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    Devrais-je me tuer ou prendre une tasse de café?

   Ainsi était ma réflexion alors que j'entrai dans un établissement, m'assoyant à une table, réalisant par l'odeur concentrée de la caféine que j'étais à la bonne destination. Lorsqu'une jeune femme s'avança vers moi et m'aborda avec un sourire, je remarquai d'abord l'état irrégulier de ses dents, ses joues bouffies et son tablier vert. Elle semblait être pleine de vie, joyeuse. Puis, un maigre sourire aux lèvres, je lui partage ma réflexion. Je fixais ses yeux, son visage, remarquant comment elle ne cachait pas sa surprise et son horreur. Ce que je lui avais dit était étrange. Si on retournait à la base de ces mots, on pourrait même dire que ma pensée était absurde. Elle était surtout soudaine.

   La femme recula d'un pas, lança un rapide coup d'œil à sa collègue, mais cette dernière ne lui prêtait aucune attention. Je l'avais mise mal à l'aise et cela se voyait. Elle avait le droit de montrer sa subjugation. Les gens se restreignaient de montrer leur surprise ou leur dégoût dans certaines situations dans le but de ne pas froisser leur allocutaire. Mais pourquoi cacher ces émotions lorsque les propos qu'on entendait étaient sordides et provenaient d'une personne qu'on savait déjà insalubre, peut-être même malade mentalement. C'était sûrement ce qu'elle pensait et je ne pouvais la blâmer. Elle tenta une réponse.

   « Je crois bien que boire une tasse de café est préférable au suicide » je la regardai. Mon regard insatisfait la poussait à continuer de parler. J'aurais préféré qu'elle se taise. « Après tout, la vie est importante. Il y a tant de choses qu'on peut découvrir. Le café semble bien plus préférable » je n'aimais pas cette réponse, parce qu'elle semblait tout à fait logique. Mais j'étais dédaigneux de ce genre d'idée, j'en étais nonchalant, légèrement irrité.
   « Je n'aime pas le café. Il est amère » quand je la regardai, je pouvais voir qu'elle ne savait pas quoi répondre. Elle se dérobait de mes yeux. Je me sentis mal. J'eus l'impression d'être un gamin en colère qui désirait faire en sorte que tout le monde autour de lui soit comme lui, scindé par la haine. Je propageais mes sentiments en utilisant une série d'algarades sur les autres. Ces dernières n'étaient pas nécessairement violentes, mais elles étaient de nature peu commune, composées de mots et de paroles ésotériques.

   Quatre jours s'étaient passés depuis que j'avais quitté Séoul. Je paraissais en être étrangement malheureux. Je ruminais d'une manière enfantine et rancunière. Je sursautais à chaque mouvement, je voyais le visage de Jisoo sur chaque femme aux cheveux noirs. On aurait dit que je souffrais d'une névrose.

   J'avais une arme dans cet appartement. Elle était soigneusement rangée au fond d'un tiroir. À la vue de ce bout de métal noir, j'en fus pétrifié. Il avait toujours été là pourtant. Il était chargé et il n'avait jamais bougé de place ou de position. Il était immobile. Je ne l'utilisais pas beaucoup. Au bout d'un jour, je remarquai un curieux détail avec ce fusil. Devant lui, mes mains se tordaient douloureusement. Je n'étais pas capable de prendre ce putain de fusil dans mes doigts. Mon cerveau hurlait des affres d'appréhension. Mon esprit divulguait des pensées délétères. Mon inconscient me refoulait quelque chose. Un sentiment. Une pensée. Une envie ou une certaine intuition.

   Pourquoi hésitais-je à prendre dans mes mains ce compagnon de longue date? Nous marchons main dans la main. Nous l'avons toujours fait et ce, depuis mes 18 ans. Les armes étaient en relation de continuité avec mes mains. Je les utilisais fréquemment. Quand je ne les utilisais pas sur les autres, je pensais à les utiliser sur moi pour mettre fin à mon existence.
   Au bout de six jours sans la voir, je réalisai finalement pourquoi je n'étais pas capable de prendre cette arme. Elle en était la cause. Jisoo.

   Ce rôle que je m'étais forcé à emprunter. Celui où j'étais un amoureux impulsif essayant à tord et à travers de la préserver en vie. Ce rôle s'était imprégné sur moi. J'avais parlé avec éloquence. J'avais parlé d'amour, de sentiments d'une puissance inouïe dont je n'ose même pas mentionner dans mes cauchemars, encore moins dans mes rêves. Cette perspective que je ressentais vraiment des sentiments pour une femme avait charmée mon for intérieur. C'est ainsi que je me rendis compte que j'avais toujours voulu que cette expérience m'arrive.

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⏰ Dernière mise à jour : Jun 17, 2023 ⏰

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𝐋𝐄 𝐒𝐏𝐀𝐃𝐀𝐒𝐒𝐈𝐍 | 𝘬.𝘵𝘩Où les histoires vivent. Découvrez maintenant