Calendrier de l'Avent 2022 [Terminé]

9🎄L'esprit de Noël

Dans le ciel bleu dépourvu de nuages brillait un soleil froid qui éclairait la ville sans pour autant la réchauffer. Ses rayons dorés nimbaient les bâtiments d'une aura lumineuse, adoucissant généreusement la fraîcheur mordante de la matinée. Des guirlandes d'ampoules - éteintes à cette heure de la journée - étaient suspendues entre chaque lampadaire desquels coulaient de petites stalactites qui reflétaient l'éclat de l'astre diurne. Recouvrant sans distinction les trottoirs, la route et l'étroit parterre de végétation endormie qui s'étendait au milieu de la petite place, la neige formait une couverture blanche et brillante sous la pureté de l'azur. Ponctuée de traces de pas, la nappe cotonneuse et sournoise retraçait le chemin que les passants avaient emprunté.

S'enivrant de l'air frais du matin du réveillon, Jeremy écoutait avec ravissement la poudreuse crisser sous les semelles de ses bottines. La sérénité qui englobait la place et les quelques personnes s'y attardant s'insinuaient dans son cœur et dans son esprit pour le laisser apaisé et enjoué. Même la brise vicieuse lui piquant les joues et glissant entre les mailles de son bonnet orange n'amenuisait pas l'alégresse qu'il éprouvait à se trouver ici, en cet instant précis. Avec un soudain frisson, il resserra son écharpe autour de son cou et accéléra le pas, se souvenant soudainement qu'il était pressé. S'il continuait à flâner, il risquait de rater la personne qu'il tenait absolument à rencontrer aujourd'hui.

Un sourire se dessina sur ses lèvres à cette simple pensée, et son cœur s'emplit d'une douce gratitude. Tâtant vaguement le sac en toile suspendu à son épaule pour en vérifier son contenu, il éprouva un vif soulagement en constatant qu'il n'avait pas oublié son cadeau. Pourtant, une tension crispa ses épaules à l'idée de l'offrir à son destinataire, inquiet de ne pas avoir pu trouver le présent adéquat, qu'il ne soit pas assez bien ou encore qu'il se soit complètement trompé. S'insinuant dans les méandres de son esprit pour paralyser la gaité que l'ambiance festive avait éveillée en lui, le doute s'immisça comme le venin d'un serpent parcourt les veines de sa victime. Avec discrétion et puissance. Sournoiserie et fermeté. Fatalité.

Lorsque Jeremy arriva enfin devant le bâtiment dont l'enseigne annonçait « Le Petit Café », il darda un regard par la vitrine décorée de formes en fausse neige et d'étoiles blanches suspendues. Des lumières irisées clignotant sur un sapin de Noël égayait l'intérieur de la pièce aux couleurs claires et reposantes, créant une atmosphère calme et chaleureuse. Quand ses yeux marrons tombèrent sur un homme au visage finement ridé dont les yeux rieurs lisaient le journal déplié sur la table à laquelle il était installé, et dont la main tenait une tasse de café fumante qui n'attendait que de refroidir, Jeremy sut que, malgré la nervosité qui le tenaillait, il avait fait le bon choix. Cette conviction s'éparpilla en lui, telle une étoile filante dispersant sa poussière scintillante dans son sillage.

Un léger tintement de clochettes accueillit l'adolescent lorsqu'il poussa la porte vitrée du bâtiment. La tiédeur des lieux contrastait avec l'air glacial de l'extérieur, démangeant désagréablement la peau de son visage alors qu'elle se réchauffait. Avisant le manteau accroché au dossier de la chaise du vieil homme et son béret soigneusement suspendu au coin de la table, Jeremy hocha la tête pour freindre une assurance qu'il ne possédait pas et extirpa le cadeau de son sac en mordant ses lèvres gercées par le froid. Serrant le paquet entre ses doigts emprisonnés par les mailles brunes de ses gants, il s'approcha de la personne convoitée et bascula son poids d'une jambe à l'autre, hésitant, avant de l'interpeler timidement :

-Monsieur Arnold ?

L'intéressé leva la tête de son journal, surpris d'être ainsi interpelé, et adressa un sourire au jeune homme, une étincelle de surprise et de joie animant subitement son regard.

-Jeremy, quelle bonne surprise, s'exclama-t-il en ôtant les lunettes de son nez. Ne m'avais-tu pas dit que tu devais aider tes parents pour les préparatifs du réveillon ?