Une Enquête de Parseiphanos

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De l'extérieur, Serpos était une ville comme en avait toujours connu le jeune Parseiphanos. Il avait quitté l'île de Pareis où il avait grandi il y avait de cela quatre ans, pour commencer son éducation à l'Académie. Tous les premiers nés (et les premières nées) y étaient obligés, et la plupart n'y restaient que pour les deux ans requis. Parseiphanos avait décidé de poursuivre ses études dans les arts de la magie, s'étant pris de passion pour leurs mystères. Sans arriver en haut de la liste, il avait eu de bons scores aux concours, et avait été accepté en tant qu'adepte. Son sens de la logique lui avait ouvert les portes du bureau de certains gouverneurs tharséiens, jusqu'à ce que celui de l'île d'Archais lui offre d'aider sa garde à enquêter sur certaines affaires. Le jeune homme d'à peine vingt ans ne put refuser, trop enthousiaste à l'idée de pouvoir mettre ses maigres talents à profit.Un mage, c'est utile à tout : la magie est si difficile à appréhender et apprendre que l'on peut estimer qu'un mage est naturellement doué pour résoudre les énigmes. Et parfois, ce sont les glyphes qu'il trace ou les potions qu'il concocte qui se chargent de mettre à jour des affaires particulièrement obscures. Il était de notoriété publique qu'un bon bureau de gouverneur ne pouvait pas rendre la justice de façon correcte sans avoir un mage à son service. Serpos était bien plus grande que le village où Parseiphanos avait grandi, mais n'égalait pas l'étendue tentaculaire de Phiros, la ville qui accueillait l'Académie. Capitale de l'île d'Archais où elle nichait dans ses falaises méridionales, c'était une cité de taille intermédiaire, prospère sans exubérance. Sans être des lapins de deux semaines, ses habitants n'étaient pas particulièrement méfiants des gens de passage. Une ville très ordinaire, si ce n'était l'affaire pour laquelle on avait ordonné à Parseiphanos de prendre la première trirème partant de Phiros dès que l'année universitaire serait terminée. Les meurtres n'étaient pas rares en Tharseis, ou dans tout le monde marétide, alors il y avait fort à parier qu'il y avait quelque chose de particulier avec celui de Phaerné. Le temps que Parseiphanos arrive, le corps de la victime avait été embaumé dans un linceul magique assez coûteux : non seulement Phaerné était décédée dans des circonstances étranges, mais étant un personnage prépondérant dans la société de Serpos, tout le monde ne parlait que de cette affaire. Parseiphanos faisait son maximum pour ne pas laisser la pression le broyer, en vain. Il n'arrivait pas à se départir de cette impression sourde d'étouffer, ou de celle qu'il avait d'être épié lorsqu'il marchait dans la rue. Il avait cru pouvoir profiter un peu de la ville avant de se mettre au travail, et il s'était trompé. Tout lui rappelait ce pourquoi il était venu là, et il culpabilisait trop de faire tarder une victime qui n'avait que trop attendu. Il se rendit donc à la maison des morts, endroit où on gardait les corps des décès suspects : les autres étaient rapidement embaumés et rendus à Maretis, comme cela se faisait dans tout l'archipel de Tharseis. Une fois son laisser-passer lu par le gardien des lieux, on l'emmena dans la section réservée. Il la trouva minutieusement remisée, enveloppée d'un tissu blanc recouvert de glyphes protecteurs. On lui avait dit qu'il avait été impossible de déterminer la cause de la mort, et vu l'état du drap immaculé, Parseiphanos ne s'attendait pas vraiment à un massacre. Et ce n'était pas le cas : en retirant le tissu, il découvrit un visage et un corps intact, figé dans le temps grâce aux glyphes. Les lèvres et les ongles bleuis trahissaient l'absence de vie du sujet, qui autrement, aurait pu être en train de dormir. Se mettant au travail, Parseiphanos examina le corps en détail. Phaerné avait été une femme brune d'une trentaine d'années, dont les longs cheveux bouclés reposaient, emmêlés, autour de son visage blême. De ce que pouvait en voir Parseiphanos, elle ne semblait ni malade ni blessée. Sa peau témoignait de la grande attention qu'on avait dû lui porter, preuve qu'il avait bien affaire à une femme privilégiée. L'examen dura à peu près deux heures, durant lesquelles Parseiphanos ne trouva rien de bien concluant. Avec l'aide du chirurgien embaumeur, il procéda à l'autopsie complète, qui ne révéla rien de plus. Phaerné était en pleine forme, si on omettait le fait qu'elle ne respirait plus. Avec un soupir, Parseiphanos s'assit au petit bureau pour prendre ses notes, pendant que l'embaumeur continuait son travail. Ce n'était pas étonnant qu'on l'ait mis sur l'affaire, puisqu'il ne faisait presque aucun doute que la magie avait été employée pour s'en prendre à la victime. Aucun glyphe n'avait été tracé sur la peau de la défunte, et si une potion n'était pas à exclure, Parseiphanos n'avait vu aucune trace d'un poison. — A-t-on encore ses effets personnels ? Tiré de sa concentration, le chirurgien mit un temps avant de hocher la tête. — Oui... Il faut voir avec le capitaine de la garde je crois. Remerciant son collègue, Parseiphanos se dépêcha de prendre quelques notes supplémentaires, de les faire sécher et d'emporter le tout vers le bureau du capitaine. Ce dernier lui indiqua un petit coffre où on avait rangé tout ce qui était sur la victime lorsqu'on l'avait trouvée : vêtements, bijoux, petit sac. Rien ne semblait porter de glyphes, mais ça n'excluait pas qu'on ait déposé une potion agissant au contact. Il lui fallait continuer à creuser.

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