17 juin 1999, sous une nuit pluvieuse d'été, ma mère me met au monde. J'aimerais me dire que ça à été le plus beau jour de sa vie, mais ça n'était que le début de la fin. Dès mon plus jeune âge, je compris que je ne serais jamais comme les autres petites filles, et que je n'aurais jamais une vie remplie de beaux souvenirs, d'amours et de rires.Enfermé dans un manoir depuis petite, je ne pensais pas pouvoir vivre au-delà de ses murs, mais par un miracle ou plutôt une malédiction, un soir, tout allait changer.
La pluie tombait avec force à l'extérieur, la nuit s'était installée depuis un bon moment déjà, et la seule lumière visible provenait des lampadaires bordant le chemin qui menait à cette propriété qui m'est inconnue. Adossée contre le rebord de la fenêtre de la chambre, j'observais le spectacle que la nuit avait à offrir. Un instant que je considère désormais comme un privilège, depuis que je me suis retrouvée ici. Dans une merde sans nom. C'est vraiment le cas de le dire. Moi qui pensais que mon cauchemar se transformerait en rêve lorsque mes géniteurs m'ont enfin donné ce que je désirais tant : l'indépendance, la liberté. Je laisse échapper un rire amer, ou plutôt, je me moque de moi-même en repensant à tout ce que j'ai pu idéaliser jusqu'à maintenant. Petite insignifiante. Tu croyais quoi ?
Leurs manigances m'ont conduite dans cette situation désastreuse, et je n'ai même pas la certitude qu'ils envisagent de m'en tirer un jour. À leurs yeux, je ne suis qu'un fardeau dont il fallait se débarrasser au moment opportun. Et je crois que ce moment est arrivé. J'en suis même convaincu, autrement, je ne me retrouverais pas une fois de plus enfermé dans une maison inconnue avec des étrangers que je ne connais pas, mais à en juger par mon ressenti, eux me connaissent, et ne me veulent certainement pas du bien, sinon je ne serais pas enfermée dans cette chambre. Mais ce que je trouve le plus étrange dans tout cela, c'est que je ne comprend même pas pourquoi tout ceci m'arrive. Personne ne connait mon existence, je venais à peine de commencer à explorer ce que le monde avait à m'offrir, mais il semble que, pour une raison ou une autre, il ne veut pas de moi.
Je me retrouve enfermé dans cette chambre, avec comme seuls compagnie, des souvenirs qui restent flous. Je souffle et décide de fermer la fenêtre, parce que la nuit c'est bien beau, mais le froid, je ne suis pas fan. J'avance vers le lit, ou je passe la majeure partie de mon temps, mais un bruit - qui m'est inhabituel jusqu'ici - me fait frémir et me coupe instantanément dans mon action. Le bruit d'une clé dans une serrure. La panique et la peur m'envahissent tellement que je n'arrive plus à bouger, ma respiration se saccade et mes mains commencent à trembler. La poignée s'abaisse et je ne bouge toujours pas, je suis comme dépossédé de mon corps, il ne m'obéit plus. La porte s'ouvre. Une silhouette me fait face. Mes yeux mettent plusieurs secondes à s'adapter à la lumière perçante provenant du couloir. L'inconnu entre sans vergogne dans l'habitacle ou je suis prisonnière, il garde cependant une longue distance entre nous, ce qui m'empêche de bien l'analyser. Serait-ce fait exprès ?
Il reste planté là, sans dire un mot, mais je sens son regard sur moi, ce qui me met mal à l'aise en plus d'être effrayé. La panique ne m'a pas quitté, mais il faut que je reprennes peu à peu possession de mon corps et de mon esprit. Il ne faut pas que je lui montre ne serait-ce qu'une bribe de mes émotions, il pourrait m'écraser avec n'importe quand, et ça, je ne l'accepte pas. Je prends une grande inspiration et mon courage à deux mains et marche avec assurance jusqu'à mon lit. Je m'assois, et plante mon regard vers la silhouette imposante qui me surplombe malgré la distance qu'il a imposé. J'arrive à distinguer avec difficulté sa taille, et sa musculature - qui n'impose pas trop -.
Le mutisme emplit la pièce depuis plusieurs minutes et je n'ai toujours pas dévié une seule fois de mon regard, même si la lumière du couloir n'aide en rien à balayer l'obscurité installé dans la pièce. Le silence ne me dérange habituellement, au contraire, j'adore ça mais dans cette situation précise je n'ai jamais autant désiré entendre ma mère me crier dessus. Contre toute attend, après plusieurs seconde qui m'ont parus des heures, il le rompt enfin.
- Tu t'appelle comment ?
Un rire nerveux sort de ma bouche sans que je le veuille. Comment je m'appelle ? Sérieusement ? Il m'a limite kidnappé et il ne sais même pas mon prénom. C'est une blague ?
- Qu'est ce qui te fait rire ? dit-il d'une voix assez stricte, ce qui me fait reprendre tout de suite mes esprits.
- Ho, je sais pas. Peut-être ta question débile ?
Ma réponse me surprend moi même, je ne pensais pas fair épreuve d'autant d'assurance devant une personne qui m'est inconnu et qui semble ne me vouloir que de mauvaises choses.
- J'essayé d'être polie mais visiblement ce n'est pas ton fort. Je suis même pas surpris, on m'avait quelque peu prévenu avant que je vienne te rendre visite, dit-il d'un ton rauque, qui me provoque un frisson - pas le frisson que vous pensez - de peur. Il émane quelque chose de mauvais rien qu'en ouvrant la bouche, et ça, ça sent les problèmes à plein nez.
- C'est assez intéressant de savoir que des personnes que je ne connais ni de loin, ni de près, parlent de moi comme s'ils m'avaient côtoyé toute leur vie.
Il lâche un gloussement et s'avance d'un pas. Je poursuis.
- Donc j'imagine que tu as déjà la réponse à ta propre question, dis-je en souriant accompagné de mon air condescendant.
- Tu es plutôt vive comme fille, mais ne cache pas ta peur derrière une fausse audace, ça fait quelque peu pitié.
Je vais l'étrangler, le frapper dans les roubignoles et les lui arraché par la suite. Il se prend pour qui sérieux ? La colère monte petit à petit, mais c'est tout ce qu'il souhaite, m'énerver, et je ne vais pas lui faire se plaisir personnel, alors je vais l'utiliser d'une manière plus intelligente.
- C'est quoi ton prénom à toi ?
Ma question le prend de court, son raclement de gorge en est une preuve. Intéressant. Quelques secondes passent, il réfléchit, il hésite. Encore plus intéressant. T'a beau mettre de la distance pour que je ne puisse pas te voir, ça ne m'empêchera pas d'apercevoir à travers des lignes que tu ne veux pas souligner.
- Ta perdu ta langue Honey. Le coup du surnom intime marche toujours pour déstabiliser son adversaire - j'ai peaufiné cette technique sur Cameron - surtout quand il ne nous connaît pas.
- Aiden, je m'appelle Aiden. Et non, je réfléchissais juste à comment je pourrais te faire avaler la tienne.
Aiden. Connard. Je suis sûr qu'il a un sourire arrogant marqué sur son visage à cet instant précis. Mon petit tour n'a pas marché, il le sait, il s'en délecte. Trou du cul. Trou du cul. Trou du cul.
- Aiden ? Commun comme prénom je dirais.
Il s'avance encore d'un pas vers moi.
- Bleu ? Peu commun comme prénom je dirais.
A cet instant précis, mon âme ne m'appartenait déjà plus, mais je ne le savais pas encore.
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Bleulivide
Teen FictionBleu, un prénom singulier pour une fille originale, torturée par ses démons les plus profonds. Née dans une famille riche et mystérieuse, elle grandit dans l'ombre du manoir familial, protégée des dangers extérieurs par la volonté inébranlable de se...