J'entrai dans ma taverne préférée en poussant la vieille porte rouillée. L'endroit était sombre, enfumé, rempli de types louches aimait plus leur bouteille de whisky que leur propre femme. Mais bon, c'était mon repaire, là où je pouvais obtenir toutes les infos en temps réel sur ce qui se passait dans le royaume des démons. C'était comme mon deuxième chez moi, tout le monde se connaissait à peu près et personne ne posait de question personnelle. Repère de brigands, d'assassins, de voleurs, de trafiquants, en somme que du beau monde. Je me sentais à l'aise ici, je pouvais prétendre être personne et personne n'allait me poser de questions indiscrète.
"Ana, ma belle, un shot pour te requinquer ?" me lança Tyria. Elle était la patronne de la taverne, une vraie mère poule avec un caractère en acier trempé. Ses cheveux et sa coupe changeait de couleur à chaque fois que je la voyais. Elle les avait aujourd'hui teints en violet clair, de la même couleur que ses yeux. En dehors d'être une tavernière elle était également une potionniste reconnue.
"Ouais, Tyria, t'assures comme toujours. Reste dans le coin, je dois te parler. J'ai besoin d'infos sur notre cher Gouverneur."
Tyria était au courant que je baignai dans des affaires louches, mais je n'avais jamais vraiment révélé tous les détails de mes activités et gardait une part de mystère comme tout les personnes ici présente.
"Chérie, t'es vraiment en train de chercher constamment les problèmes", me dit Tyria d'un air faussement exaspéré. "Mais bon, vu que t'es ma protégée préférée, je vais te dire ce que tu veux savoir. Et n'oublie pas les règles de la maison : Ce qui a dit ici, reste ici et..."
" Et les visages n'ont pas de nom, je sais, je sais. Jamais je ne te balancerai Tyria, tu le sais." A part si elle me trahie, évidemment. Ne jamais faire confiance à personne et encore moins à ceux que l'on croit connaître, règle indispensable pour survivre dans notre monde.
Elle me balança les infos de base que je connaissais déjà : famille, adresse, boulot, tout ça. Mais moi, ce que je voulais, c'était du précis.
"Tu vois le cyclope là-bas ? C'était le garde du corps de Tarian, avant.", me dit Tyria tout en pointant du doigt un cyclope avachi sur sa table avec de nombreuses bouteilles d'alcool vides.
"Merci Tyria. Ramène deux bières, on va papoter lui et moi."
Je me dirigeai d'un pas déterminé vers le cyclope.
"Eh ben, aujourd'hui, c'est vraiment mon jour de chance, une bonne jolie femelle comme toi qui vient directement à moi" lâcha-t-il avec un rire gras. Il m'observa de haut en bas et perdit son sourire, voyant ma tenue d'assassin. Il recula légèrement sa chaise de moi et dit en soupirant "Écoute, je cherche pas les problèmes, je suis à la retraite. Et toi, ma p'tite, tu sens les emmerdes à des kilomètres. Alors, je m'en fous de qui t'es et de ce que tu veux, dégage."
Bon, ça allait pas être aussi facile que prévu, visiblement. Alors j'ai sorti ma botte secrète : la politesse.
"Salut, mon pote. On se pose autour d'une pinte ? J'ai besoin de tout savoir sur le Gouverneur Tarian. J'ai comme l'impression que tu le connais plutôt bien, non ?"
"Je vais pas me répéter, casses-toi de là, sinon c'est moi qui vais te faire décoller d'ici à grands coups de poing."
"Franchement, t'as pas l'air d'être dans ton assiette, mon vieux" dis-je en ignorant ses menaces. "T'as besoin de thunes, d'une baraque, de bouffe ?"
"Dernier avertissement, CASSES-TOI !" hurla-t-il en fracassant son poing sur la table. "T'peux rien faire pour moi, tu piges ?!"
Soudain une de ses pensées surgit dans mon esprit, si fort que j'eus un mal de tête intense comme si on me plantait des milliers d'aiguilles dans le crâne.
"Crois-moi, cyclope, j'ai les moyens de faire sortir ta fille de taule," lâchai-je brusquement.
"Comment tu sais ça ?" bredouilla-t-il.
"J'ai de maigres pouvoirs de l'esprit, enfin, rien de bien incroyable, mais quand quelqu'un pense bien fort, je peux capter des bribes de ses pensées."
Je passais sous silence mes autres capacités, dire à un inconnu que je n'étais pas une simple démone inférieure sans pouvoir était bien assez dangereux. Règle numéro deux pour survivre dans le monde démoniaque : ne jamais parler de ses pouvoirs. Plus ils en savent sur toi, mieux ils peuvent exploiter tes faiblesses.
"Et comment j'sais si tu ne me tourne pas en bourrique juste pour avoir tes informations ?", me dit-il d'un air méfiant.
"Tu ne peux pas le savoir. Mais sache que si un enfant est en jeu, je ferais tout mon possible pour l'aider." Le cyclope avait raison de se méfier, étant donné la viciosité des démons. Mais vu son air désespéré, il allait sûrement craquer et briser la règle numéro une, à propos de ne jamais faire confiance a personne.
"Bah, bon sang, qu'est-ce que tu veux savoir ?"
Je réprimai un sourire triomphant.
"Tout sur Tarian. Ce qu'il fait, son emploi du temps, combien de gobelins il a autour de lui, le plan de sa baraque. Absolument, tout ce que tu sais."
"Bon, ok. Mais ça va prendre du temps, hein."
"J'ai tout mon temps, cyclope."
Et il se mit à me balancer toutes les infos qu'il avait sur Lord Tarian, avec un niveau de détail qui m'a foutu sur le cul.
"Allez, maintenant, raconte-moi tout sur ta fille, pourquoi elle s'est retrouvée en tôle."
"C'est de ma faute, tout est de ma faute" me confia le cyclope d'un air abattu. "J'ai chouravé une pâtisserie à Lord Tarian pour l'offrir à ma fille, et le salaud m'a puni. Il l'a jetée en taule, en disant qu'il la laisserait sortir quand il en aurait envie. Ça fait quatre mois qu'elle est en enfer. Quatre moi qu'il la torturent. Ils m'envoient ses orteils, ses doigts, ses oreilles. Putain, je m'en veux tous les jours. J'ai peur. J'ai peur pour elle. Sa mère est morte et elle a plus que moi. Et j'ai pas réussi à la protéger. "
Je savais que Tarian était un enfoiré sans honneur, mais je pensais pas qu'il irait jusqu'à punir une gamine innocente et la torturer. Les prisons démoniaque étaient les pires de tout les Royaumes et je n'osais même pas imaginer qu'est ce qu'elle a du subir la bas. Elle a du se faire violer par tout les gardes de la prison ayant le malheur d'être une femme. Je serrai les dents. Mon masque d'assassin commençait à se fissurer et le cyclope avait fait resurgir des émotions que j'avais pourtant enterré et enfermée à double tour.
"Je vais m'occuper de Tarian et de ta fille. Mais pour Tarian, ça va faire mal, très mal." Mon boulot à la base c'est juste de tuer Tarian. Mais bon, je peux m'autoriser une petite séance de torture. Qui sait, peut être mon client va augmenter ma prime.
"Tu n'imagines même pas le nombre de fois où je lui ai rendu visite. Juste pour lui faire peur et le terroriser ça m'amusais. Pour ma dernière petite visite, je vais me faire un plaisir sadique à le faire souffrir."
"J'peux savoir comment tu t'appelle, ma petite ?"
Je lui lançait un regard noir. "Tu dois être nouveau ici. Pas de nom. Pas de visage. Je suis personne et tu ne m'as jamais parlé." lui dis-je d'un ton froid. Je me leva brusquement, paya et sorti de la taverne.
J'avais pendant un instant laissé mes émotions prendre le dessus. La situation du cyclope avait entrouvert la porte de mon cœur que j'avais pourtant verrouillée à triple tour. Ne plus jamais souffrir, voulait dire ne jamais s'attacher. J'allais aider la jeune cyclope car son père m'avait donner des informations vitales pour ma mission. C'était une contrepartie raisonnable. Les enfants étaient ma faiblesse. Je ne peux pas rester sans rien faire lorsqu'un enfant souffre. C'est peut-être la seule trace d'humanité qu'il me reste.
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Eliana Nox'Kir : Flammes ténébreuses
Fantasi• Eliana : "En vrai si le monde brûle c'est pas grave, si ? Je les aurait prévenu au moins. Mais bon après tout dans la vie faut assumer quand on fait des conneries hein. Je pourrais pas dire que c'est pas de ma faute. Après, IL a une part de respo...