chapitre 2.
2 228 mots.
ORION s'en souvenait parfaitement. Sa mémoire avait toujours été infaillible après tout. C'était il y a trente ans, lors d'une de ses missions. Ce n'était pas sa première mission de terrain, mais c'était de toute évidence sa plus dangereuse.
Son souvenir commençait dans une ruelle sombre et humide. Orion la traversait pourtant sans hésitation, avec une telle aisance qu'on aurait pu croire qu'il y était né. Ce n'était qu'une façade. Il tentait de se rassurer en vérifiant une énième fois si ses gants et son chapeau étaient bien enfoncés, avant de se reprendre. Il ne devait pas laisser son anxiété transparaître. Il regrettait de ne pas avoir de miroir à proximité pour réarranger une dernière fois ses cheveux.
Il était dans un des quartiers les plus mal-famés de Starklo, et était si peu rassuré qu'il devait lutter contre son corps pour ne pas sursauter aux moindre bruits suspects. Il avait du mal à se repérer dans l'obscurité constante. Pour compenser l'absence du soleil, le cœur de la ville était éclairé en journée par de la lumière artificielle, mais les bas-fonds n'avaient pas ce luxe. Il y régnait une éternelle obscurité seulement éclairée par de lugubres néons accrochés maladroitement sur la façade crasseuse de maisons et pubs en tout genre.
Orion arrêta ses pas devant un établissement illuminé par une sinistre lumière rouge, comme si on voulait donner l'impression que le bâtiment en métal était perpétuellement en feu. C'était un des lieux de débauche les plus prisés de Starklo, mais également un point de réunion et de ralliement d'un réseau de résistance, attirant l'attention du gouvernement. Malheureusement, l'endroit était protégé par de nombreux haut placés, et donc impossible à fermer. Orion devait donc aller sur le terrain arrêter l'Orchidée, une passeuse qui aidait des marginaux à s'échapper de la ville.
Il souffla pour se donner du courage et entra. A peine eut-il posé un pied dans le club qu'il fut assailli par une musique assourdissante. Il réprima une grimace et se retint de se départir de ses gants. Il y régnait une chaleur insupportable.
Il se faufila entre les danseurs, baissant les yeux sur le sol afin de ne croiser le regard de personne. Il finit par atteindre le bar, et commanda une boisson, qui arriva rapidement.
Il remua son verre avec envie, mais il ne pouvait pas boire durant son service. Il jeta des coups d'œils furtifs aux danseurs, essayant de trouver une femme correspondant à la description de sa cible, mais également aux jeunes femmes étalées sur des fauteuils disséminés dans toute la salle. L'obscurité rendait cette recherche complexe, mais Orion avait été formé pour affronter des situations bien plus ardues.
—Salut, déclara une femme venue se glisser à ses côtés sans un bruit.
Il lui jeta un simple regard avant de reprendre la contemplation de son verre. Il avait eu le temps d'apercevoir une pléthore de bijoux et un visage clair exempt de maquillage. Cette femme n'était de toute évidence pas celle qu'il recherchait.
Semblant se vexer de son indifférence, elle rit amèrement.
—Quoi, un bon toutou du gouvernement ne s'abaisse pas à parler à une traînée ?
Sa question eut le mérite d'interloquer Orion. Il tourna la tête.
—Vous ne voulez pas me dénoncer ?
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NUMÉRO 39
Short StoryEn cette nuit d'été, Orion paya les conséquences de son unique faute. [nouvelle, dystopie, 3 chapitres, 6,027 mots.]