Chapitre 23 - Chapitre dernier

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La journée s'est déroulée avec automatisme. Je me suis réveillée, puis préparée. Je suis partie en cours, n'ai pas adressé la parole à Lucas et suis rentrée. Trop absorbée par ma prestation d'hier et celle à venir, je n'ai pas vu la journée défiler.

— Tu es prête ? me demande Maman, devant l'entrée de la salle.

— Je crois bien.

Ça a été très compliqué d'arriver dans le MDV. Le passage était bloqué par des racines et la trappe était impossible à ouvrir. Nous avons dû appeler Jean-Philippe sur le téléphone de maman – qui, étonnamment, avait son numéro - pour qu'il envoie les jardiniers du palais débloquer l'entrée. Ils nous ont avoué que cela ne s'était jamais produit auparavant. J'ai bien cru que le couronnement ne se ferait pas aujourd'hui.

Maintenant, nous y sommes. Bien que le MDV essaie de moderniser la monarchie au possible, la tenue du couronnement reste fidèle à la tradition. La robe est blanc neige. Un effet de treillis est brodé aux fils d'or sur tout le jupon très volumineux, celui-ci frôlant le sol de par sa longueur. Resserré à la taille, un corset aux mêmes motifs présente des incrustations de strass et de cristaux. De magnifiques motifs de dentelle finissent les manches courtes qui retiennent une cape pourpre, sur laquelle le logo du MDV y est dessiné en grosse lettres au bout de la cape, lui aussi en fil d'or. Toutes les extrémités de la traîne sont suivies d'une épaisse couche de fil dorés.

Je me contemple pour la énième fois dans cet attirail qui ne me ressemble pas. Un énorme sentiment d'illégitimité me saisit. Je l'écarte aussitôt. Dénuée de tous bijoux, le but était de laisser la place aux objets royaux que l'on me placera durant la cérémonie. Mes cheveux sont uniquement coiffés de manière à recevoir le diadème de couronnement. Lâchés et bouclés, mes deux mèches de devant ramenées derrière mon crâne sont attachées par une broche royale. Dorénavant, je devrais me vêtir de cette manière pour sortir. Étrangement, cela ne me déplaît pas.

Puis soudain, l'idée que mon père, membre de ce monde, n'aura jamais pu assister à ce couronnement m'attriste. C'est la première fois que ce sentiment me parcourt à son égard. Je me rends compte que j'aurai bien aimé qu'il soit là...

On nous intime d'avancer alors je reporte cette pensée pour plus tard. La salle du sacre se trouve au deuxième étage du château. C'est la salle la plus importante de celui-ci. La plus traditionnelle. Nous nous trouvons pour le moment dans la première pièce. La pièce d'entrée. Bien que l'immense porte en bois qui se dresse devant moi serve de cloison, les bruits étouffés des discussions arrivent à mes oreilles.

Le custo-valo (l'homme chargé du sacre) ouvre la porte à Sa Majesté et déclare :

— Sa Majesté, le roi Jean-Phillippe.

Quelques secondes s'écoulent puis vient ensuite mon tour. Le custo-val clame haut et fort :

— Son Altesse Steacy Rochelle, la légitime souveraine de cet empire.

Je lui réponds selon la norme.

— Merci Votre Excellence.

Il esquisse une révérence.

La porte débouche sur une gigantesque salle blanche et or. Le parquet est simplement couleur bois mais un long tapis rouge est déroulé au milieu de la salle. À chacune de ses extrémités, un nombre incalculable de rangées de bancs se présentent. Tous les volants assis sur celles-ci se lèvent à la seconde de mon apparition, tel un seul homme. Ils effectuent au même rythme, la même courbette que celle destinée à Jean-Philippe, un peu plus tôt. Il s'est à présent assis sur un magnifique fauteuil rouge et or à la gauche du secrétaire et au ras de l'estrade. Je ne saurai ni compter le nombre de paires d'yeux tournés vers moi, ni le nombre de rangées que cette salle offre. Lorsque je m'intéresse au fond de la pièce, je peux constater que le long tapis pourpre donne lieu, à sa fin, à une haute estrade surplombant la salle. Une chaise en bois trône sur celle-ci. La fameuse chaise du trône. Bien plus qu'une simple assise. J'ai entendu parler de ce siège plus d'une fois ! Très haut et très imposant, je risque de me sentir minuscule à ses côtés. Le mur se trouvant derrière celle-ci est immaculé de blanc, faisant ressortir le lustre or que la salle impose. À côté de celui-ci, plusieurs petits lampions l'entourent. Cette salle est tout bonnement magnifique ! Les moulures en or suivent tout le plafond ainsi que tous les angles de l'immense pièce.

Ma Double Vie - Livre I : Perdre l'équilibreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant