Chapitre 4 : Charlie

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La petite Emelie est posée sur mes genoux et elle barbotte gentiment. Elle essaye d'attraper mes longs cheveux pour jouer avec. Je profite qu'elle soit occupée pour lui enlever ses vêtements d'hiver. Elle sera plus à l'aise sans cette masse de vêtements qui l'empêche de bouger correctement. Elle doit avoir quelques semaines tout au plus et semble trop maigre pour son âge. Comment peut-on laisser un nourrisson mourir de faim ? Ma colère envers la famille Drake enfle davantage. J'ai beau savoir que Tobias n'est pas responsable des actes de son père, cela ne m'empêche pas de sentir la haine refaire surface. Je ressens encore la douleur dans mes mains et sur mes avants bras, abîmés à jamais par la connerie d'un Drake. Cependant, cette douleur n'est rien comparée à celle que je ressens dans mon cœur.

Je passe la plus grande partie de la journée à m'occuper d'Emelie avec ma grand-mère, cela ne m'empêche pas de surveiller Tobias et de constater qu'il travaille vite et bien. Au moins, il n'a pas tout hérité de son père, c'est déjà ça. Toutefois, la ressemblance est frappante. Il a la même carrure, la même posture que son père, quoi qu' en prenant le temps de bien le détailler, ses épaules sont davantage voûtées que celles de son père, comme s'il était accablé par la culpabilité. Ses yeux sont de la même nuance verte émeraude que son père, mais son visage est plus fin et agrémenté d'une courte barbe.

Même si la ressemblance me saute aux yeux, c'est son regard, remplis de tristesse et de culpabilité qui m'interroge le plus. Son père n'a jamais laissé paraître le moindre regret, la moindre trace d'humanité. Lorsqu'il a été mis face à ses crimes, il n'a pas sourcillé, comme si tout le mal qu'il avait causé lui était égal. Ce que je lis en Tobias est totalement le contraire et ça me déstabilise. Une part de moi a besoin qu'il soit son père, j'ai besoin qu'il soit détestable.

En fin d'après-midi, je vais m'installer confortablement dans un fauteuil et je nourris ce petit ange. Elle est si calme et très éveillée pour son âge. Sa présence me rappelle tellement de souvenirs, à la fois bons et mauvais.

Nous sommes toujours en pyjama et je me remémore les moments que nous partagions avec grand-père, peu de temps avant sa mort. Ma grand-mère finit par interrompre cette parenthèse pour me parler des Drake. Elle s'installe confortablement dans le canapé à mes côtés.

- Tu sais ma chérie, j'aimerai effacer la douleur et la colère qui sont en toi. Je sais que tu es forte, courageuse et que tu es une battante, mais ne sois pas si dure avec toi-même et encore moins avec Tobias. Il avait le même âge que toi quand l'accident est arrivé et visiblement, ses parents n'ont pas jugé bon de le mettre dans la confidence. Et regarde comment il vit aujourd'hui ?

- En le voyant je ne peux pas m'empêcher de le détester. En voyant Tobias, j'ai l'impression de revivre cette nuit, encore et encore. Et quand je regarde Emelie, j'ai le cœur qui se brise, car je crois revoir Anya. Grand-mère, je sais que je ne dois pas mettre Tobias dans le même panier que son père, mais je ne peux pas m'en empêcher c'est plus fort que moi. Dis-je en serrant le poing sur mon cœur.

Ma grand-mère prend Emelie qu'elle tient dans un bras et me prend la main de sa main libre. Elle me serre fort en plongeant ses yeux dans les miens.

- Je sais que ce tu as vécu cette nuit-là a été un véritable enfer ma chérie. Cependant, ne laisse pas ta haine dicter ta vie !

- A t'entendre on dirait que tu ne lui en veux pas !

- Bien sûr que je n'en veux pas à Tobias ! Enfin ma chérie, ce n'est pas lui qui a créé tout ce désastre !

- Non bien sûr, je parlais de son père.

- Pardonner n'est pas oublié.

Elle me répète sans cesse cette phrase, mais comment fait-elle. Elle reprend d'une voix plus douce, plus apaisée.

Le Chemin Glacé vers ton Cœur BrûléOù les histoires vivent. Découvrez maintenant