Liam et les Métamorphoses chimériques

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Cela va faire deux mois que Liam a changé d'établissement, deux mois qu'il est dans cette classe. Deux mois qu'il survit parmi les moqueries blessantes, les insultes, les vols, les bousculades, les coups... Deux mois qu'il se fait persécuter et qu'il subit en silence. Il a trouvé une cachette où il se réfugie lorsqu'il sent qu'il n'y arrive plus : le renfoncement dissimulé derrière un buisson, de l'autre côté du stade ; il y a un chat qui passe régulièrement et qui lui tient compagnie. Parfois, il rêve qu'il devient ce chat, qu'il fait la course avec d'autres félins, qu'il grimpe aux arbres... toutes ces choses qu'il aimait faire, avant.

Il est en cours de sport actuellement, et préférerait rejoindre son petit coin tranquille pour jouer avec Gribouille - le nom qu'il a donné au chat - plutôt que de regarder ses camarades courir, assis sur un banc. Avec son unique jambe et ses béquilles, il a dû arrêter le sport ; tout ce qu'il peut faire désormais, c'est jouer les chronomètres avec un sifflet.

Victor lui passe devant et fait un écart pour shooter dans son sac. Il en a marre. Il en a eu des harceleurs - c'est d'ailleurs à cause d'eux que son père l'a fait changer d'établissement une fois de plus - mais Victor est le pire de tous ; avec sa petite bande, ils ont fait de sa vie un véritable cauchemar, et Liam ne veut pas en parler à son père. Il en a juste marre de bouger, de lutter. De temps en temps, il s'imagine s'allonger dans l'herbe et s'endormir pour ne jamais se réveiller...

Victor repart, fier de sa bêtise. Liam a de la chance, il est de bonne humeur aujourd'hui : la plupart du temps il est tout simplement cruel, mais parfois il est un peu plus magnanime.

Liam se lève pour aller ramasser son sac et sautille pour ne pas perdre l'équilibre. Il attrape une lanière de son sac à dos, et tombe sur un lézard. Le pauvre s'est fait assommer à cause de Victor. Il repose son sac et prend délicatement le lézard dans sa paume ; il bouge encore ! En un instant, le petit reptile lui file entre les doigts, se faufile sur le sol et disparaît dans l'herbe.

Liam sourit nostalgiquement. Comme avec Gribouille, le poisson dans la salle de science ou le papillon de la semaine précédente, il sait qu'il rêvera du lézard cette nuit. Il sait qu'il redeviendra libre pour quelques heures..!

Il ouvre les yeux.

Le monde est coloré, immense et magnifique ! Est-ce réellement le monde qu'il connaît ? Tout est à la fois si familier et singulier...

Il voit un lézard, un lézard géant ; son corps écailleux d'apparence brun terne brille de mille feux, de toutes les nuances de brun imaginable en passant par l'ocre et le vert forêt. Le lézard s'enfuit entre les brins d'herbes trois fois plus grands que lui, et il le suit.

Liam est devenu lézard pour la nuit.

Il glisse sur le sol de ses quatre pattes et prend de la vitesse. Ici il est libre, libre d'aller où il le souhaite, sous l'apparence qu'il souhaite ! Ses rêves lui permettent de se souvenir de ce qu'était la vie et d'y reprendre goût. Si seulement il pouvait ne jamais se réveiller...!

Il rattrape Lézard et commence une danse endiablée. Tous deux sortent de la verdure et continuent leur jeu. Le sol tremble mais il n'a pas peur, il se croit invulnérable malgré les secousses, tout puissant à son échelle, protégé par une force supérieure.

Tout à coup, Liam entend Lézard lui intimer de vite traverser la plaine de roche. Un prédateur arrive !

Liam reconnaît un de ses camarades qui galope, un de ceux qui se contente de le fixer étrangement sans oser tenir tête à ses harceleurs. Une bête lui court après comme s'il était sa proie mais se contente de le dépasser. Sa proie, c'est l'insecte unijambiste assis sur le banc.

Liam sait ce qu'il va se passer et se précipite pour sauver Lézard. Hélas, il n'est pas assez rapide et voit le sac tracer une courbe parfaite dans les airs après la ruade de la bête. Lézard n'a plus le temps de bouger quand il voit l'ombre du sac le recouvrir et il se fait écraser...

Si vous êtes victimes de harcèlement, sachez que vous n'êtes pas seuls et qu'il existe des solutions. Ne laissez pas vos harceleurs vous réduire au silence, osez en parler, il y aura toujours quelqu'un pour vous écouter et vous aider : votre famille, vos amis, un adulte... ou des numéros comme le 3020.

Si vous êtes témoin de harcèlement, n'attendez pas l'irréparable pour réagir. Gardez le silence ou ignorer la situation fait de vous des complices, alors agissez.

LE HARCÈLEMENT, POUR L'ARRÊTER, IL FAUT EN PARLER.