Chapitre 2

28 0 0
                                    


Le visage de Marek ressemblait à celui d'un petit enfant endormi. Parsemé de micro-goutellettes, les yeux fermés, parfaitement détendu; sa peau caramel, ses lèvres pulpeuses, ses cils courts mais noirs et recourbés, et ses cheveux dont les boucles, alourdies par l'eau, tombaient un peu plus devant ses yeux... Il était beau, ainsi. Possible qu'Ana ai craqué pour lui parce que c'était ce genre de beauté qu'elle voyait, là où les autres ne pouvaient pas la voir, à cause notamment de son caractère... Comment dire...

Son visage paisible se crispa subitement en la mimique la plus niaise qu'il soit donné de voir.

- Mais qu'est-ce qu'on fiche encore ici, sérieux ! s'écria-t-il en se tournant vers l'intérieur. On trouvera jamais rien ! Y'a des centaines de grottes de millions de kilomètres ! Le Roi nous a donné cette mission pour prouver aux Mondes que notre Reine ne vaut rien !

Tim, qui inspectait la paroi à quelques mètres de son ami, secoua la tête. Marek ne pouvait pas le voir, mais il souriait tout de même, parce qu'il le trouvait drôle.

- Non, on doit vraiment chercher. Toi comme moi, on a besoin de cet argent.

Marek fit la moue avant de se décider à le rejoindre, un peu plus à l'intérieur de la caverne derrière la cascade. Les deux garçons venaient tous deux d'un milieu relativement pauvre. Le métis n'était même pas un garçon avant : il n'était qu'un esclave. Petit, jamais il n'aurait imaginé vivre une vie où il serait traité comme un homme, et d'ailleurs, quelques fois encore malgré les années qui s'étaient écoulées, il se sentait moins qu'un homme, et cela le gênait presque qu'on le traite comme tel.

Bien sûr, cela ne durait jamais longtemps, et il était extrêmement heureux de cette vie d'homme, mais parfois, le doute subsistait à l'intérieur de lui sur sa vraie nature, sans qu'il en parlât jamais à quiconque. Sauf peut-être à une personne...

Tim, lui, avait dû se battre dès son plus jeune âge contre la faim et la soif. Plusieurs de ses frères et sœurs, trop faibles, n'y avaient pas survécu, et s'il était dans les Escadrons, c'était pour leur envoyer de l'argent afin d'acheter de quoi subvenir aux besoins de sa grande famille.

- N'empêche que Adagio il fait rien tranquille là... râla encore Marek en secouant sa coupe plus ou moins afro pour en chasser l'eau.


A la vérité, Adagio ne faisait pas vraiment "rien". Il faisait le guet. Enfin c'était ce qu'il avait d'abord dit, avant que Marek ne fasse une blague douteuse sur le fait qu'il était déjà gay -oui, la blague se traduit très bien en Langage de l'Im ce qui est plutôt parfait pour moi je vous l'avoue-. Il avait alors décrété qu'il n'était ni ne ferait le guet, mais qu'il allait plutôt "garder le vaisseau".

Alors, Adagio gardait le vaisseau. C'était ce qu'il faisait déjà lorsque les deux équipes avaient fouillées les deux premières Chutes, et c'était ce qu'il faisait encore à présent. Malgré les longs jours que son équipe passait à fouiller les nombreuses grottes qu'elles cachaient -ce qui prenait parfois plusieurs jours et plusieurs nuits consécutifs-, il était toujours occupé, que ce soit par un roman qu'il avait réussi à extirper de la besace d'Eve, par ses couteaux de lancé avec lesquels il s'entraînait à faire des figures -mais soyons réalistes, Adagio était beaucoup trop timide pour les montrer à qui que ce soit- ou encore par un bâton dans lequel il gravait des runes protectrices pour mieux se battre.

D'origine Andorphyenne et descendant d'une famille d'herboristes, Adagio était très pieux et ressentait tout ses ancêtres -beaucoup plus nombreux depuis la mort de ses frères, sœurs et parents- derrière lui à chaque action, ce qui, étonnamment, avait aidé à diminuer sa timidité maladive. Ses parents pouvaient être fiers de lui. Lorsqu'ils étaient en vie et que quelqu'un d'autre qu'eux posait le regard un peu trop longtemps sur leur fils, il arrivait que celui-ci défaille pour cause de manque d'oxygène. Désormais, même s'il lui était encore difficile de regarder les gens qu'il ne connaissait pas, il pouvait parler sans trop de peine avec ses amis, et même prendre la parole alors que personne ne faisait attention à lui, certaines fois. Et cela allait en s'améliorant.

Les Aventures de l'Escadron n°5 - Les Armes du DestinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant