Prélude

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"La plupart des êtres humains hésiteraient à torturer ou tuer un être humain semblable à eux. Mais pourvu que cet être humain nous ait été présenté comme n'étant pas un être humain mais bien le représentant de quelque ignobles principes voilà que s'évanouissent nos scrupules."
- Aldous Huxley -










Que faire quand le paradis et l'enfer s'inversent? Que faire quand les lignes du bien et du mal se brouillent? Que faire quand la flamme de l'espoir se meut en incendie ardent? Que faire quand votre vie ne tient qu'à un fil et que vous n'en avez pas conscience? Que faire quand votre reflet est teinté de sang? Et que faire quand vos ennemis deviennent la clef de voûte de votre survie?










Un après-midi étouffant, canicule comme on n'en avait jamais vu. Au loin, au-delà de la frontière floue de l'horizon, les feuilles des arbres frémirent et les bêtes affolées bondirent en panique hors des fourrés. En vain. Le souffle ardent de l'explosion relâcha ses gaz mortels dans l'atmosphère déjà saturée de pollution, et la faune tomba, le voile opaque de la mort engloutissant les terres autrefois florissantes des environs. Mais ça,Julie ne le savait pas, du moins pas encore. Elle déambulaitw sans but, dans les méandres torturées des rues désertes d'un Paris délabré, la guerre faisait rage. La guerre, concept abstrait pour la jeune fille qui ne connaissait rien de la violence des combats et de la peur écrasante qui enserrait les soldats au front, comprimait leurs trachées comme autant de cordes tendues, prête à étouffer les dernières lueurs d'espoir brillant au fond de leurs yeux fatigués. Ça, Julie ne le savait pas car elle était une enfant, bientôt cependant, elle atteindrait la majorité et serait envoyée au front. Du moins c'est ce qu'elle pensait, car elle n'aurait pas cette chance, puisse l'ironie du sort l'appeler ainsi. Non, aujourd'hui, le souffle de l'explosion radioactive allait effacer à jamais sa présence et celle de millions d'autres de la Terre. Aujourd'hui, Julie n'irait pas en cours, aujourd'hui, la face du monde allait changer pour l'éternité.

Ce jour-là résonna le glas pour la surface de la Terre, le 13 Juillet 2028 sonna la fin de l'humanité telle que nous la connaissons...

100 ans plus tard:

Le souffle court et l'esprit vague, Ikahar courait depuis plusieurs heures. Grimaçant sous la douleur d'un point de côté, il fit une brève pause à l'orée d'un bois. Il n'arrivait pas à croire qu'il avait déserté. S' il rentrait, il serait condamné à mort pour trahison de toute manière, alors maintenant qu'il avait enfin regagné sa liberté, il n'allait pas s'en priver. Un léger bruissement dans les fourrés retentit et le garçon se redressa, muscles tendus, prêt à fuir ou attaquer. Il huma l'air, et un fumet reconnaissable entre mille traversa ses narines. Un Démon. Ses pupilles s'étrécirent et il scanna d'un œil habile l'environnement. Son corps entier tremblait d'hostilité, l'exaltation de la chasse, l'appétence du gain, toutes ces émotions bouillonnaient en lui comme un lion prêt à bondir sur sa proie. Une branche frémit et il s'élança, ou du moins, c'est ce qu'il s'apprêtait à faire quand il vit le visage du mutant. Un jeune adolescent d'un, peut-être deux ans de moins que lui, le regardait. Il semblait pétrifié par la peur, Ikahar était habitué à ce regard mais pourtant, dans les grands yeux bleus du mutant, il ne voyait se refléter que ses propres angoisses. A quoi bon le chasser? Il n'était plus un Séraphin, il avait refusé le salut à son peuple, chasser cet enfant ne servirait à rien qu'à engendrer plus de haine. Ils restèrent immobile pendant un moment qui sembla durer une éternité. C'est peut être ce qui se passa, l'éternité, l'éternité de cet instant, l'éternité de ce face a face, l'éternité d'une seconde. Le mutant était assez svelte, il arborait des vêtements larges et cachait son visage d'un masque en cuir. Le chasseur n'avait jamais été très observateur, se reposant plus sur son ouïe et son odorat, et pourtant cette fois-ci il fut frappé par l'évidence. Si ce démon semblait si familier, c'était car il n'était pas bien différent de lui. Son univers noir et blanc se teinta de gris et il se révéla au démon. Non, au garçon. Le regard de celui-ci passa de la peur à la confusion. Pas un mot ne fut prononcé, Ikahar déposa les armes, levant les bras en signe de soumission.

"Quel est ton nom?" murmura-t-il, déchirant le silence ambiant, demande implicite de trêve.

La nuit commençait à jeter son ombre aussi rassurante que menaçante sur la forêt et ses alentours. Il fallait se cacher, le mutant le savait, Ikahar le savait aussi.

"D'autres Anges ne sont pas loin, tenta-t-il encore, il faut se cacher, sinon tu vas te faire capturer."

En réalité, celui qui avait le plus peur de se faire attraper était Ikahar. Il avait peur du statut de proie qu'il occupait maintenant, ses sens exaltés cherchant à analyser chaque bruit des sous-bois. Après ce qui lui sembla une éternité, - mais encore une fois, qu'est ce que l'éternité? - le mutant fit signe à Ikahar de le suivre.

Ils marchèrent en silence sur quelques centaines de mètres et l'ancien Séraphin en profita pour étudier le garçon. Il était de petite taille, il ne lui donnait pas plus d'un mètre soixante, mais à en juger son âge, il grandirait encore. Il semblait avoir les cheveux bruns même si Ikahar avait du mal à distinguer les couleurs dans la pénombre environnante. Le mutant sentait le sable et les radiations, ce mutant vivait dans des Enfers, mauvais signe, à en juger la fraîcheur de l'odeur, la zone ne devait pas être loin. Ikahar secoua la tête, sa tignasse blond-roux tombant devant ses yeux, s'emmêlant dans le vent qui commençait à se lever.

Ils arrivèrent à une cavité creusée dans un retranchement de pierre dissimulée convenablement par des pierres et des buissons. La cavité était peu profonde, mais suffisamment spacieuse pour que deux hommes adultes puissent s'y cacher aisément. Le plus jeune entra en premie, toujours sans un mot, avec une aisance trahissant son habitude.

Ikahar aurait dû se méfier, il le savait, mais après tout, qu'est ce qu'un enfant pourrait faire contre lui? Et dans le pire des cas, qu'arriverait-il? Il mourrait, il le savait, mais toutes les autres options semblaient mener à la mort, alors quitte à choisir, autant se laisser guider par cet inconnu. Ce monde était tordu de toute manière, les anciens hommes étaient tordus, les nouveaux l'étaient tout autant, il l'était sans doute, cette chasse au mutant était tordue, ce secret était tordu, alors dans un monde tordu, agir comme tel n'était-il pas la meilleure manière de faire?

Il entra dans la grotte à la suite de l'inconnu. Celui-ci était déjà en train d'allumer un feu avec des branches sèches trouvées au sol. Ikahar sortit un briquet, la lueur de la flamme de celle-ci illuminant ses yeux ambrés de milles nuances enflammées. Il s'assit près des flammes crépitantes du feu de camp et observa le mutant. Il avait gardé sa capuche et son masque. Ikahar quant à lui commençait à manquer d'air dans sa combinaison de Séraphin. Le mutant le remarqua sans doute puisqu'il retira son masque et le lui tendit. Ikahar ne sut dire ce qui le frappa le plus à ce moment, le geste de bonté du garçon? La matière du masque qui semblait contenir une matière filtrante imperméable qu'il ne saurait pas identifier? Ou le bas du visage de l'adolescent qui était traversé par une vieille cicatrice partant du bas de son menton remontant jusqu'à sa joue, fendant ses lèvres? Ikahar se saisit du masque, le remerciant d'un signe de la tête, retirant le haut de sa combinaison pour passer le masque, heureusement que sa peau était résistante à la pollution radioactive. Le masque était léger sur son visage et semblait filtrer l'air convenablement. Ils restèrent ainsi quelques minutes, le silence dérangeant, hérissant les poils du jeune homme.

"Comment t'appelles tu?" Demanda-t-il de nouveau, espérant briser la gêne ambiante. Peut-être le mutant n'avait-il pas de nom ou peut être ne comprenait-il pas la question tout simplement se dit-il. Mais à sa grande surprise, il ouvrit la bouche.

"Nox." Répondit-il simplement, d'une voix qui n'avait pas encore totalement muée.

Il portait le nom de la nuit, et Ikahar en était sûr maintenant, il n'avait rien d'un démon.




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Okeyyyy! est ce que ce serait pas le prologue? et si mes amis! La suite viendra plus tard, je ne sais pas quand mais bon, restez a l'affut, ceci n'est qu'un avant gout de l'histoire à venir...

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⏰ Dernière mise à jour : Aug 03 ⏰

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