois et demi pour être précis. Nous nous étions connus en troisième, mais notre amitié c'était réellement construite au lycée. Nous étions dans la même classe depuis. C'était peut-être par chance, mais je soupçonnais largement le fait que personne n'ose me laisser seul dans une classe vu les « problèmes » dont j'étais accablé, et que je pouvais attirer. D'un point de vue familial, même si je ne pouvais actuellement plus en avoir, mais surtout psychologiques. J'étais vraiment pris pour un pauvre gosse. Je n'étais peut-être pas au top de ma forme, mais ce n'était pas demain la veille que j'allais sauter par la fenêtre d'une classe pour me suicider.

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