Chapitre

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Reaper, Geno, Goth. Tout s'était enchainé si rapidement que la lenteur excessive avec laquelle le protagoniste s'en souvenait était fort risible. Il tendit avec une faiblesse extrême le bras pour caresser d'une main timide l'illusion toujours aussi utopique de cette noire toge dont les bords partaient encore en une fumée délicate dont la poussière fit tousser le tentaculaire. Il se rappelait une fois n'était pas coutume de l'odeur âcre de ces fleurs opalescentes maculées de ce fer rougeâtre qui salissait la blancheur des immaculées. Son dernier voyage, il l'avait fait pour lui, dans l'unique but de le voir ; il avait donc été naturel de respecter son choix, cette drôle de loi du silence. Enfin, seulement dans un premier temps puisque, ravagé de le voir s'éteindre à petit feu, le corrompu n'avait eu d'autres choix que de revenir sur sa parole pour dissoudre sa promesse. Comme cette simple quémande à l'inquisiteur lui avait coûté. Pourtant, pour sa Mort, il était passé au-delà de ses propres sentiments et avait amené le demi-mort chez lui.

Ô comme il aurait voulu, s'il l'avait pu, respecter le choix de la Mort de partir dignement. Mais, soyons réaliste, il n'existe aucune « dignité » à se laisser dépérir. La mort, dans son plus simple appareil, n'avait pour elle aucune beauté attrayante. S'époumoner au caprice d'une fièvre dont l'amusement n'est qu'hospitalier, souffrir de la luxure d'une lame valsant sensuellement au supplice d'une main malade, jouir des railleries satisfaisantes dont l'orgasme fait chuter le bonheur. Les mots simples ne sauraient décrire l'ivresse du son qui se parfume d'une âme s'éteignant, ce baiser invisible entre un passé comestible et la nostalgie d'une insouciance telle la récolte d'un temps trop tôt semé. Il n'y a rien d'émouvant ni d'enthousiaste à la constatation trop fugace d'une main dans la poussière. À quoi bon la bienveillance des anges soufflés par l'orage de rêves militant pour leurs existences ? À quoi bon l'espoir d'un bonheur qui attend au vu d'un monument à l'horreur des vivants ?

Nightmare le savait déjà. Il avait vécu le remord tel un fantôme qui flâne, il avait expérimenté les envies qui se fanaient à la routine. Ce dessin sur sa mémoire faisait encore éprouver mille vents dans les voiles de ses dents humides de ses perles salines qui jonchaient souvent ses joues creusées. Cette infirmité de son âme qui l'empêchait de voir au-delà de cette vie vidée de toutes ses couleurs. Sa vie, c'était un peu tout ça, mais surtout, c'était cette petite Mort apprivoisée dont la fanfare de ses fous rires lui arrachèrent encore quelques pièces dans ce mausolée à souvenirs dans l'espoir de le voir revenir. Alors, encore une fois, il tut les pulsations de son âme corrompue pour accompagner ces derniers instants de grâce. Pourtant, à défaut de n'avoir pu le sauver lui-même de sa mauvaise fortune, il avait encore supplié à cet ennemi de son âme de « soigner » l'être tant aimé. Quelle ne fut pas la crise quand cet ignoble personnage se rit de la mort, une fois nouvelle.

Il n'en avait pas fallu plus pour que ces seringas opalescentes finissent d'achever l'agonie de cette mort injuste. Mais le maître des sentiments négatifs le refusait ! Il ne pouvait se résoudre à la fatalité de la mort de l'être aimé bien que la juvénile Mort tentait à chaque instant de le sevrer de cette mélancolique dépression qu'était la sienne. Combien de temps, combien de nuits devrait-il encore passer loin de lui ? Reaper était mort et son âme corrompue l'avait rejoint. Il était mort avec lui. Il avait mal de l'aimer comme lui avait pu l'aimer ce demi-mort des années durant avant d'y laisser ses ailes ébènes. Il n'était plus, cependant son esprit demeurait à ses tourments. Pourquoi Geno... Il aurait pu en vouloir à cet infâme voleur, ce déchaîneur d'une passion mortuaire, mais il n'en avait plus la force. Il était vide de rien, ni ne pouvait se battre ou même affronter la présence des autres qu'il écrasait de son aura amplifiée par sa profonde dépression. Seul Goth et l'optique de revoir son aimé le maintenait à la surface de cet océan corrompu.

Quelle horrible coupable que la dépression qui infligeait plus de coupures sur son âme et de marques pour marbrer son corps au-delà de ce que la raison pense raisonnable. Si seulement la dépression avait pu arrêter de saler sans arrêt toutes ces plaies que le temps ne savait refermer. Mais cette mégère charmeuse avait plus d'un tour dans son sac et elle se fichait bien de la pression oppressant la cage thoracique de l' âme tourmentée par ses maux. Qu'importe les soins des proches de sa victime, cette amante discrète venait toujours plus suavement susurrer aux conduits auditifs de sa proie ces horribles vérités qu'étaient les remords du tentaculaire de n'avoir pu éviter la mort de la Mort dont le sourire cynique se rappelait encore à ses souvenirs corrompus par la tristesse. Toutes ces photos à peine voilées de poussières, tous ces souvenirs déformés par cette perfide amie inculquait à cette pomme noire une souffrance sans nulle autre pareille. Nightmare n'en pouvait plus mais il ne pouvait se défaire de cette relation toxique.

A deadly scented seringuaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant