Chapitre 2

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Je suis retournée à l'hôpital aujourd'hui. Mon temps de vie restant est estimé à une quarantaine d'années. Enfin, ce serait le cas si je n'avais pas écrit depuis que j'ai été diagnostiquée de la plumitisme. Je pense qu'il ne me reste au maximum qu'une dizaine d'années. Si, et seulement si, j'arrête d'écrire. Sauf que j'en suis toujours incapable.

Depuis mes 18 ans, j'habite seule. J'ai été prise d'une frénésie soudaine depuis lors. J'écris énormément. En réalité, je ne fais presque que ça de mes journées. Je mange et dors à peine, je ne suis plus mes cours en ligne, dont je me suis même désinscrite. J'ai également engagé plusieurs démarches, dont celles pour mon testament.
J'ai payé tout mes abonnements pour les trois prochaines années, et j'offre de plus en plus de choses à mes parents pour que la réception du testament soit le moins cher possible.

J'ai contacté une maison d'édition. Nous travaillons désormais ensemble et mes écrits les rendent très enthousiastes. Néanmoins, je ne veux pas qu'ils soient publiés de mon vivant. J'ai fait en sorte que les droits d'auteurs soient accordés à mes parents, ils seront ceux qui recevront l'argent qu'occasionneront les ventes des livres, avec un taux de 50/50 avec la maison d'édition.

Je profite du temps qu'il me reste pour écrire le plus possible. Le temps s'écoule trop vite, et les mots s'échappent trop rapidement sous mes doigts.
Je n'ai pas une seconde à perdre.

Je ne vais pas très bien. Je m'évanouis fréquemment depuis quelques temps. Je me suis aussi mise à saigner du nez. Maintenant, j'ai toujours un paquet de mouchoirs près de moi, au cas où.

Je suis désormais obligée de m'arrêter souvent pour me reposer. Si ce n'est pas la plumitisme qui me tue la première, alors je mourrais d'hémorragie. Je saigne presque constamment du nez, et me retrouve dans une situation précaire, au bord de l'anémie. 
Malgré tout ces inconvénients, je suis incapable de m'arrêter d'écrire. Les mots pulsent dans ma tête, c'est presque dans un état Second que je me retrouve à les poser sur papier, là où ils me supplient de les abandonner.
Je ne parviens pas à simplement les laisser flotter dans le vide de mon esprit. J'ai besoin de les partager, de les offrir aux autres. Il n'est pas important qu'ils intéressent les gens. Je veux simplement leur donner l'occasion d'être lus et éprouvés par ceux qui les demande.

Je dois bientôt me rendre chez mes parents. Se détendre et retrouver sa famille est important pour tout le monde. Trouvez le temps pour votre entourage, pour les personnes que vous aimez. Car bien trop souvent, c'est lorsqu'il est trop tard que l'on s'aperçoit de combien ces personnes nous importaient. Alors même si ce n'est pas beaucoup, trouvez du temps pour ceux qui vous aime.

Bon assez de ces leçons de morale, je vais rendre visite aux personnes importantes pour moi. Je vais visiter mes parents. Ils ne me le disent pas, mais je sais qu'ils m'aiment et s'inquiètent pour moi.

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Cela fait plusieurs jours que je n'ai pas écrit. Vous ne pouvez pas le savoir, évidemment, vous lisez seulement derrière votre écran, après que ce chapitre ait été posté. D'ailleurs, saviez-vous que j'ai mis en place un système plutôt ingénieux, dont je suis fière ? Bien sûr que non, vous ne pouviez pas le savoir non plus. D'accord, d'accord, je m'explique. Je suis parvenue à faire en sorte que le dernier chapitre que j'écris soit automatiquement posté si aucune modification n'est apportée au-delà de deux semaines. Ça peut paraître court, mais je trouve que c'est déjà plutôt long. On sait jamais, il pourrait m'arriver quelque chose?

Ah, vous vous demandiez peut-être pourquoi je n'ai pas écrit ces derniers jours ? Je vais vous expliquer.

J'allais rendre visite à mes parents comme je l'avais initialement prévu. J'attendais à un passage piéton que le feu passe au vert. Je ne suis pas suicidaire voyons, qu'est ce que vous vous imaginiez? Enfin bref, j'attendais, et je me sentais un peu engourdi, je venais de vous écrire en même temps. Et là, pouf, trou noir. Je me suis réveillée à l'hôpital. Les médecins m'ont dit qu'un monsieur m'avait vu m'évanouir dans la rue, qu'il avait essayé de me réveiller, et qu'après ne pas y être parvenu, il avait appelé les urgences. Les urgentistes étaient arrivés un peu plus tard et m'avaient emmenée en ambulance jusqu'à l'hôpital. Justement celui auquel je suis traitée pour ma plumitisme. Il s'agit de l'hôpital plus proche de chez moi. Ils ont appelé mes parents, qui commençaient à s'inquiéter de ne pas me voir arriver. Ils sont arrivés à l'hôpital un peu plus tard.
C'est comme ça qu'ils ont découvert que je continue d'écrire. Ils étaient si triste et déçus. Je m'en veux énormément de leur faire éprouver ça.
A vrai dire, la culpabilité me ronge depuis. Surtout parce que, malgré que je sache que ça leur fait du mal, que ça me fait du mal, je ne parviens pas à m'empêcher d'écrire. Ce serait comme m'arrêter de respirer. Je ne serais plus moi si j'arrêtais.

Je ne suis qu'une auteur parmi tant d'autres. Je n'ai pas la prétention de dire que je suis meilleure ou que je vais changer les gens. Je m'en sens bien incapable. Mais j'espère au moins parvenir à en toucher certains à travers ces mots qui me coûtent la vie.

Je vous offre de mon être à chaque histoire que j'écris, je prends la peine de vous les partager. Je ne sais pas quand seront mes derniers instants. Personne ne le sais. Alors vivons pleinement, en pensant que ce jour ne reviendra jamais et qu'il sera probablement le dernier. Vivons à fond, et profitons pleinement, pour ne pas vivre ni mourir avec des regrets pesant sur nos épaules.

Ecrire contre ma vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant