Calendrier de l'Avent 2022 [Terminé]

7🎄 Un Vœu pour Noël

Distrait par l'abondance de flocons chutant du ciel, Matteo avait tourné la tête vers la fenêtre pour observer les intempéries neigeuses, oubliant temporairement le lait qu'il faisait chauffer sur la taque de cuisson. L'hiver l'avait toujours enchanté ; en réalité, chaque saison offrait à ses yeux des merveilles qui se révélaient à tous ceux qui se donnaient la peine de les voir : les fleurs éclosant au printemps, le soleil doré de l'été, les feuilles rousses de l'automne... Pourtant, la couche de poudreuse enveloppant le sol comme une couverture réconfortante, le givre s'accrochant aux carreaux et à la végétation ensommeillée, ainsi que le froid piquant sa peau pour le revigorer conservaient un aspect plus magique encore que les autres époques de l'année.

Les notes de la douce musique s'élevant dans le café accompagnaient le mouvement effréné des épais grumeaux blancs, transformant les précipitations en un ballet passionné d'étoiles glacées qui virevoltaient avec délicatesse et grâce sous la lumière des lampadaires. Le jeune homme ressentait une profonde satisfaction en observant cette danse enneigée dans la chaleur de la pièce qu'il occupait, les arômes épicés des infusions lui chatouillant les narines et le réconfortant fumet du chocolat l'enveloppant dans une couverture de bien-être. Chocolat... songea-t-il alors qu'il fronçait lentement les sourcils, certain d'avoir oublié un élément crucial.

-Chocolat ! s'écria-t-il en entendant le liquide dans le poêlon émettre de gros bouillons.

Matteo se précipita sur le bouton « diminuer » de la taque de cuisson, son inquiétude s'amenuisant à chaque bip sonore annonçant une baisse d'intensité. Agitant la cuillère en bois dans le lait mélangé au chocolat fondu, il soupira de soulagement en constatant qu'aucun dégât permanent n'avait atteint la boisson. Et ça ne sent pas non plus le cramé, donc c'est une bonne nouvelle... pensa-t-il en se détendant.

-Matteo, dušo, tu es encore en train de rêver, soupira la voix de sa grand-mère derrière lui. Pendant que les clients attendent !

-Pardon, baba, ce sont les flocons de neige qui m'ont distrait, confirma-t-il avec un haussement d'épaules mi-désolé, mi-amusé.

-Toujours dans les nuages... s'agaça faussement son aïeule.

-Je t'ai déjà dit que c'est impossible, lui rappela l'intéressé. Si j'avais la tête dans les nuages, je ne pourrais pas observer les étoiles.

En secouant la tête, baba Liljana s'éloigna de son petit-fils alors qu'un mince sourire - qu'elle essayait vainement de dissimuler - animait ses lèvres. Mais Matteo n'avait pas besoin de le voir pour savoir qu'il était présent : sa grand-mère pouvait feindre l'irritation envers l'étourdissement du jeune homme, mais jamais elle ne parviendrait à éprouver une véritable contrariété envers lui. Sans prononcer les mots pour l'exprimer, elle lui faisait comprendre de bien des manières qu'elle était à la fois heureuse et reconnaissante de l'aide qu'il lui apportait dans son café pendant les vacances de Noël. La période des fêtes signifiait toujours une fréquentation qui se présentait de manière aléatoire, tantôt aussi calme qu'un amphithéâtre d'université pendant un cours tardif, tantôt aussi animée qu'une soirée estudiantine ; aussi, de la main d'œuvre supplémentaire s'avérait toujours utile.

La vérité, c'était que Matteo adorait venir travailler au café pendant ces deux semaines. Non seulement, il prêtait main-forte à sa baba avec un plaisir non dissimulé, mais en plus, il retrouvait les habitués des congés hivernaux et aimait prendre de leurs nouvelles en cette époque où tout le monde semblait penser que les gens ne se souciaient que d'eux-mêmes. On reprochait souvent au jeune homme d'être trop optimiste ; mais il n'avait jamais compris pourquoi tenter de voir le bien autour de lui subsisterait un défaut à éradiquer. Ces gens qu'il retrouvait depuis quatre ans maintenant lui rendaient toujours le sourire, même lorsque son moral était miné par les examens et les études. Ils avaient sur lui l'effet d'une étincelle, brillant dans le néant avec espoir et détermination, les vertus d'un baume réparateur répandant douceur et chaleur. Ils étaient un plaid moelleux dans lequel il s'enveloppait quand la morosité s'emparait de lui.