-27 : appréhension-

2 1 2
                                    


Le lendemain, il fait gris. Nous décidons de rester à la maison pour la journée. Christiane est décidée à gagner contre Daniel aux nombreux jeux de société que possède cette maison -il y en a même stockés dans les chambres d'amis-. Jo', son père et moi regardons un film : Brazil, sorti l'année dernière au ciné, à l'étrangeté sans précédent. Il passe à la télé, j'avais bien aimé, André aussi, et Jo' ne l'a jamais vu, donc on s'est dit : "pourquoi pas". Tout le film ressemble à un rêve, celui que l'on fait quand on est éreinté, mais avec un sommeil pertubé par des cogitations, comme j'ai fait cette nuit. L'esprit mélange pensées et hallucinations oniriques, pour créer un drôle de rêve aux limites intraçables - je ne m'en rappelle que brièvement, il me semble que c'était une histoire de hérisson, à travers mes réflexions philosophiques tardives...-.

Bref, après le film, je cherche Pierre, on ne l'a pas vu depuis un moment, et je m'inquiète pour lui ces derniers temps -j'ai même l'impression qu'il était dans mon rêve-. Évidemment, je le trouve dehors, en train de fumer. Il me salue :

"Pierre... Tu n'as aucune excuse cette fois. Pas de pièce, pas d'examen, arrête un peu...Dis-je, déconcerté.

Il me regarde. J'ai l'impression que depuis l'incident, ses yeux n'expriment plus rien...

- Il y a toujours une bonne raison. Rétorque-t-il, fixant la mer au loin, cachée derrière les arbres.

Je soupire.

- Alors justifie-toi au moins...

Il avance vers la table en bois de la terrasse, et écrase sa cigarette dans le cendrier.

- Tu as raison, je n'ai pas d'excuse."


Même quand il n'est pas sur scène, il arrive à rendre toutes ses paroles théâtrales.

- Bon... Tu sais que je suis pas loin si besoin." Dis-je lâchement avant de rentrer.

Il ne répondit rien.

Le reste de la journée fût tout aussi tranquille que le deuxième jour, mais l'excitation que je ne pu contenir en moi -vis à vis de l'arrivée imminente de Michelle le lendemain- refusait de faire passer le temps normalement. Ce jour semblait être le plus long de l'année, ce qui -j'ai dû vérifier- n'était pourtant pas le cas.

Mon ventre ne me laissa pas une minute de répit... J'angoissais tellement à l'idée de la rencontrer que Christiane et Daniel commencèrent à s'inquiéter pour moi.

"C'est le poisson ! Il n'était pas assez frais !

- Mais non Christiane, votre poisson était parfait. Ce n'est rien, je vous assure." Répondais-je.


Le reste de la journée fut tout aussi épuisant... à force d'angoisser, je finis par me lasser, et décide de m'occuper, pour arrêter d'y penser. Mais rien n'y fit, malgré les nombreuses parties de cartes perdus contre Daniel -je suis persuadé qu'il triche, ce n'est pas possible d'avoir autant de chance !- et les discussions plutôt intéressantes du père de Joëlle, qui a toujours beaucoup à raconter, le temps résistait, s'écoulant envers et contre tout au ralenti, au point que je n'avais bientôt plus rien à penser. Le soir, j'eu un peu de mal à m'endormir, mais la fatigue de l'angoisse constante vint à bout de l'appréhension insomniaque.

Je me réveille dans les choux -aucune idée pourquoi, je ne me suis pourtant pas endormi très tard-. Daniel est déjà descendu, je suis seul dans la chambre. Je m'empresse de m'habiller, et descend avec une précipitation que j'essaye de contrôler les marches de l'escaliers. Je salue Daniel, et les parents -Joëlle et Pierre, encore endormis, Nick n'est pas là, cela ne peut vouloir dire qu'une chose- :

MichelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant