- Chapitre 12 -

69 9 5
                                    




« Et que pensez-vous de mourir aux côtés d'un ami ? »



Fezco se leva tôt, ce samedi, bien avant toutes les autres âmes de la maisonnée. Il avait beaucoup pensé à Lexi, cette nuit-là, au fait qu'il la verrait sur scène après ses longs mois de travail qu'elle avait fournis avec toute la hargne et la passion qu'elle possédait au fond d'elle-même. Il n'avait pas le moindre doute : sa petite amie allait accomplir quelque chose d'exceptionnel, ce soir, sur les planches.


Il serait là pour voir ça. Il en rêvait.


Mais ses pensées avaient, sans cesse, fait des allers et retours dans ces doux souvenirs de leurs lèvres collés l'une contre l'autre, dans cette chambre du foyer des Howard, douze heures plus tôt. De la manière dont elle l'avait embrassée, assise sur ses genoux, de la rapidité avec laquelle son sweatshirt avait volé par-dessus le lit une place de Lexi. Chacun de leur baiser, sur cette couchette, fut l'équivalent d'un feu ardent qu'il avait été difficile d'apaiser.


Ces deux derniers mois, depuis l'épisode de Los Angeles et de leur première embrassade, les avaient rapprochés. Fezco avait trouvé du courage, des envies, un nouvel avenir possible, grâce aux yeux d'espoir que Lexi posait constamment sur lui. Ils se soutenaient, se poussaient vers le haut, l'un vers l'autre. Ils croyaient en eux.


Alors oui, à force de penser à tout cela, notamment la chaleur du corps de la petite brune contre lui, il n'avait que peu dormi. Après un petit déjeuner rapide, dans l'agréable silence de l'appartement, Fezco mis le contact dans la Cadillac, par un habile tour de clef, qui ronronna tranquillement, comme à son habitude. Il fit quelques kilomètres afin d'atteindre le centre-ville de leur petite banlieue, un but précis en tête : trouver un bouquet de fleurs pour l'élue de son cœur.


Jamais notre jeune homme n'aurait imaginé un jour, entendre le petit « ding » de la porte d'entrée d'un fleuriste. Il se trouva nez à nez avec une petite bonne femme, qui venait à peine d'ouvrir l'échoppe, et qui le regarda avec un doux sourire. Sur son pin d'employée, Fez vit qu'elle s'appelait Nancy et que, visiblement, c'était elle, la gérante. Tandis qu'il faisait le tour de la boutique, la vieille dame s'approcha de lui, vêtue de chaussures confortables, d'un pantalon de toile large ainsi que d'un col roulé coloré surplombé d'un gilet fleurie. Autour de son cou, trônait un collier vintage de grosses perles marrons, contrastant avec le blanc de ses cheveux ondulés dont les effets de la permanente avaient fini par retomber. Le visage ridé de Nancy se releva vers le haut du crâne du garçon de dix-neuf ans, bien plus grand qu'elle. De très loin.


- Est-ce que je peux vous apporter mon aide, jeune homme ? questionna-t-elle d'une voix douce.


Elle connaissait son métier : elle avait l'habitude de voir des hommes hésitants dans sa boutique. D'en voir des anciens, comme des plus jeunes. De voir des personnes heureuses, des gamins auxquels ils manquaient des dents de lait souhaitant offrir des fleurs à leur grand-mère. Mais également, des bien plus âgées, enterrant des proches. En vingt ans de carrière, cette Nancy-là, avait plus que bourlingué dans l'univers floral de cette petite ville en banlieue de San Francisco.

I - THEIR LIVES - COSMOSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant