𝐕𝐈. 𝐮𝐧𝐞 𝐧𝐮𝐢𝐭 𝐬𝐚𝐧𝐬 𝐟𝐢𝐧

29 5 11
                                    



Aujourd'hui, Séoul.
L'agent Kim toqua une nouvelle fois à la porte de la maison. Personne ne lui répondit. Il se tourna vers son collègue, un peu embêté. Les voisins avaient relevé une présence inconnue rôdant autour du quartier ces derniers jours et avaient alerté les autorités. Pour son chef, ce n'était que des commérages. Pour lui, une obligation d'aller rendre compte des faits. Il frappa une nouvelle fois à la porte et fit signe à son partenaire de s'éloigner légèrement. Le couple Hwang était censé être là.

– Nous devrions peut-être partir, souffla son coéquipier.
– Certainement pas, je ne la sens pas cette histoire.
– C'est un couple sans histoire, d'après les voisins, bien intégrés au quartier depuis des années...
– Ce ne sont pas eux qui me posent problème...

Et sur ces mots, il longea le muret pas et sauta pour essayer de voir par-dessus. Maudissant sa petite taille, il se tourna vers son coéquipier, les sourcils froncés.

– Il y a une fenêtre d'ouverte dans le jardinet, souffla-t-il. Viens par-là, aide-moi.
– Que je...
– Je veux essayer de les appeler...

Une fois sur les épaules de son collègue, l'agent Kim s'agrippa au muret. Sans doute les voisins étaient-ils en train de l'observer à travers les rideaux tirés de leur maison, mais il s'en moquait : il n'aimait pas sentir son mauvais pressentiment croître de plus en plus en lui.

– Monsieur et madame Hwang ?

Pas un bruit. Pourtant, il était certain de distinguer une masse de cheveux par-dessus le haut du canapé.

– Ils sont là... Ils sont là, mais ne répondent pas. Appelle les collègues.

Son coéquipier s'exécuta immédiatement.



L'agent Kim était un habitué des bureaux, pas du terrain. Il en avait pourtant rêvé, des années durant. Aujourd'hui, on lui avait confié une mission que tous avaient trouvée insignifiante. Désormais, la panique commençait le gagner doucement et il n'était plus tout à fait sûr de vouloir savoir ce qui se tramait à l'intérieur de chez les Hwang. Pourtant, son sens du devoir l'y poussa.

Quand il parvint à ouvrit la porte d'entrée sans l'abîmer, une odeur désagréable lui parvint. La maison n'était pas rangée, mais cela ne l'interpella pas réellement. Des maisons sens dessus dessous, il en avait déjà croisé et avait appris à en jamais trop s'en formaliser. Celle-ci était bien loin des pires qu'il avait eu l'occasion de voir lors de ses rares sorties en dehors des locaux de la police. Il progressa rapidement vers le salon où il lui avait semblé apercevoir la tignasse de cheveux sombres appartenant à monsieur Hwang.

– Monsieur Hwang ? Madame Hwang ?

Son cœur manqua de s'arrêter à l'instant même où il les découvrit tous les deux, assit sur leur canapé, la tête baissée, la peau livide. Un hoquet de stupeur lui échappa et il se reprit pour ne pas lâcher son arme dans la panique, avant de la baisser immédiatement.

– Mon dieu...

Il porta une main à sa bouche, comme pour se contenir de vomir et derrière lui, son coéquipier laissa échapper un cri de peur.

– Que... Ils sont...

Il agita frénétiquement de la tête, paralysé, incapable du moindre geste. Monsieur et madame Hwang étaient morts, et il n'avait pas besoin de faire un pas de plus pour s'en assurer. Les deux corps devaient être froids, figés dans leur canapé, une aiguille chacun dans l'avant-bras. Devant eux, une montagne d'aiguille cassées, de poudre et autres substances trônaient sur la table de leur salon. Son coéquipier bafouilla quelque chose à propos de renfort, de pompiers, mais il ne l'entendit que d'une oreille. Son regard refusait de quitter le couple sur son canapé. Il se demanda comment, pourquoi, quand. Quand un couple aussi banal avait-il pu basculer aussi bas, jusqu'à l'épuisement ? Un couple sans histoire, sans rien. Le tout ressemblait presque à une mise en scène grotesque, mais son cerveau fut incapable d'analyser en profondeur la scène atroce qu'il avait sous les yeux. Son regarda ne s'attarda pas sur leurs bras piqués ; il se figea sur leurs deux mains qui ne s'étaient pas lâchées.

DEATH IN THE MIRROROù les histoires vivent. Découvrez maintenant