Journal intime d'une hypersensible

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« Aujourd'hui, cela s'annonce difficile. Et on n'en parle pas assez de ce fameux post-partum. On ne vous en parle pas assez, de l'état psychologique auquel une femme est confronté lorsqu'elle devient maman.
Ce 26 mai 2023, cela ne va pas. Car ce 26 mai 2023, je réalise enfin que ma fille a plus de trois mois. Je me revois pourtant, encore courir a la maternité. Gésir de douleur suite aux contractions. Supplier que celles-ci s'arrêtent. Supplier la péridurale. Attendre l'administration de celle-ci. Être alors soulagée. Attendre le fameux moment de la poussée. Voir le temps mis sur pause tant l'envie de rencontrer mon bébé prend le dessus. Finalement, vivre ce fameux moment de ma rencontre avec ma fille. Sangloter de bonheur intense.
Profiter de ces premiers instants à trois dans cet endroit qui est nulle autre que la maternité. Savourer chaque seconde. Chaque minute. Chaque heure. A trois, dans cette bulle qui, nous le savons, ne sera que temporaire.
Personnellement, j'ai adoré ce séjour à la maternité. Je m'y suis sentie si bien chouchoutée. Une véritable bulle se crée autour de nous et on se sent alors, comme au centre de l'attention.
Pendant les trois premiers jours de vie de ma fille, je me suis sentie soutenue, épaulée, guidée, soignée et surtout jamais jugée. Cet a cet hôpital Chirec Delta, que je dois mon sentiment de pur bien-être.
On ne nous prépare pas assez aux différentes émotions qui vont nous traverser l'esprit dès l'instant même où l'on accouche. Je me souviens encore remercier Dieu, pleine de larmes, lorsque l'on m'a déposé ma fille dans les bras. Je me revois passer des nuits blanches remplies d'adrénaline et d'inquiétude à l'idée, qu'a présent, ça y est, je suis mère. Mère de ce petit être qui ne demande qu'à être aimé. Moi, je suis, à présent, sa mère et me dois d'en assurer son bien être, sa sécurité,
Nous préparons-nous seulement à tout cela ? A un tel chamboulement ? A tous ces engagements dont, en une fois, on devient propriétaire.
Joie, bonheur intense, tristesse, inquiétude, angoisse, nudité. Oui, je me suis sentie nue, vulnérable face à tant de nouveautés. Face à tant de responsabilités.
Le19 février 2023, ma fille, je t'ai mise au monde et on ne m'y a pas préparé.
Mais aujourd'hui, j'ai compris. J'ai compris que le principal se fait naturellement. Mon amour pour toi a été immédiat. Mes premiers gestes envers toi se sont montrés innés. Alors oui, qu'est-ce que j'ai pleuré. Oh mon dieu, si seulement, tu pouvais comprendre le sentiment de gratitude que j'ai ressenti au moment même de tes premiers jours de vie.
Ce séjour à la maternité, je l'ai tant aimé. Je l'aime et l'aimerais toute ma vie. Il m'a permis de me sentir en sécurité. Ton père et moi n'étions alors pas seuls dans ce nouveau départ qu'est la parentalité. De nombreuses fois, je les ai appelé les sage-femmes. De nombreuses fois, je me suis sentie démunie. Ce serait mentir de dire qu'on devient maman parfaite dès la seconde même où l'on doit effectuer les premiers gestes envers son bébé.
Au début, on cherche, on se regarde et se questionne sur ce qu'on doit faire. Sur ce dont tu as besoin. Tu pleures. Tu as faim ? Tu es fatiguée ? Tu as mal au ventre ? Ou peut-être bien que tu commences quelques coliques ? Prends-tu correctement le sein ? Te nourris-tu assez ? On panique et en même temps cela se met petit a petit, naturellement,  en place.
J'ai tant aimé ces nuits à la maternité durant lesquelles nous étions qu'à nous trois et durant lesquelles je pleurais en priant Dieu. En le remerciant d'avoir eu la chance de devenir mère. D'avoir pu porter mon enfant et le mettre au monde. C'est un état de pure gratitude qui m'a accompagné durant tout ce séjour et qui m'entoure encore a l'heure actuelle.
Le 24 février 2023, nous étions de retour à la maison. C'est l'excitation de rentrer chez soi et de vivre nos premiers moments à trois chez nous.
Puis durant un mois, c'est le bonheur intense. La vraie vie de famille définit par les couchers et réveils ensemble. Les câlins compulsifs durant lesquels ton père et moi te mangeons d'amour. Tu t'avères être bébé sage, calme, plein de douceur et déjà en demande permanente d'amour. Tu adores dormir sur ma poitrine et rester de longues heures couchée sur le torse de papa. Tu fais déjà tes siestes et tes nuits dans ton lit. Tu te sens bien à la maison entourée de tout ce qu'on a à t'offrir et c'est tout ce qui nous importe.
Des fois, il nous arrive tout de même d'être dépassés. Lorsque tu pleures de décharge le soir. On se sent alors impuissants face à ces pleurs si puissants. Les premières vraies larmes coulent sur tes joues et c'est mon petit cœur de jeune maman qui prend un coup. Alors je pleure avec toi. Tu es dans mes bras, nous pleurons toutes les deux et ton père nous câline, nous encercle de ses bras si forts, si réconfortants. La fatigue, l'excitation, l'état de bonheur intense et de découverte. Durant ce premier mois en tant que famille, nous sommes comme coupés du monde et rien d'autre ne compte, alors, plus à nos yeux que notre bien-être.
Les secondes, minutes, heures défilent et, très vite, tu grandis mais je ne le vois pas. Je ne veux pas le voir. Car on ne m'a pas prévenu mais un corps en post-accouchement met du temps à récupérer.
Je récupère. Me soigne. Me repose. Je pense à ma santé psychologique/physique et, également, à mon rôle de maman que je me dois d'accomplir. Je suis comme dans un état de survie partagé entre le désir de profiter de mon bébé et le besoin de récupérer au mieux de cet acte barbare auquel je viens de faire face. Car oui accoucher est un acte barbare mais le mot barbare doit-il obligatoirement se montrer péjoratif ? La barbarie définit la cruauté, l'inhumain et la douleur ressentie lors de l'accouchement s'avère inhumaine, insupportable. Accoucher, d'ailleurs est l'acte même de sortir l'enfant du corps de sa mère. Accoucher est donc barbare. Un accouchement fait preuve de barbarie mais d'une belle et délicieuse barbarie. Notre corps est si bien fait qu'il est capable de s'ouvrir, de se déchirer afin de laisser passer un petit être qui, une fois dans les bras de sa mère, fera en sorte que celle-ci ait l'ultime conviction de vivre le plus beau jour de sa vie.
En effet, le 19 Février 2023 fut le plus beau jour de ma vie et pourtant j'ai tant souffert. On n'est, d'ailleurs, pas préparée à une telle douleur car on ne sait préparer une femme à vivre une telle souffrance.
Mais le corps est bien fait, car nous parvenons à supporter cette douleur. Nous souffrons à l'agonie, éjectons ce petit être de notre corps puis parvenons, tout de même, à l'embrasser d'amour et de reconnaissance pure. Car une fois notre bébé sur nous, le bonheur d'avoir notre bébé avec nous prend le dessus sur tout autre sentiment.
Tout cela pour dire, qu'en ce 26 mai 2023, ma fille a plus de trois mois et que, de mon côté, je me sens seulement maintenant, totalement et entièrement guérie de mes séquelles physiques et psychologiques. Car oui, la liste est longue. Entre la culotte filet avec les alèses que l'on remplit toutes les heures d'immenses quantités de sang, la sensation de ne plus savoir se retenir, d'avoir saccager notre périnée, l'incapacité à aller a selle, l'immense fatigue et le sentiment d'être à bout de force, oui, il y en a des bobos.
Mais on n'en fait pas étalage car comme l'a si bien dit ma sage-femme : si on devait vous mettre en garde sur ce qu'engendre un accouchement, sur le fait même de devenir mère, personne ne ferait d'enfants. Il faut savoir que chaque accouchement représente un risque. Ce n'est pas un acte anodin. N'importe quelle femme peut perdre la vie en accouchant mais lorsque vous passez le permis et que vous roulez pour la première fois sur l'autoroute, vous savez pertinemment les risques que vous prenez, est-ce pour autant que vous vous avisez de passer le permis ?
A l'instant même où on tombe enceinte, on prend un risque. De connaître toute forme de complication, telle qu'elle soit : Fausse couche, épisiotomie, césarienne d'urgence, hémorragie et j'en passe.
Le 19 février 2023, je suis restée pas loin de deux heures entre les mains de ma gynécologue et d'un chirurgien qui tentaient bien de mal d'arrêter des saignements anormaux. Je m'y suis vue partir et y laisser mon mari et ma fille mais malgré cela, je continuerai de dire chaque jour, que la naissance de ma fille fut le plus beau jour de ma vie.
Car aujourd'hui, énormément de larme j'ai versées, de joie comme de tristesse. D'envie d'avancer et de voir ma fille grandir comme de nostalgie. Aujourd'hui, plus de trois mois post-accouchement, je vais mieux mais il s'agit bien là, d'un combat de tous les jours.
Il m'arrive encore de ne pas réussir à me retenir suite à un fou rire que je ne parviens pas à maîtriser. Il m'arrive encore de mourir de fatigue à l'idée daller à mes séances de kiné et de pleurer lorsque je me sens impuissante face aux pleurs de ma fille.
Mais il m'arrive surtout et essentiellement, de continuer de prier Dieu pour lui faire part, sans cesse, de mon sentiment de gratitude envers la vie. De manger ma fille tout crue de bisous lorsque je me réveille à ses cotes. De savourer chaque instant, chaque journée passées à trois lorsque mon homme est à la maison. Vous savez ces petits bonheurs simples de la vie du quotidien qui fait que celle-ci est embellie et en même temps remplie de nostalgie.
Aujourd'hui, en ce 26 mai 2023, mon but n'est pas de vous faire peur mais bien de témoigner et de vous permettre de me lire pour, qu'ainsi, le jour où vous serez en train de vivre votre propre post-partum, vous sachiez que non vous n'êtes pas seule. »

Mon recueil à écriture ✍🏼 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant