On était innocents, insouciants du monde qui nous entourait et des moments qu'il nous ferait subir en grandissant.
Mais ces moments, bons ou mauvais, je sais que je veux les passer avec toi.
Marie Vega x Mathieu Pruski
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Juin 2004.
J'regarde les aiguilles de l'horloge bouger chaque seconde avec grande impatience. Marie m'a promit de m'passer un bout de son cake à la récré' de dix heures, et j'ai super faim depuis qu'j'ai quitté la cité. Y'avait plus de céréales ni de pain dans les placards de la cuisine, j'ai dû manger une Pom'pot dans l'bus. Je voulais partager avec maman, parc'qu'elle aussi n'a rien mangé avant de partir au travail, mais elle m'a forcé à tout finir. Elle m'a dit qu'elle n'avait pas faim de toute manière.
Maman dit que c'est la fin du mois, donc faut essayer d'moins acheter de choses pour qu'on puisse encore habiter ensemble. Elle est triste en c'moment, ça se voit, même si elle danse toujours sur la musique qu'la radio passe tous les matins. La musique c'est vraiment ce qui l'a fait sourire j'ai l'impression, j'espère que j'pourrais la faire sourire quand je serai grand et qu'on mangera tout le pain et toutes les céréales qu'on voudra avec l'argent que j'ramènerai pour ma famille.
- Mathieu, tu arrêtes de rêvasser ou tu préfères que je t'envoie à la sieste avec les maternelles ?
J'lève les yeux au ciel en entendant l'horrible voix de la maîtresse, qu'est ce qu'elle est pelante celle-là ! Ibrahim ricane en me tirant la langue, il va plus trop rigoler quand j'vais le courser avec un bâton dans toute la cour.
Mon ventre gargouille, ohlala, quand j'pense à ce bout de gâteau j'en salive d'avance. Mon amie et moi devons encore se r'joindre sur le petit toit sans que les surveillants ne nous crament, parce qu'ils sont trop nuls. Marie c'est ma meilleure pote depuis la rentrée, on n'est pas dans la même classe mais on trouve toujours un moment dans la récré' pour s'voir ou juste jouer à chat avec les autres. Elle est très très timide avec sa classe et la mienne, avec tout le monde en fait, sauf avec moi.
Elle rigole, me fait des vannes, dit ce qu'elle pense et on parle beaucoup de dessins animés quand on est ensemble. Et elle est mignonne.
Dès que j'entends la sonnerie, je m'empresse d'chercher ma veste sur le porte manteau à mon nom et de l'enfiler pour monter les escaliers sans qu'personne ne me voit, comme les ninjas à la télé'. Hier j'ai eu foot alors mes tibias me font mal quand j'cours vite, mais je compte quand même courir derrière Ibrahim pour lui faire peur.
Une fois assis, j'attends pendant une bonne dizaine de minutes en espérant voir mon amie venir par le chemin que j'viens même d'emprunter. J'commence à avoir froid là-haut, mais quand j'me lève pour partir me réchauffer dans la salle d'à côté, j'vois Marie débouler avec les joues et les yeux rouges.
-Bah y'a quoi ? T'as pleuré ?
- Hugo a prit mon goûter, il m'a poussé fort au sol et je me suis fait mal au genou...
Quel idiot ce Hugo ! En plus d'être gros comme un lard d'campagne, il a encore fait pleurer Marie et il prend son cake, notre cake j'devrais dire ! Je serre les poings et dévale les escaliers pour aller l'taper dans la cour, sans trop réfléchir à c'qu'il pourrait m'arriver si quelqu'un de plus grand nous voyait.
