CHAPITRE 2 : Les confidences de Moïra

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Frissonnant, Archibald Anderson referma la porte de sa maison après avoir été faire son habituelle patrouille autour de la Ruine. La Roue était toujours à sa place, elle ne bougeait pas mais le maître des lieux n’était pas serein pour autant. La tempête allait probablement faire trembler les arbres et Moïra ne pouvait pas prendre le risque de rentrer chez elle par un temps pareil. 

En apprenant que leur mère allait devoir rester pour la nuit, les triplés n'avaient pu s'empêcher de soupirer de soulagement, ravis de ne pas se retrouver seuls avec cet étrange personnage qu'était "Oncle Archi" pour eux. Le temps d’une soirée, ils allaient pouvoir profiter de la présence rassurante de leur mère. 

La peur passée, ils s'étaient changés et, en voyant leurs pyjamas blancs ornés de petites têtes grises de Trolls en guise de motifs, Archibald n'avait pu s'empêcher d'esquisser un léger sourire, lorsqu'il était passé devant leurs chambres, avant de s'enfermer dans son bureau.

Moïra ayant insisté pour préparer le repas du soir malgré les protestations d'Archibald, celui-ci s'était résigné à la laisser faire comme chez elle. 

Une fois isolée des autres, la créature soupira, les yeux clos, et son apparence changea. 

Du Gnome d'une cinquantaine d'années aux airs de vieux grincheux ne restait plus rien si ce n'était une paire de griffes noires et des iris couleur d'encre. 

A la place, il y avait un homme qui ne paraissait pas avoir plus de 35 ans, aux cheveux noirs ébouriffés qui encadraient un visage plutôt agréable à regarder. Un nez fin et des sourcils qui l'étaient tout autant, il avait une peau assez pâle sans pour autant lui donner un teint maladif ainsi que des oreilles quelque peu pointues. 

Monsieur Anderson avait pour habitude d’user d’une fausse apparence pour effectuer les missions que lui confiait l’Assemblée, gouvernement des populations magiques. Ce n’était pas une obligation mais les Mages avaient coutume de se prêter aux jeux des changements d’identité et de corps pour demeurer anonymes et ne pas mettre en danger leurs proches. C’était là une précaution que beaucoup aimaient à exploiter. Certains avaient des familles, des enfants. Toutefois, les pratiquants des Forces Noires étaient les plus nombreux à s’adonner à cette pratique magique. Ils étaient “l’élite” de leur gouvernement. Ils servaient leurs dirigeants au péril de leur vie, prêts à mourir pour la plus noble des causes que défendrait l’Assemblée.  

En observant durant quelques instants son reflet dans un petit miroir posé sur un meuble en bois de chêne, Archibald Anderson remit quelques-unes de ses mèches sombres en place, effleurant ses oreilles quelque peu pointues au passage.

Le changement d'apparence n'était guère épuisant pour lui et était même d'une simplicité enfantine. Il s'agissait du premier pouvoir qu'il s'était découvert. Qu'elle avait été sa surprise en se réveillant un jour avec l'apparence de Monsieur Pétrus, son professeur d'école ! Même sa voix en avait été modifiée ! 

A ce souvenir, Archibald eut un petit sourire avant de poser son regard sur son bureau.

Grande, la pièce principale devait bien faire aux alentours des 30m². Plus qu’un bureau, l’endroit avait tout l’air d’un refuge. Plusieurs rouleaux de parchemins s’étalaient sur le bureau en bois sombre. Un encrier qui n’avait pas pas été refermé correctement était posé dans un tout petit coin du meuble, et une plume de corbeau taillée pour pouvoir écrire reposait sur une pile de vieux bouquins dont certains étaient encore ouverts mais mal empilés les uns sur les autres. A droite, une grande et large bibliothèque mangeait une grosse partie du mur recouvert d’un papier-peint rappelant la forêt. Chaque rangée semblait correspondre à un genre littéraire ou à une quelconque catégorie, voire hiérarchie, que seul Archibald connaissait par cœur et pouvait décrypter étant donné que chaque indication pour les différentes rangées étaient écrites dans un langage codé qu’il avait mis au point. Au fond de la pièce, il y avait deux petites marches d’escalier qui permettaient d’accéder à la partie “atelier” cachée uniquement par un pan de mur. 

La Roue de la RuineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant