Chapitre 3 : Opération Kawa

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Le lendemain matin à 7h30 précises, Daphné, comme à son habitude, entra dans les bureau de la DIPJ, salua l'agent à l'accueil d'un ton poli et entra dans l'open-space. Comme tous les matins, le commandant était déjà plongé dans ses dossiers, Gilles n'était pas encore arrivé et, à en juger par la lumière qui filtrait entre les stores, la commissaire devait prendre son café matinal dans son bureau. Cependant, cette journée ne ressemblerait probablement pas à toutes les autres. Daphné avait accepté une mission : celle de prélever un peu de salive du commandant pour l'apporter à Morgane et, plus le temps passait, plus elle le regrettait. Elle s'installa à son bureau et sortit ses affaires, non sans avoir salué le commandant, et, voyant qu'elle était incapable de se concentrer sur une tâche, décida de passer à l'action immédiatement. Elle trottina jusqu'à la salle de pause, essayant tant bien que mal de ne pas paraitre trop pressée et et servit deux tasses de café, une pour elle et une pour le commandant. Ne trouvant pas la tasse favorite de ce dernier dans le placard, elle en prit une autre et une fois les deux boissons prêtes revint dans l'open-space où Gilles déballait joyeusement ses affaires et racontant une de ses anecdotes que seule Morgane pouvait trouver drôle. Malgré tout, Daphné trouvait adorable le fait qu'il essaie de détendre l'atmosphère plus que tendue de ces deux dernières semaines, cela aussi, Morgane aurait très bien pu le faire si elle n'avait pas été... indisposée. Songer à la consultante du service la ramena à sa mission, "l'opération Kawa" comme l'avait immédiatement nommé Morgane, et s'approcha du bureau du commandant avec un sourire presque forcé.

- Commandant ! Vous voulez un... un café ?, lança t-elle en essayant d'empêcher sa voix de trembler


Ce dernier releva la tête et la dévisagea quelques secondes avant de lui désigner d'un signe de tête la tasse, encore à demi pleine à coté de son ordinateur.

- Non merci Daphné, ça ira, je pense que j'en ai assez avec une tasse pour le moment.

- Ah euh... oui bien sûr pardon... je euh... même pas une gorgée ?

- Tout va bien Daphné ?

- Oui... oui oui

- Si quelque chose ne va pas je lui là, ok ?

- Bien... bien sur commandant.



Gilles intervint, la sauvant du regard inquisiteur du commandant par la même occasion.

- Euh, moi par contre j'avoue je veux bien un café Daphné.



Saisissant l'occasion, Daphné déposa les deux tasses de café sur le bureau de son collègue et se hâta vers les toilettes des dames avant de se glisser dans une cabine. Elle composa alors le numéro de la rouquine, priant pour qu'elle décroche son téléphone.

- Mmmh ? Ouais Daphné qu'est c'qui s'passe ?, lui répondit la voix d'une Morgane encore endormie

- Morgane, tu dormais ?! Pendant que je risque ma carrière pour toi ?

- Ouais mais je fais pas mes nuits à cause de mon mini radis c'est assez relou. Bon qu'est ce que tu voulais ?

- Morgane, commença Daphné d'une voix angoissée, j'ai essayé de donner du café au commandant mais il en avait déjà ! Il m'a posé des questions je pense qu'il suspecte quelque chose, je survivrai pas a un deuxième interrogatoire, j'ai été obligée de lui mentir... et puis tu sais Morgane j'ai vérifié hier soir hein, et prélever l'ADN de quelqu'un sans son consentement c'est illégal...

- Oula, du calme poulette, je viens d'me réveiller moi, bon ok, t'as pas fait attention, Super Poulet avait déjà pris un café mais c'est pas grave ça ! Et puis bon, il pose tout le temps des questions relou t'inquiètes pas c'est du Super Poulet tout craché ça. Et puis d'abord c'est illégal que si on se fait choper hein.

- Morgane...

- Quoi ? T'as dit que t'étais avec moi, qu'on était partenaire tu vas pas me lâcher comme ça, dis ?


La jeune flic poussa un long soupir.

- Non Morgane, je vais pas te lâcher...

- Super ! Attends je te laisse j'ai la boss qui essaie de me joindre !


A la mention de la commissaire, Daphné parut se souvenir de l'endroit où elle se trouvait et s'empressa de rejoindre son bureau.

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Au même instant, bien au chaud dans son lit, Morgane prit l'appel de Céline.

- Allo ? Comment ça va patronne ?

- Ah, bah Morgane vous avez l'air en forme !

- Ah ça, je pète le feu comme on dit ! Et vous ?

- Ca va, bah écoutez c'est super ! Vu que vous allez mieux, vous allez pouvoir faire un saut à la PJ on a besoin de votre témoignage par rapport à l'affaire du tueur à la perceuse.


A ces mots, la bonne humeur de la rouquine se mua en angoisse.

- Ouais, euh alors... ca va pas être possible que je vienne... y'a pas moyen de... le faire par téléphone ?

- Non Morgane, j'ai besoin que vous veniez ici pour que le commandant puisse prendre votre déposition.

- Le commandant... vous voulez dire Karadec ? Non ça va pas être possible ! J'ai la voiture en panne vous comprenez, et puis les enfants sont chez Ludo et...

- S'il vous plaît Morgane, mettez y un peu du votre ! Je demande au commandant de passer vous prendre alors ?

- NON ! Au final euh... la panne de voiture c'est pas si grave, je peux demander à Henry de me réparer ça en deux minutes. J'arrive patronne hein ! Envoyez personne je suis en chemin ! Allez bisous bisous !, lança Morgane avant de raccrocher.


Elle lança son téléphone sur son lit et posa une main sur son ventre en soupirant

- Tu vois dans quelle galère on est à cause de toi Mini Radis ? Comment je vais expliquer à tout le monde que j'ai subitement pris trois tours de taille en deux semaines ?


Face à cette question qui resterait sans réponse, la rouquine se décida à farfouiller dans son placard à la recherche d'un vêtement qui, à défaut de lui rendre son tour de taille, masquerait suffisamment bien son ventre pour que personne ne se rendre compte de rien. Au bout d'une dizaine de minutes de recherche, où elle avait retourné une fois et une autre son armoire, elle finit par se décider pour un jean qui lui allait un peu grand, sans ceinture, au niveau de la taille et un pull blanc qu'elle devait probablement appartenir à Ludo au vu de la taille. Si elle ajoutait à cela une de ses éternelles doudounes rose fuchsia, elle pouvait espérer cacher suffisamment bien Mini Radis pour que personne ne se rende compte de son existence. Restait juste à trouver une excuse à ce soudain changement de look, mais ça, elle y réfléchirait plus tard. Elle descendit les marches quatre par quatre, enfila une paire de talons colorés avant d'attraper ses clés de voiture et de prendre la route vers la DIPJ de Lille, le seul endroit de la ville qu'elle aurait préféré éviter. Elle arriva devant l'accueil à 10h34 minutes et 33 secondes. Et elle aperçu celui qu'elle avait délibérément évité, et qui n'avait pas non plus cherché à prendre de ses nouvelles, à 10h35 minutes et 26 secondes. Il ne leva pas les yeux vers elle, ne l'ayant probablement pas encore vue, mais le souffle de Morgane se figea dans sa poitrine. Elle se sentir vaciller légèrement, partagée entre l'envie surpuissante de se jeter dans ses bras et celle, toute aussi forte, de s'enfuir en courant. Il lui fallut toute la force de sa volonté pour aller jusqu'à l'entrée de l'open-space et s'exclamer d'un ton joyeux, comme si au fond d'elle même elle n'avait pas envie de pleurer, en ouvrant grand ses bras :

- Yo les poulets ! Je vous ai manqué ?

My Only OneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant