L'irruption du très séduisant Jungkook dans la vie de Jimin a des allures de cambriolage. D'emblée tout les sépare. Jungkook est l'intrus, l'indésirable. Jusqu'au moment où Jimin s'aperçoit, horreur !, que ce qu'il ressent pour son indésirable, c'es...
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12 h 15. Jimin suspendit le balancement du rocking-chair et observa l'ennemi. Il était toujours à califourchon sur sa chaise, fixe, bras croisés. Une telle immobilité tenait du paranormal. C'était, soit la preuve d'un pouvoir de concentration hors du commun, soit la manifestation d'un abrutissement non moins hors du commun.
Jimin opta spontanément pour la deuxième solution et se remit à se balancer. Ils se narguaient mutuellement depuis maintenant une heure et cinquante minutes. Mais quelque chose lui disait que le dénouement était proche. Quelque chose qui ressemblait à une crampe d'estomac. Il mourait de faim ! Il aurait donné n'importe quoi pour un steak accompagné de frites. Ah, le bruit du beurre qui grésille dans la poêle... Le petit goût piquant de l'échalote qui craque sous la dent. Il vit des kilomètres de saucisses grillées défiler devant ses yeux et se cramponna à sa fierté pour ne pas quémander une trêve. Rien qu'un quart d'heure. Le temps de filer à l'épicerie du coin et de rapporter de quoi manger. MANGER...
Son regard pivota vers Jungkook. Rien, pas un mouvement, pas même un tressaillement. Un vrai moine tibétain. Il se serait mis à léviter dans la pièce qu'il n'aurait pas été autrement étonné. Il accentua le mouvement du rocking-chair, le front plissé par une réflexion intense. Il fallait qu'il mange. N'importe quoi, mais qu'il mange ! Et puisqu'il ne pouvait pas aller à la nourriture, la nourriture irait à lui. Simple, logique, imparable.
Ravi d'avoir résolu si intelligemment le problème, il se leva, prit un bloc de papier dans un de ses cartons et s'installa à la table. Après avoir avoir cherché quelques secondes l'inspiration au plafond, il écrivit de sa plus belle plume :
« Locataire en péril cherche coursier au grand cœur qui lui rapportera : 1) une baguette pas trop cuite, 2) un bifteck dans la bavette, 3) une plaquette de beurre, 4) des pommes de terres ou des frites, 5) de l'huile, 6) sel et poivre, 7) une laitue, 8) deux ou trois échalotes (facultatif). Les provisions sont à livrer de toute urgence au numéro 11, impasse des Glycines, 2e étage (accès par l'escalier de service, derrière la maison). Merci, merci, merci ! »
Il plia la feuille, y épingla plusieurs billets et lesta le tout avec une pince à linge. Restait le plus difficile : trouver un coursier au grand cœur.
Il passa devant le moine tibétain, ouvrit la fenêtre et se pencha au-dehors. Pas âme qui vive. A part un chat qui rôdait près du réverbère. Il s'en remit à la providence, croisa les doigts et lança le message. Il atterrit sur le couvercle d'une poubelle avec un « toc » discret. Jimin tapa du pied. Personne n'irait le chercher là ! Pourquoi n'était-il pas fichu de viser correctement...
Un tressaillement lui échappa. Un homme vêtu d'un long manteau gris et coiffé d'un chapeau cabossé venait d'émerger de la rangée de poubelles. Il se pencha pour regarder le message de près, puis leva les yeux vers le ciel, visiblement ébahi par ce prodige.
Jimin se rejeta vivement en arrière. Cette mine patibulaire... cette énorme barbe en broussaille... Son message était tombé entre les mains d'un clochard ! Il pouvait dire adieu à son déjeuner et à ses billets !