Chapitre 4 : Prophétie

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Je m'extirpe du souterrain, protégeant mes yeux de mon bras libre. Lorsque j'observe ce qui se trouve autour de moi, la première chose qui me choque est la vitalité de l'endroit où j'ai atterri. Partout, des jeunes Nymphes à peine âgées de plus de dix ans jouent à se courir après. Je me trouve dans une plaine entourée d'arbres, un peu à l'image du clan de dryade que je viens de quitter, à la différence qu'un énorme étang la surplombe. Il y a des Nymphes dans chaque recoin, certaines jouent avec leur pouvoirs, s'amusent à impressionner leur camarade en faisant émerger de petites pousses du sol. D'autres volent dans le ciel, font la course, s'entraînent à créer des tornades. Dans chaque recoin, c'est une effusion de tignasses rousses, blondes, blanches ou brunes. Mais ce qui saute aux yeux, ce sont les sourires que chacune arborent, cela fait très longtemps que je n'ai pas vu quelqu'un sourire. Certaines nous adressent des coups d'œil curieux au passage, mais poursuivent leur chemin.

Perdue dans cette variété de couleur, je me concentre sur tout ce qui se trouve autour de moi. Près de l'eau sont disposées des cibles, des couteaux et divers outils à lames que je ne connais pas. Certaines Nymphes s'entraînent à se battre à l'aide de mannequins en bois articulés.

Je fais glisser mon regard, et remarque qu'un îlot se situe au centre de l'eau, sur ce dernier, quatre Nymphes s'entraînent à maîtriser leurs pouvoirs aquatiques. Mais certaines semblent elles aussi être des métisses, une a la peau noire et des cheveux blond, et une autres a le teint pâle et les cheveux blancs à l'image d'une ouranie, mais lorsqu'elle regarde dans ma direction, je me rend compte que ses yeux sont d'un bleu perçant, au point que je ne peux détacher mon regard d'elle. C'est la Nymphe la plus belle qui m'ait été donnée de voir. Les deux autres, en revanche, ressemblent à des hydriades de pur sang, mais toutes ont le sourire et rigolent entre elles. Cette vision utopique m'arrache un sourire également.

Je suis assez confuse, il semble que cet endroit soit une sorte de camp de réfugiés pour tout type de Nymphes, qu'elles soient métisses ou non.

- Suis-moi, me dit Aaron. Son air maussade tranche radicalement avec la joie de vivre qui émane de cet endroit. Il vit ici, comment peut-il être aussi froid ? Plus je reste avec lui, plus il m'irrite, je suis en fuite, perdue, mais il ne se montre pas le moins du monde rassurant ou amical, c'est à peine s'il m'adresse la parole, et quand il le fait, c'est généralement pour me donner des ordres. Je me demande pourquoi c'est lui qu'on a envoyé me chercher. Excédée, je le suis tout de même. Il chemine en direction d'un recoin de la clairière où plusieurs maisonnettes en bois sont alignées. Elles sont toutes identiques, mesurant environ trois mètres de longueur chacune. Seule une seule est différente, plus petite que les autres, mais plus haute en taille. C'est vers cette dernière qu'Aaron se dirige. Je lui emboîte le pas, tout en essayant de passer outre les regards curieux que me jettent certaines Nymphes. Lorsque nous arrivons devant la petite bâtisse, il toque deux coups francs à la porte en chêne. Une voix masculine lui répond d'entrer.

Aaron pousse la porte et nous fait entrer dans une pièce exiguë. En son centre trône un bureau derrière lequel est assis un homme d'âge mature. Âge que je ressens uniquement grâce à son énergie, car comme toutes les Nymphes que j'ai rencontrées à présent en dehors d'Echo, il a l'air d'avoir 16 ans. Sa chevelure de blé est réunie en un catogan, son regard bleu me transperce. Les arrêtes de nos nez ont le même angle, les mêmes tâches de rousseurs dansent sur son nez et ses joues comme des constellations et ses yeux en amandes sont eux aussi bordés de cils épais comme les miens. Depuis que l'on m'a dit que mon père biologique n'était pas Cléon, le dryade qui m'a élevé jusqu'à mes cinq ans, j'étais enfermée dans une sorte de déni. Je pensais que tous se trompaient, mais la ressemblance avec cet homme est si frappante que je ne peux plus le nier. Nous avons exactement les mêmes traits de visage. Il ressemblerait à une parfaite version masculine de moi si son teint, ses cheveux et ses yeux n'était pas aussi pâle.

Nymphéa t.1 Le secret des NymphesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant