Voyage, voyage.

Chapitre 1: Le sud de la France, quelle chance!

Il est minuit sept. Je décide enfin de lâcher mon téléphone après avoir perdu une heure de ma vie sur ce stupide réseau social, naviguant de vidéo en vidéo,  certaines expliquant comment guérir son enfant intérieur, d'autres montrant des vieilles dames effectuant des tirages de tarot, révélant qu'il reviendra puisqu'il est ma flamme jumelle. Stupides vidéos.
Une fois mon écran verrouillé, ma chambre est plongée dans le noir, seulement éclairée par la lumière de mon clavier "gaming" d'ordinateur. Dans la semi-pénombre, je distingue clairement la silhouette de Mathieu, son corps fin et en même temps dessiné.  
Mathieu est un militaire que j'ai rencontré sur une application de rencontre il y a presque un an. Lui et moi avions déjà couché ensemble à ce moment là, mais ce fut une catastrophe. Je n'irais pas jusqu'à dire que c'était le pire coup de ma vie, mais l'atmosphère était pesante et la gêne était présente dès lors que le soleil s'était levé. "Que fait-il alors dans son lit?" me dirait-on. Je ne saurais répondre. La seule chose que je peux affirmer, c'est qu'à cet instant précis, j'aurais aimé que cette silhouette dont je distingue clairement les traits soit celle d'Alex.

Enfant, j'ai toujours cru qu'à vingt-trois ans je serais mariée, que j'aurais des enfants et que je vivrais une vie de rêve. Je remercie infiniment monsieur Walt Disney ainsi que chaque auteur et chaque réalisateur de films romantiques de m'avoir fait croire que la vraie vie se déroulait ainsi. C'est vrai, ma vie est loin de ressembler à celle d'un film Disney. Je vis actuellement dans un trente-quatre mètres carré à moitié vide, dont seules les piles de cartons empêchent l'écho de résonner dans tout l'appartement. J'enchaîne échecs amoureux et relations charnelles sans intérêt, avec des types qui ne valent pas mieux les uns que les autres. Amicalement parlant, je me considère quand même chanceuse. Je suis entourée de personnes formidables (à quelques exceptions près) qui m'aident à me sentir vivante quand seule, je n'y parviens pas. J'ai également une famille aimante sur qui je peux compter. Je me demande si ce sera toujours le cas, à Nice. Je viens à peine d'obtenir mon diplôme que l'on me contraint à aller à l'autre bout de la France pour y débuter ma carrière. 

"Le sud de la France, quelle chance! Tu verras, tu ne voudras plus jamais revenir!"

Je ne peux plus me l'entendre, cette phrase.