Troisième Lettre, C.

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Chambre 1519, Lundi 15 Mars.

Cher.e inconnu.e,

Cette troisième missive va probablement être la plus dure à lire. Elle raconte toute la souffrance ressentie au fil des jours.

Tout d'abord, mes amis sont restés avec moi, pour me soutenir, mais petit à petit, comme les gouttes d'eau roulant sur les vitres arrière des voitures que l'on suivait du bout du doigt, ils sont partis là où je ne pouvais plus les voir.

Ils avaient déménagé, avaient rencontré la femme de leur vie, avaient eu des choses à faire, m'avaient oublié tout simplement.

Alors, même si ça s'était fait petit à petit, ou plutôt parce que ça s'était fait petit à petit, à chaque jour qui passait entre les visites, à chaque "au revoir" qui voulait dire "à jamais", à chaque proche qui s'éloignait, je me déchirait un peu plus.

Un Jack heureux et un Jack malheureux. Un Jack rapide, décidé, sûr de lui, et un Jack lent, indécis, qui se détestait.

Je me séparait en deux. Et certaines fois c'était un Jack plus qu'un autre qui ressortait. Je devenais, sans trop le savoir, bipolaire.

Et ça faisait mal. Parce qu'au fond, je ne savais jamais qui, je ne savais jamais quoi, je ne sais jamais comment, ni pourquoi, ni quand, ni où. Je savais juste que je ne serai plus jamais moi-même. Je serai toujours Happy Jack ou Sad Jack. Mais jamais juste Jack.

Et, petit à petit, je m'y suis fait, je ne serai plus jamais comme avant, mais je serai dans le présent. J'aurais plusieurs facettes, mais je serai complet. Je serai enfermé, dans une boucle sans fin de douleur, mais seulement pour un temps. J'allais mourir dans tous les cas, alors je décidais de vivre mes derniers mois en temps que JACK.

Il y a un proverbe chinois qui dit "Face au vent du changement, certains construisent des murs, d'autres des moulins à vent."

Au final mon cancer, ma douleur, ma peine, étaient devenus mon moulin.

Avec résignation,

Jack

JACKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant