- Papa ! Papa ! Papa !
Depuis le gouvernail, alors que son regard se perdait à l'instant dans l'océan, l'Empereur observe une petite forme se mouvoir sur le pont. Elle manque de tomber tous les trois mètres, facilement emportée par le mouvement du bateau sur cet océan calme. Pas plus haute qu'un martin facteur, elle hurle à plein poumon pour attirer l'attention de son paternel qui, pourtant, la lui accorde toute entière. Un mince sourire flottant au bord des lèvres, il attend sagement qu'elle se hisse jusqu'ici. Il voit d'abord sa chevelure rousse se détacher des escaliers, puis ses mains l'aider à se relever, et enfin ses fossettes lui offrir cette frimousse qu'il chérit tant.
- Yasopp, eh bin, eh bin, articule-t-elle en reprenant son souffle. Eh bin, y m'a dit que son amoureuse elle avait pondu un chiard !
L'air étonné de Shanks arrache un rire à ses hommes, postés plus bas et désireux d'observer la scène offerte par cette turbulente gamine qu'ils supportent depuis trois ans. Le capitaine jette un regard mauvais au tireur d'élite avant de lever les yeux au ciel. Élever une môme sur un bateau pirate, entouré d'hommes au jargon fleuri, semble parfois si épuisant qu'il pourrait regretter sa présence.
- Et moi, ma maman qui m'a pondu, c'était ton amoureuse ? Demande Hiyori en tendant les bras vers son père pour qu'il la porte.
Il s'exécute, incapable de refuser quoi que ce soit à ces deux grands yeux noirs, mais surtout amusé par ses questions loufoques. D'un signe à son second, Ben, il l'enjoint à prendre la barre pour s'écarter de quelques pas. Contre l'une des barrières qui retient souvent sa fille de passer par-dessus bord, il s'adosse. Et, l'espace de quelques secondes qui s'étirent à l'infini, il repense à cette île, à ces nuits endiablés et à cette femme qui ne sort jamais de ses songes...
~ Quatre ans auparavant ~
Amarré dans une petite crique au nord-ouest de l'île Azur, le Red Force tangue au rythme des vagues qui viennent se fracasser sur la côte. Le paysage ne déplaît pas à l'équipage du Roux. Tant mieux, car ils doivent stationner ici près de trois mois en attendant que les courants marins de l'hiver passent et leur permettent enfin de rejoindre leur future destination. Un temps de repos finalement attendu de pied ferme par tous. Sur cette île, ils pourront goûter aux joies insouciantes du repos sous un soleil rasant mais ô combien agréable. Si Shanks passe la journée dans sa cabine à organiser, dès aujourd'hui, leur départ, il rejoint ses camarades le soir venu sans se faire prier. Au fond d'un bar en bois à la façade vieillie, ils commandent chopes sur chopes. A mesure que la boisson descend, ils voient arriver des groupes d'hommes par dizaines. L'euphorie remplit peu à peu la pièce. Certains râlent de ne plus trouver de place libre, d'autres jouent des coudes pour s'approcher au plus près d'une estrade. Une échauffourée pourrait vite éclater mais le tenancier - un homme à la carrure aussi impressionnante que celle du second de l'équipage du Roux- tient toute cette testostérone d'une main de fer. Soudain, la lumière s'éteint, emportant avec elle les bruits parasites des conversations qui fusaient jusque-là. Shanks se tourne lentement vers la scène, intrigué par ce qui impose un silence pareil dans la salle. Les den den mushi disposés de part et d'autre du bar s'activent et diffusent une pâle lumière en même temps que les premières notes d'une musique au piano.
C'est là qu'il la voit. Elle se met à tendre délicatement ses bras en avant, dessinant des formes abstraites dans l'air avant de joindre ses hanches à la danse. Dans sa robe aussi noire que ses cheveux, elle laisse ses courbes envoûter l'assemblée. Le roux ne peut s'empêcher de se redresser de son assise, comme la plupart de ses camarades autour de lui. Il en oublie de cligner des yeux tant cette chorégraphie l'envoûte. Les notes s'emballent à mesure que les secondes filent. La danseuse claque ses talons sur le sol en rythme et enjoint son public à suivre. Ses pas se font plus fébriles. Elle avance, recule, tangue de bâbord à tribord. Ses mèches suivent la course folle de ses pas qui eux-mêmes suivent les notes effrénés de ce piano - rejoint désormais par une guitare, puis une batterie et enfin une basse. Les loubards d'ici connaissent cette mélodie par cœur mais la danse continue de les hypnotiser toutes les semaines. Le sourire de la danseuse rayonne et ne disparaît jamais. Même quand ces badauds tendent leurs bras pour tenter de la tirer vers eux. Si les mains se font baladeuses, elle avance, la tête haute et l'un de ses talons aiguilles - à faire tourner de l'œil n'importe qui - en guise d'arme. Son pied se cale sur une tête tandis qu'elle envoie valser ses courtisans. Les secondes s'étirent comme des minutes, et les minutes comme des heures. Alors que le spectacle se termine, Shanks vide sa chope d'une traite avec une seule pensée en tête : ces trois mois d'attente passeront bien plus vite avec un divertissement pareil.
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One-shot à la demande [manga/animé]
Fiksi PenggemarVous passez commande, j'écris. Rien de plus simple ! Une petite envie de m'ouvrir aux histoires que vous pourriez aimer lire, qui vous traversent l'esprit mais que vous n'envisagez pas forcément d'écrire vous-même. Je ne connais pas tous les mangas...