La nuit avait recouvert le monde de son doux manteau sombre parsemé d'éclat de lumière. La vie n'avait pas encore sommeil, les maisons respiraient la chaleur et le bonheur qu'Hestia insufflait en elles, tel était son rôle ; l'odeur de la nourriture cuite au feu de bois, les éclats de rire des enfants attendant l'heure du repas, la chaleur d'un chez-soi.
Le vent ne soufflait pas ce soir-là, les arbres étaient calmes, la nature se reposait, elle dormait, elle. Le froid ne partait pas, toujours bien ancré à cette terre, rendant l'herbe fraîche sous les pieds. Paisible. Douce. C'est ce qu'était cette nuit.
Le crépitement du feu mangeant le bois, la chaleur des flammes réchauffant l'air, une peau de bête, celle d'un ours, à côté, pour profiter de l'infime chaleur dans cette nuit gelée. Allongée, bercée par le murmure du feu, de longs cheveux châtains caressant le sol, une couverture en fourrure remonté jusqu'aux épaules, les yeux d'un bleu océan rivés sur la voûte céleste, la contemplant, une jeune femme se trouvait là, seule, au sommet d'une colline, profitant de cette soirée paisible.
Des bruits de pas foulant l'herbe fraîche, lointains, se rapprochant lentement, devenant plus fort, mais délicat, ne la dérangèrent pas. Les pas s'arrêtèrent à côté d'elle et la personne s'assit, caressant la fourrure, douce sous ses doigts.
— Que fais-tu ce soir ?
— Elles chantent. Les étoiles chantent. Je les écoute.
— Comme souvent.
— Hier elles parlaient simplement, aujourd'hui elles ont décidé de chanter à l'unisson.
La jeune femme se retourna sur sa droite pour regarder son voisin.
— Et toi Anytos, que fais-tu ce soir ?
— Je vais veiller sur toi. Ta mère est venue me rendre visite.
— Elle n'est même pas venue me voir...
— Elle était pressée.
— Comme d'habitude.
— Despina...
Despina se remit sur le dos et regarda les étoiles.
Sa mère n'était autre que la célèbre Déméter. Cette dernière avait toujours était une mère qui surprotégeait ses enfants, elle l'avait fait avec Perséphone, avant elle. Mais voilà, quand Hadès kidnappa sa demi-soeur, alors que sa mère, morte d'inquiétude, traversa le monde à la recherche de son enfant, Poséidon, son propre frère, profita de sa faiblesse pour la violer. Elle n'avait jamais été désirée. Née d'un viol, née d'un crime, née d'une souffrance, née d'un dégoût. Sa mère ne l'avait pas gardé auprès d'elle, elle l'avait confié à Anytos, un puissant titan, fils d'Ouranos et de Gaïa. Elle ne pouvait en vouloir à sa génitrice, après tout, comment aurait-elle pu l'aimer, elle qui avait les mêmes yeux que son père. A chaque fois qu'elle posait le regard sur elle, elle se souvenait de cette horrible journée. Elle était le vestige du mal, et elle devait vivre avec, comme beaucoup de personnes dans cette famille maudite qu'était celle des dieux. Les incestes, les viols, les tromperies, les guerres, les violences, c'était vraisemblablement cela le prix à payer pour avoir la toute puissance et le pouvoir.
Mais heureusement qu'Anytos était là. Il était tout pour elle. Certes, elle ne le considérait pas comme son père, mais comme un membre de sa famille, un peu comme son grand-frère. Il lui avait tout appris. Grâce à lui, elle avait réussi à dompter ses pouvoirs, maîtrisant la puissance de l'eau et de la terre, douloureux héritage de ses parents. Fils du ciel, il lui avait aussi enseigné, comme il le pouvait, à décrypter cette toile, une des bases d'un descendant d'Ouranos, et il était si fier d'elle, elle le savait.
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L'Histoire Oubliée
FantasyBien avant la naissance d'Athènes, bien avant que le temps des humains domine la Grèce et ses paysages sauvages, les dieux régnèrent sur ce monde. D'années en années, de siècles en siècles, des chants et des histoires nous racontent les évènements d...