Chapitre 8

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- Sirius, dit-elle d'un ton timide en se tortillant légèrement.

- Hermione, dit-il également avec une voix plus rauque qu'à l'accoutumée.

Voix qui provoqua des frissons chez Hermione. 

La médico-mage déglutit discrètement et tenta de reprendre contenance en adoptant une posture plus confiante, quoique pas tellement crédible. Elle s'avança jusqu'au pied du lit du patient et d'un coup de baguette, fit apparaitre tout son attirail de médecin sur une petite table haute. 

- Comment te sens-tu ? Demanda-t-elle en s'emparant d'un carnet de notes et d'un stylo. 

- Mieux que les premiers jours. 

- Ta blessure te provoque-t-elle encore des douleurs insupportables ? 

- Seulement après qu'on change mon pansement, répondit-il avec un brin d'agacement dans la voix, désirant discuter autre 'chose' que ses blessures. 

Hermione tressaillit légèrement, ne s'attendant pas à un Sirius irrité. Elle l'ignora néanmoins et continua à l'interroger sur sa santé physique en détaillant brièvement chaque réponses sur son petit carnet. Après tout, elle était ici pour ça. Pour faire un rapport. C'était son métier. 

A plusieurs reprises, elle dut barrer des mots, les recopier, les changer, trop perturbée par le regard perçant que lui attribuait le jeune homme, faisant naitre une boule d'angoisse au fond de sa gorge. Elle n'avait pas envie de continuer cet examen médical, ni d'être là. Contrairement à Harry et Ginny, elle avait eu beaucoup de mal à aller de l'avant après la guerre. Au point où elle n'était pas retournée à Poudlard, ne voulant plus jamais remettre les pieds là-bas, n'en ayant pas le courage. Et aujourd'hui, se retrouver devant un mort, une personne qui lui avait été chère, pour qui elle avait versé tant de larmes, lui était bien trop compliqué. Bien trop effrayant à affronter. 

Alors qu'elle s'apprêtait à mettre fin à cet interminable entretien, les paroles de Drago affluèrent en force dans sa tête, lui assénant une gifle mentale au passage. Non mais quelle idiote ! Comment pouvait-elle oser abandonner ainsi sans essayer de se battre ? Elle avait vu des choses bien plus monstrueuses qu'un mort-vivant. Se tenir en face de Sirius, c'était comme se tenir en face de ses démons du passé. Il fallait les affronter une bonne fois pour toute. 

Pas que le parrain de son meilleur ami était un mauvais souvenir à ses yeux, non, bien au contraire. Mais le revoir la replongeait dans d'atroces songes que la brune aurait préféré laissé aux oubliettes. Comme une certaine folle à lier qui t'as lacéré le bras. Ou un certain loup-garou qui t'as humé à t'en priver d'air (Greyback). Ou encore-

- Tu comptes éviter mon regard encore longtemps ? S'exclama Sirius soudainement la prenant de court. 

Hermione ouvrit la bouche pour rétorquer quelque chose mais rien ne sortit. Après tout, qu'est-ce qu'elle aurait pu dire ? Ne serait-ce donc pas ce qu'elle était en train de faire ? Éviter son regard ? Elle baissa la tête. Que pouvait-elle bien répondre ? 

- J'ai besoin de vérifier ta blessure, fut la seule chose qu'elle réussit à trouver. 

Le noiraud soupira mais ne pipa mot, enlevant sa chemise de chambre pour permettre à la brune d'examiner sa plaie. Celle-ci s'avança plus près de lui et s'abaissa légèrement au niveau de l'ouverture qui commençait doucement à cicatriser. Bientôt, on pourra lui enlever ses points de suture et le laisser quitter l'hôpital. 

Elle effleura délicatement la blessure du bout des doigts et ressentit une petite décharge électrique lui picoter la main. Elle apporta sa baguette à la future cicatrice et l'examina rapidement pour s'assurer qu'aucun problème intérieur ne serait susceptible de perturber la cicatrisation. Elle sentait l'odeur de Sirius effleurer ses narines, une odeur d'anesthésie qui picote au nez. L'odeur typique d'un hôpital. Mais ce qui la dérangeait était son souffle à lui. Son souffle qui venait directement s'abattre sur son front. Était-elle aussi proche pour le sentir aussi près ? Elle releva légèrement les yeux et elle constata, qu'en effet, ils étaient proches, très proches. Trop proches. Leurs visages se trouvaient à quelque centimètres à peine de l'autre. 

Au moins, il a bonne haleine. C'est déjà ça. 

- Est-ce que... j'ai fait quelque chose de mal ? Demanda Sirius d'une petit voix, se sentant coupable d'une chose inexistante. 

Hermione le regarda droit dans les yeux en fronçant les sourcils. 

- Non, non bien sûr que non, pourquoi penses-tu ça ?

- J'en sais rien, tu m'évites et tu refuses de me regarder, j'en déduis que j'ai du te faire un mauvais coup avant de... mourir, dit-il en grimaçant au dernier mot. 

La brune soupira doucement en sentant une pointe de culpabilité l'étreindre à la gorge. Depuis qu'il était arrivé à Ste-Mangouste, elle n'avait pas été lui rendre visite une seule fois excepté pour faire son rapport. Bien évidement qu'il avait du penser avoir fait quelque chose de mal. 

- Non Sirius, tu ne m'as rien fait, absolument rien. 

- Alors pourquoi ? 

- Je... c'est... ça me fait juste bizarre tout ça. Toute cette situation. Pendant tout ce temps, j'ai toujours pensé que tu étais mort, j'ai essayé de faire mon deuil, d'avancer après la guerre et quand enfin, j'arrive à passer à autre chose, à ne plus penser à toi et à tous les autres qui sont morts, tu réapparais comme ça ! D'un seul coup ! 

Au fur et à mesure de sa tirade, son souffle se faisait de plus en plus rapide et court. Elle semblait faire une crise d'angoisse. Sirius attrapa délicatement sa main qui était restée en suspens sur son torse. Il caressa l'intérieur de sa paume dans des gestes doux et affectueux, l'incitant à se confier entièrement à lui. Et c'est ce qu'elle fit, elle lui raconta ses angoisses du temps de la guerre, elle lui raconta sa peur d'être reconnue à chaque fois qu'elle sortait dehors, elle la Sang-de-Bourbe. Elle lui raconta à quel point elle était toujours sur ses gardes et la fois où elle avait failli planter sa baguette dans l'œil d'Harry alors qu'il avait juste posé sa main sur son épaule. Elle lui confia également toutes les fois où elle n'avait pas su dormir à cause de la panique d'être attaquée à tout instant, toutes les fois où elle avait failli s'écrouler pendant qu'ils recherchaient les horcruxes à cause de la fatigue. 

Elle lui raconta absolument tout, ne lui épargna aucun détail sur la bataille et sur ce qu'elle a ressenti durant. Et lui, il l'écouta du début à la fin, ne l'interrompant à aucun moment et la laissant vider son sac. Il encaissa tout: les détails sanglants, les mots tranchants, les morts atroces, surtout celle de Servilus, et toutes autres choses horribles qui font parties de la guerre. 

À la fin, Hermione se trouvait à demi dans les bras de Sirius, une jambe sur la sienne, l'autre s'appuyant contre les bords du lit. Le noiraud, lui, avait passé une main autour de sa taille et la deuxième caressait le dos de la jeune femme dans de longs mouvements ayant pour but de la détendre. 

D'un point de vue extérieur, on aurait sans doute pu penser que les deux s'enlaçaient amoureusement mais la vérité était loin de là. L'une craquait et l'autre la soutenait. 

-  Chut, ça va aller, disait le jeune homme d'une voix doucereuse. 

- mmh... oui, merci.., répondait la jeune femme entre deux sanglots. 


*


- Eh bien, elle en met du temps la brunette. 

Drago était vautré sur le siège de son bureau, lisant les rapports médicaux de ses patients tout en émettant un petit commentaire sarcastique à tel ou tel passage. Il déposa les feuilles dans un de ses tiroirs et soupira bruyamment en regardant l'heure. 

- On dirait que je vais devoir rentrer seul aujourd'hui. 


Retour d'outre-tombe [Sirmione]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant