Chapitre : 2

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ARES

Après avoir fermé la porte, Armando se place devant moi, tremblant de peur.

— Vous souhaitiez me voir ?

— Oui, pour te parler de ta serveuse. J'ai appris qu'elle travaillait également au Baron...

— Holly est une brave fille, vous savez. Elle fait cela pour aider sa mère qui est très malade. Je sais que j'aurais dû la renvoyer lorsque j'ai découvert pour le club, mais... je n'ai pas pu m'y résoudre.

Je lui adresse un sourire pour essayer de le détendre. Il me le rend de manière forcée, démontrant qu'il n'est absolument pas à son aise.

— Ça fait longtemps qu'elle travaille pour toi ?

— Environ un an.

— Armando, tu es quelqu'un de bien et je dois dire que tout ceci m'intrigue. C'est une magnifique jeune femme... Quel dommage qu'elle doive s'adonner à de telles pratiques !

— Holly est une jeune femme exceptionnelle. Je vous en prie, ne me demandez pas de la licencier. Elle a besoin d'argent pour vivre et payer les soins de sa mère, elle n'a plus qu'elle.

Je l'arrête en levant la main pour le faire taire.

— Je ne t'obligerai pas à la renvoyer, c'est ton restaurant. Tu sembles beaucoup l'apprécier, dis-moi...

— Oui, je la considère un peu comme ma fille. Elle a un grand cœur, vous savez. Elle s'oublie très souvent pour s'occuper de sa mère.

— Tu sais si elle travaille ce soir ?

— Au club, vous voulez dire ? s'étonne-t-il.

Je lui fais juste un signe de tête pour acquiescer.

— Elle y travaille tous les soirs sauf le lundi.

— C'est parfait. Merci pour le dîner, c'était délicieux, comme toujours.

Je me lève en lui adressant un sourire. Il semble enfin se détendre. Après avoir réglé l'addition, je me rends à ma voiture et demande à mon chauffeur de me conduire au Baron, curieux d'en savoir davantage sur cette jeune femme. Elle m'intrigue.

Je n'ai pas pour habitude de fréquenter des boîtes de strip-tease. Si mon père me voyait, il serait probablement furieux. À ses yeux, ce genre de filles n'a rien à voir avec nous, avec notre clan, avec notre monde... Pourtant, sans que je puisse l'expliquer, je veux en savoir plus sur elle, et je compte bien assouvir ma curiosité ce soir.

À l'intérieur du club, une ambiance feutrée et des lumières tamisées rendent l'endroit mystérieux. Le décor, plutôt classique, se décline en rouge et noir, accentuant l'atmosphère sensuelle du lieu. La musique est assourdissante, l'odeur de sueur et d'alcool envahit rapidement mes narines. La chaleur est étouffante. Accompagné de mes deux hommes de main, je scrute les différents podiums à la recherche de la jeune femme de tout à l'heure. Après quelques instants, je la repère sur la scène principale. Elle porte un ensemble en dentelle carmin qui, je dois l'admettre, lui va à ravir.

Plusieurs types l'entourent et lui lancent des billets tout en sifflant. Je me demande comment elle a pu en arriver là, mais je me dis qu'il y a des situations bien pires. Elle pourrait vendre son corps dans la rue pour quelques dollars.

Après l'avoir observée pendant quelques minutes, je me dirige vers le bar, faisant signe au serveur.

— Vous désirez quelque chose ?

— La blonde, Shirley. Si je la veux dans un salon privé à qui dois-je m'adresser ?

— Vous, vous êtes nouveau, répond-il en souriant. À Peter, là-bas.

D'un mouvement du menton, il m'indique un homme assis au bout du bar, probablement le gérant. Je me presse d'aller le voir, lui demandant la jeune femme, mais sur le moment, j'essuie un refus.

— Non, désolé. Shirley est prise ce soir. Elle a un client régulier qui vient uniquement pour elle. Mais je peux vous trouver une autre fille qui sera tout aussi charmante.

— Non, c'est elle que je veux, pas une autre. Combien ? imposé-je, bien décidé à l'avoir tout de suite.

— Il allonge trois cents billets pour la demi-heure. Si elle vous intéresse tant que ça, il va falloir proposer plus.

— Je suis prêt à verser deux mille dollars et je la veux pour l'heure.

L'homme face à moi me regarde avec de grands yeux ronds, pas certain d'avoir très bien entendu. Après quelques secondes, son visage s'illumine.

— D'accord, marché conclu ! Il faut payer d'avance.

Je sors une liasse de billets de mon portefeuille et les lui tends. Il les prend et les compte avant de lever les prunelles vers moi, affichant un air satisfait.

— C'est un plaisir de traiter avec vous. Je suis persuadé que notre petite Shirley ne va pas vous décevoir. Je vous l'emmène dès que son tour sur scène est terminé.

— Non, je la veux tout de suite. Je ne suis pas un homme très patient, et je viens de vous donner une grosse somme d'argent pour cette fille, alors vous allez me la chercher immédiatement, et je voudrais que l'on nous apporte également une bouteille de champagne, aux frais de la maison bien sûr.

Il lève les bras en signe de capitulation, un large sourire sur les lèvres.

— Je vais vous la chercher. Ben ! intime-t-il au barman. Apporte notre meilleur champagne à monsieur.

L'employé acquiesce et s'en va en réserve. Une serveuse s'approche, me demandant de la suivre jusqu'au box privé. Je fais signe à mes hommes de m'attendre ici et la suis à travers un couloir, dont les murs sont tapissés de moquette rouge. Elle ouvre une porte donnant sur une petite pièce et m'avertit que Shirley sera bientôt là, avant de s'éclipser. Le barman fait une brève apparition pour m'apporter le champagne et deux verres, qu'il pose sur un mini bar de couleur noir. Je profite de ce moment pour retirer ma veste. Je la dépose sur l'un des deux fauteuils, en examinant la pièce. Au milieu de celle-ci trône un grand canapé en velours carmin. Il est facile de comprendre que cet établissement ne se limite pas uniquement à des prestations de danse. Ce qui suscite ma curiosité quant aux services que propose Holly. Si elle couche pour de l'argent, ce n'est peut-être pas une bonne idée d'être venu et de vouloir savoir ce que cette jeune femme a de si spécial.

Il est fort possible qu'elle cherche à me soutirer un maximum de fric, après tout c'est bien pour cette raison qu'elle danse. Cependant, si Armando l'emploie, c'est qu'elle en vaut la peine et qu'elle est respectable, il n'embaucherait pas une prostituée. Nous sommes la Mano Nera, nous faisons toujours très attention aux gens que nous recrutons. Ils ne doivent pas attirer la curiosité de la police. Le restaurant d'Armando ne fait pas exception, lui aussi doit se plier à nos règles, même si cela a été contre sa volonté à une époque.

Je soupire en m'installant sur le canapé et jette un rapide coup d'œil à ma montre. Le temps commence à se faire long, et je m'impatiente. Qu'est-ce qui peut bien prendre autant de temps pour la faire descendre de scène ? Ça ne doit pas être si compliqué de lui demander d'arrêter de danser. Je saisis mon téléphone et appelle un de mes hommes pour savoir où elle est. J'ai payé pour une heure, et je refuse de la gâcher à attendre. Dans mon monde, le temps, c'est de l'argent. Il me confirme qu'elle ne devrait pas tarder à arriver. Alors, je prends sur moi.

Comme se plaisait à me dire ma mère : patienter n'est pas une mauvaise chose. Elle voulait que je sois heureux, que je sois amoureux, mais j'ai renoncé à tout ça lorsque mon père est mort et que j'ai dû le remplacer à la tête de notre clan...

Holly (Tome 1) [Sous contrat d'édition chez Glamencia Éditions]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant