Chapitre 3

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Sa chambre ne lui avait jamais paru aussi vaste. L'armoire semblait s'étendre jusqu'au plafond, qui lui même lui paraissait de plus en plus haut. Tout grandissait dans sa vision, sauf lui. Il se sentait minuscule, misérable. Il s'était senti si intelligent, si fière quand il avait cru comprendre ce que ressentait Sherlock, ses sentiments à son égard. Il avait bêtement cru que l'immense sentiment de culpabilité qui accablait l'autre venait d'un amour fort, un amour qu'il ressentait lui-même pour le brun.

Stupide !

Bien sûr que ses sentiments ne seraient pas réciproque. Si Sherlock l'avait un jour aimé de cette manière, la chute avait dû lui remettre les idées en place. À cause de William, il ne reverrait plus sa famille, ses amies. Il avait perdu sa carrière de détective. N'importe qui perdrait ses sentiments dans ces conditions. Mais son Sherly était trop gentil, comme toujours. Il voyait toujours du bon en lui et voulait l'aider, malgré son passé, malgré sa monstruosité.

Est-ce que... Je le mérite vraiment ?

Quelle question idiote. Il ne méritait rien de ce qui lui était offert. Il était juste un démon ayant échappé à l'enfer. Il n'avait plus aucune utilité dans ce monde. Il pensa soudainement à ces enfants qu'il avait vu aujourd'hui. Tous jeunes et pleins d'espoir, encore pures et ignorants de la dure réalité de la vie. Il aurait voulu pouvoir dire qu’il avait lui-même déjà été aussi innocent, malheureusement, il avait toujours été trop conscient des choses. Il avait grandit dans la rue, s’était éduqué lui-même. Son esprit curieux ne lui avait jamais permis cette vision idéalisée de la réalité. Ce travail qu’il avait trouvé était une aubaine. Il avait au moins l’impression de faire quelque chose de sa vie. Enseigner était vraiment amusant, bien que ce qui lui plaisait le plus était d’écouter les jeunes esprits de demain, comprendre comment ils fonctionnaient.

Cela avait toujours été quelque chose qu’il faisait inconsciemment. Analyser les gens autour de lui. Et jusqu’à aujourd’hui, il avait cru être imbattable à ce petit jeu. Mais voilà. Il s’était trompé, et il le regrettait. Il avait envie de pleurer.

Qu’est-ce que Sherlock penserait de moi s’il me voyait aussi misérable ?

Il ne pouvait pas laisser cela arriver. Doucement, il se leva et verrouilla la porte, la bloquant avec une chaise. Sherlock pouvait être très déterminé quand il le voulait, et lui avait besoin de rester seul. Il retourna au sol, ramenant ses jambes à sa poitrine. Son dos se courba naturellement alors qu’il regardait ses mains tâchées de rouge.

Pourquoi je me lamente ? Je mérite ça. Comment ai-je pu imaginer ne serait-ce qu’un instant que tout allait aller pour le mieux, que j’obtiendrais ce que je désirais ?

Il ferma les yeux. Derrière ses paupières closes, il voyait défiler les visages de ses victimes. Leurs corps, pourrissant dans des marres de sang, se rapprochant de lui les bras tendus, près à l’accueillir en enfer. Pour la première fois depuis la chute, il voulut les rejoindre. Ses sens s’engourdirent, il n’entendait plus que les battements de son cœur. Sa respiration devenait superficielle. Il sentait de la sueur couler dans son dos.

Monstre, Monstre, MONSTRE

Son cerveau lui criait qu’il était entrain de faire une crise de panique mais cette information ne lui était d’aucune utilité.

MONSTRE, MONSTRE, MONSTRE

Ses victimes, dans sa tête, lui répétaient ce mantra inlassablement. Il saisit un oreiller sur son lit et enfonça son visage dedans. Cela ne servait pas à l’aider à respirer mais à cacher son état à Sherlock. Si avant, penser au brun le réconfortait, maintenant, cela ne faisait que le faire se sentir plus misérable. Il entendit vaguement quelqu’un toquer à sa porte mais il ne parvint pas à émettre le moindre bruit en réponse. Pour dire quoi ? Il se le demandait. Tout avait été dit. Son pathétique petit cœur l’avait trahie.

Près de toi, le monde est coloréOù les histoires vivent. Découvrez maintenant