James. TOME 2. [Douleurs passées.]

CHAPITRE 7

Une boule se forme dans ma gorge. J'aime être celui qui contrôle tout, je déteste être celui qui ne sait rien.

- Pour commencer, la majorité de ces cartes représentent la ville et ses environs.

Daria me désigne l'une d'entre elles à l'aide de son index que je suis du regard. Sur cette dernière est inscrit "Primose", le nom de la ville aux côtés de laquelle nous nous trouvons.

- Tu peux me rire au nez, mais sache qu'avoir ces cartes nous est très utile. Les outils technologiques d'aujourd'hui sont certes plus rapides en matière de recherche et de géolocalisation, mais il est aussi très facile de les pister et des les pirater. Nous préférons les méthodes d'antan. 

Sur ces mots, Daria m'adresse un léger clin d'œil avant de placer ses bras dans le bas de son dos et de commencer à faire les cents pas. Je suis suspendu à ses lèvres ainsi qu'au moindre de ses mouvements. Elle a toute mon attention. Et c'est très rare.

- Je sais que tu es persuadé que nous faisons partie d'un gang.

- C'est la vérité, non ?

- Non. Rien de tout ça n'est vrai.

À ce moment précis, je peine à maintenir ma surprise tellement elle est grande. Mon coeur loupe un battement et mes yeux s'écarquillent tandis que ma bouche reste légèrement entrouverte.

- Dire que nous faisons partie d'un gang est une couverture.

- Une couverture ?

- Primose est une ville qui regorge d'illégalité et je ne te parle même pas de ses alentours. Les gangs sont courants par ici, personne ne s'en est vraiment caché. De nombreux trafics ont lieu dans ces villes. Nous devions nous fondre dans la masse.

Je viens mettre mes mains de chaque côté de ma tête pour me masser les tempes. Qu'est-ce qu'il se passe ? C'est une caméra cachée ? Une plaisanterie de mauvais goût ?

- En vérité, ce que nous faisons est tout sauf illégal, je dirais même que nous agissons pour la légalité. Tous les cercles que tu vois sur la carte principale de cette table sont nos missions, nos zones d'intervention.

- Zones d'intervention ? Daria, il va falloir être plus précise. 

Je ne comprends rien. Elle semble parler un langage codé que je ne parviens pas du tout à déchiffrer. Un léger soupir vient briser le silence. Daria fini par s'emparer d'une chaise similaire à la mienne pour s'installer face à moi. Nous nous retrouvons à présent chacun aux extrémités de la table ronde. Les deux seules choses qui nous séparent désormais sont ce vieux meuble de bois et l'incompréhension.

- Si nous n'intervenons pas James, personne ne le fera.

***

[John]

Une semaine. Cela fait une semaine que les gamins nous ont rejoint et je n'ai jamais été aussi stressé. Derrière mon attitude et ma mine peu commodes, je maintiens un certain niveau d'anxiété que seule une personne parviens à canaliser. Cette personne ou plutôt devrais-je dire cette femme, c'est Daria. Depuis le départ de Rose, elle m'épaule et fait en sorte de s'assurer que je ne fou pas tous nos projets en l'air. Elle a le côté raisonnable et calme que je n'ai jamais réussi à acquérir. 

Aujourd'hui plus que jamais je suis heureux de l'avoir à mes côtés. Les gamins ont besoin de nous. Surtout Lou qui semble s'affaiblir de jour en jour. Malgré tout, depuis la fameuse nuit où je suis venu les chercher, je ne l'ai jamais entendu se plaindre. La première fois que je l'ai vu, je n'aurais jamais pensé qu'en une si petite et fragile personne pouvait se cacher une véritable force. Elle se bat. Depuis plus d'une semaine. Contre elle-même. Son corps la trahit furieusement. Elle a beau afficher ce doux sourire à chacun de nous, je ne suis pas dupe. Aucun de nous ne l'est. Cette menace qui plane au dessus de sa tête rousse doit la hanter jour et nuit. Mais elle n'est pas la seule a avoir peur. Mon cerveau ne s'arrête jamais de penser pour parvenir à trouver une solution. Nous en avons longuement discuté avec Daria. En plusieurs jours, nous en sommes arrivés à une conclusion commune : nous devons tout révéler à James. 

Je n'étais pas prêt à cela. Personne ne l'est véritablement. Un si lourd secret risque de fortement perturber sa vie. C'est pourtant "la meilleure des choses à faire" si je dois reprendre les mots de Daria. Elle a raison. Le gamin a le droit de savoir, il doit savoir si nous voulons nous en sortir. C'est une étape nécessaire parmi celles qui nous permettrons de mettre en place notre plan d'action.

Le problème est que je crains sa réaction. James est un gamin pleins de fougue, impulsif. Il n'a pas eu la vie simple, mais que va-t-il se passer lorsqu'il se rendra compte qu'une grande partie de sa vie est floue ? N'est qu'un voile de mensonges ?