2 : D'une soirée et de maths.

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Je n'ai pas pensé à Georges pendant plusieurs jours. J'ai rendu mon DM à ma professeure de mathématiques, un peu coupable de ne pas l'avoir fait moi-même. Mais j'avais regardé le bulletin de Georges, il avait terminé l'année dernière avec un bon dix-sept de moyenne en maths, je lui faisais confiance.

Je faisais confiance à un inconnu.

La vie avait à peu près repris son cours. Nous étions vendredi après-midi, ma classe avait une heure de libre et je l'occupais à jouer au poker au foyer du lycée. En face de moi, il y avait Gabrielle.

Gabrielle était tout ce dont on pouvait rêver chez une fille. Enfin, tout ce dont je pouvais rêver. Elle était drôle, gentille, jolie et quand elle riait son nez se plissait, c'était adorable. Cela faisait bientôt deux ans qu'on était ami et le problème était que justement, nous étions amis.

Il n'y avait rien de plus frustrant que d'avoir la femme de sa vie devant soi, l'entendre parler de son petit ami qui était si incroyablement incroyable, puis de la prendre dans ses bras parce que Ledit petit ami venait de rompre, et enfin la voir s'extasier parce qu'un gars « trop beau » l'avait abordée dans une soirée. Gabrielle me faisait vivre un enfer émotionnel.

Mais comme je l'ai déjà dit, je ne désespérais pas. Il y aurait bien un moment où elle se rendrait compte que j'étais là, juste devant elle, et qu'on était fait l'un pour l'autre. Les filles sont-elles aussi aveugles ou juste cruelles par pur plaisir ?

Gabrielle a abaissé ses cartes, révélant un brelan de dix. Tout le monde autour a soupiré.

- C'est le jeu ma pauvre Lucette, a-t-elle déclaré. Aboulez les jetons !

- Eh pas si vite, ai-je protesté.

J'ai fait claquer mes cartes sur la table. Gabrielle a froncé les sourcils.

- Neuf, dix, valet, dame, roi, ai-je énuméré en désignant les cartes au passage, qu'est-ce que tu vas faire ?

- Je vais te défoncer à la prochaine partie, a-t-elle répliqué en poussant les jetons vers moi.

- Essaye-donc.

Eliott, un de mes meilleurs amis qui jusque là avait eu les yeux rivés sur son téléphone, s'est redressé et a claqué des doigts pour attirer notre attention.

- Quand les deux là-bas auront fini de se lancer des piques pour masquer leur attirance évidente l'un envers l'autre, est-ce qu'on pourra m'écouter ?

Les personnes autour de la table ont ri et j'ai fait de mon mieux pour dissimuler le rouge qui me montait aux joues. Gabrielle a accordé une petite frappe sur l'épaule à Eliott.

- Le mets pas mal à l'aise comme ça, lui a-t-elle conseillé, tu vas casser Priam.

- Tu veux dire qu'il peut devenir encore plus dérangé mentalement qu'il ne l'est déjà ? s'amusa Eliott.

J'ai secoué la main pour signifier ma présence.

- Je suis toujours là, ai-je avancé.

- Content pour toi, a répliqué Eliott et il a eu de la chance d'être trop loin pour que je lui fasse manger son téléphone de force. Bon, est-ce qu'on peut revenir à ce qui importe vraiment : ce que j'ai à dire.

On lui a laissé la parole, pour lui faire plaisir.

Il fallait savoir qu'Eliott ne parlait que pour proposer des sorties. Et la plupart du temps, ses plans étaient foireux ; du genre « Venez on va à la piscine, apparemment une nouvelle a ouvert il y a pas longtemps. », la piscine en question était un canal à la sortie d'une station d'épuration. Et si vous souhaitez vraiment le savoir, oui, Eliott s'y est baigné.

Georges, le monde et moi.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant