La nouvelle fille

114 16 11
                                    

      Aujourd'hui, c'est mon premier jour au lycée, le pire de toute l'année je pense. Moi c'est Rose. La fille que vous voyez là seule sur un banc, et bah c'est moi. L'histoire commence bien n'est-ce pas ? Dans mon ancien lycée, tous les jours, j'entendais « T'aurais pas un snap ? », «Salut beauté!» ou « Roh t'es magnifique, tu voudrais pas sortir avec moi par hasard?». 

     Bref j'avais été populaire à ma façon : en étant la plus belle du lycée mais aussi la plus inaccessible. Tout le monde sait que les hommes ont le goût de l'interdit. Heureusement d'ailleurs! Sinon comment on aurait fait pour traverser des mers houleuses, à la découverte de nouveaux horizons; comment on aurait fait pour créer l'énergie nucléaire et surtout comment on aurait fait si l'on ne se risquait jamais à avouer ses sentiments à quelqu'un. Vous le voyez aussi bien que moi, les hommes abattent des montagnes. Mais n'arrivent pas à me conquérir. Je ne suis jamais tombée amoureuse.

     Femme fatale, j'avais le lycée à mes pieds. J'étais littéralement au sommet de l'échelle sociale. Je n'étais même pas une "parvenue" comme on les appelle ici, à Emerton High School. Les parvenus étaient des gens qui avaient grimpé l'échelle sociale grâce à un acte héroïque, comme par exemple répondre à un prof. Oui oui ici c'était mission impossible de répondre à un prof sans se prendre une sévère punition. Ainsi, il fallait un sacré courage pour oser être insolent avec les profs.

     Il y avait bien d'autres facteurs pour devenir populaire. Les actes héroïques les plus commentés se déroulaient sur le terrain de football américain. Et pour ça, je peux vous dire que des héros on en voyait beaucoup sur le terrain. Ça sentait fort la testostérone, les muscles dépassaient de partout et puis, quand un footballeur vous parlait, il vous cachait le soleil. Par-ailleurs, il savait faire de ces choses... Pirouettes, acrobaties folles, retournements de situation, salto, double salto, plongeon de plusieurs mètres, etc. Certains joueurs, comme Barty, avaient la capacité de sauter au-dessus des joueurs en faisant un salto. Ils avaient ainsi l'honneur de siéger à un plus haut statut social que moi. C'est dire! Sans avoir intégré de club en particulier ou être particulièrement douée dans un domaine, on m'avait élue favorite de l'école. Ceci était une sorte de concours Miss France au lycée. Tout le monde pouvait participer, même les garçons. Sans surprise, Barty avait été nommé favoris à mes côtés. Il y avait cinq favoris, en tout.

      Parmi nous, il y avait même un écrivain à renommée nationale. Au sein d'un pays aussi grand que les États-Unis, ça n'était pas rien. En plus, notre lycée -assez moyen on va dire- se trouvait dans le Dakota du Nord, ce qui rendait encore plus difficile l'émergence de nouvelles stars. Nous étions loin d'Hollywood dans cet endroit.

      De mon côté, je me foutais d'être connue nationalement. Tout ce que je voulais, c'était garder mon petit fan club au sein du lycée. Ainsi, j'étais toujours accompagnée comme un rayon de soleil. Seules les personnes les plus impopulaires n'étaient pas autorisées à demeurer avec moi. Je ne vais pas vous faire un dessin: les gens harcelés je m'en contrefichais. Par-contre, oh la la les beaux gosses stupides... 

     Attention il n'y avait pas qu'eux! Et je me gardais bien de les intégrer à mon cercle d'amis le plus proche. Les hommes fatals étaient justement trop fatals pour être dignes de confiance. Mes «amis » -comme les gens de basse condition les appellent- étaient constitués d'une joyeuse bande, tous plus drôles et cools les uns que les autres. Quand nous marchions dans les couloirs de Emerton High School, nous étions les Avengers. Allez maintenant que je me suis mis à en faire l'éloge, parlons-en de ce cercle d'amis le plus proche. Vous semblez impatients. 

     Tout d'abord, il y avait Jonathan, quaterback tout le temps joyeux et plutôt craquant. Ensuite, il y avait Christina, elle c'était ma bestie, nous passions tout notre temps ensemble aux USA. Puis, j'avais Raoul, surfer bronzé, un peu sombre mais sympa; Mat, un joueur de golf stupide mais drôle; Emily, une blonde avec beaucoup d'énergie; Tania, une petite chinoise craquante avec qui je faisais la bad girl.

La pouffiasseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant