3 : De quelques bières et d'Eliott.

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Nous sommes arrivés à la prétendue maison une heure après être partis. Eliott n'avait pas menti en affirmant que c'était une bâtisse perdue dans les champs. La musique s'entendait à un kilomètre à la ronde, ce qui ne prédisait jamais rien de bon. Eliott s'est garé sur un bas-côté et j'ai pensé que c'était une très mauvaise idée, il reprenait le volant avec quelques verres dans le nez et c'était le fossé assuré.

En sortant de la voiture, Georges a observé la maison avant de remarquer, sourcils froncés :

- On est chez Arthur Marivaud ? a-t-il demandé et j'ai échangé un regard intrigué avec Eliott.

Ce dernier a haussé les épaules. Ce n'était pas la première fois que l'on s'incrustait à des soirées sans connaître les propriétaires des lieux. Après plusieurs entrées dans ce genre, j'avais appris à ne plus demander chez qui on allait.

Georges n'a rien dit de plus et nous nous sommes dirigés vers la porte d'entrée. Celle-ci était déverrouillée ; à peine ouverte, la musique nous est revenue en plein visage comme une gifle. Il a fallu quelques dizaines de secondes pour nous habituer à la puissance du son. Au début, personne n'a semblé nous voir, puis une fille au milieu d'une dizaine d'autres nous a pointé du doigt et elles ont toutes crié.

Une fille soûle en général était insupportable, soit elle passait la soirée à crier et à pleurer, soit elle se mettait à faire des trucs idiots pour se faire remarquer. Et étrangement, les filles qu'on ne connaissait pas dans une soirée étaient toujours les plus insupportables.

Certaines d'entre elles se sont dirigées vers nous et il m'a fallu un moment pour comprendre qu'elles étaient venues pour Georges. Dans l'ambiance et le bruit généraux, je n'arrivais pas à entendre ce qu'elles lui disaient mais c'était sûr qu'ils se connaissaient. J'ai échangé un regard à Eliott, il a pincé les lèvres, du genre à dire « Pourquoi on l'a emmené ? ». Eliott détestait ne pas être le centre de l'attention.

Un garçon est descendu des escaliers et a levé les bras en nous apercevant. Ou plutôt, en apercevant Eliott, cela devait être son ami qui l'avait fait invité. Il lui a passé un bras autour de l'épaule et la seconde d'après, l'emmenait dans la cuisine pour lui offrir une bière. Je suis resté dans l'entrée, seul.

- Parfait, ai-je dit à voix haute même si personne ne pouvait m'entendre, allez-y, vous inquiétez pas pour moi.

Eliott était ainsi devenu le Grand Maître Shaolin des plans foireux.

J'ai vu Georges, flanqué de son fan club, s'éloigner vers la baie vitrée juste en face de moi. Au dernier moment, il s'est retourné et m'a fait signe de le rejoindre. Je ne me suis pas fait prier et ai traversé le salon-salle à manger en vitesse.

À l'extérieur, le bruit était moins fort mais l'ambiance n'était pas plus calme pour autant. Une immense piscine occupait un quart du terrain et de l'eau giclait de toute part. Je sentais déjà la catastrophe arriver, une soirée et une piscine, ça ne se terminait bien que dans les séries américaines.

Un large groupe de personnes était réuni autour d'une table de jardin, il n'était que vingt-deux heures mais cette dernière croulait déjà sous les cadavres de bières vides et de cendriers pleins. En apercevant Georges, les trois quarts des personnes ont applaudi. Un gars avec une casquette enfoncée jusqu'à la ligne de ses sourcils a même lancé :

- Qu'est-ce que tu fous là ? Simon m'a dit que tu passais la soirée chez lui.

On a tendu une cigarette à Georges et présenté une chaise. Il a attrapé la première et s'est assis sur la deuxième, je me suis replié vers le mur et appuyé dessus d'une épaule sentant que j'étais de trop.

Georges, le monde et moi.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant