—Vous avez un père ? Ce fut la seule question que je posai alors que dix mille trottaient dans ma tête.
—Oui, confirma le chef. Mais il est actuellement sur un navire en direction de Dubaï.
Je ne pris pas la peine de chercher le pourquoi du comment, me contentant de cette vaste réponse.
—Tu me cherchais, interrompit une nouvelle voix dans le fond.
Je fais volte-face, histoire de voir à qui cette voix, rauque et suave, appartient. Mon cœur rate un battement. Un homme, bien plus jeune que le chef Reed, se tient au seuil de la porte, le bras gauche enroulée dans une écharpe bleu dragée, faisant parfaitement ressortir ses yeux bleus obscur, identiques à ceux du chef Reed, en quelques plus foncé. Chaque trait de son visage parait impeccablement dessiné, s'en est presque une illusion. J'étais trop obstinée pour admettre qu'il était excessivement beau. Il porte une tenue totalement différente du costume de son condisciple. Un pull noir ébène, taillant impeccablement le haut de son corps, et un pantalon camouflé sur-mesure. Ses bottes sont de la couleur de son pull, elles correspondent précisément aux chaussures que portait la police dans le temps. Puis je pense à leurs relations. Ils sont sans doute frères. La ressemblance n'était pas frappante hormis leurs yeux.
A dire vrai, ce type ne lui ressemblait en rien, mais quelque chose d'identique se dissimulait en eux. Peut être étais-ce leurs façons à tous les deux d'être dénué d'émotion. Le chef Reed devait être aux commandes grâce à son père, son frère étant surement dans la fleur de l'âge et donc trop jeune pour un rôle aussi important. Je balade une dernière fois mon regard sur ses cheveux blonds pâle quand le chef Reed reprend la parole ;
—Voici Jenny Goldwyn, s'adresse-t-il au blond qui fait un pas dans la pièce, tout deux s'échangeant un sourire entendu.
C'est quoi le problème avec mon nom ?
—Tu te rappelles du soldat blessé du soixante treize ?
En guise de réponse, celui-ci hocha la tête, attendant une suite.
—Et tu te rappelles du rescapé de la brûlure au troisième degré ? N'attendant pas une réponse, son doigt se lève pour venir dans ma direction.
Les cris d'horreurs de ce soldat retentirent dans mes oreilles. Je fus soulagée qu'il soit encore en vie.
Je ne suis pas une tueuse.
Reed se décida à quitter les alentours de son bureau pour rejoindre son second. Il doit avoir une tête de plus que lui, ce qui renforce un peu plus la crédibilité de sa supériorité.
—Prends là dans ton unité et fais lui comprendre ce qu'est un véritable soldat.
Ma tête tournait, tout ce que je voyais était trouble. C'était comme une noyade. Une chute de dix étages. Et je m'accrochais à la vie, corps et âmes. Je permis enfin mes sentiments à refaire surface, incapable de pouvoir balancer mon dernier mot à cause d'une boule qui s'était solidement formée dans ma gorge.
Une fois l'ordre donné, second Reed s'empressa de riposter, l'air mécontent ;
—Hors de question, je n'ai pas de filles dans mon unité.
—Quoi ? Son rire éclata, Tu t'inquiètes parce que c'est la seule fille, sérieusement ?
Pour une fois, il ne se forçait pas à rester poli, ni à utiliser un langage plus ou moins soutenu. Et à cet instant, je me sentais de trop. Bien entendu, m'éclipser n'aurait pas été une brillante idée.
—Pourquoi on ne la débarque pas tout simplement en Floride ?
Son regard se posa sur moi. Pour la première fois depuis son arrivée, il porta une infime attention à ma présence. Je me détournais aussitôt pour ne pas croiser ses yeux.
Est-ce que lâcher des trucs blessants était quelque chose d'habituel chez les Reed ?
J'avais envie de sortir, de respirer et changer d'air. Le chef comprit enfin que cette conversation était devenue bien trop longue, et il se mit à appuyer une fois de plus sur le bouton de sa « télécommande ».
—Raccompagnez là dans son nouveau quartier Hanson, exige-t-il dés sa venue, malgré le mécontentement de son frère.
Hanson est une sorte de fantôme. Il apparaît et disparaît à sa guise sans jamais émettre le moindre bruit. C'est carrément flippant.
—Bien Monsieur.
Je sens ses mains se tendre dans ma direction et en moins de deux, je suis sortie de la pièce. Je reconnais le corridor et soupire bruyamment. Je ne présageais rien de bon. Si Reed m'envoyait en Floride comme l'avait suggéré son frère, jamais je n'arriverais à revenir. Jamais je n'aurais l'occasion de revoir un jour mes parents.
Je préférerais rester dans cet endroit révoltant.
—Suivez-moi, déclare Hanson, ayant déjà traversé la moitié du couloir.
Je sens une larme dévaler le long de ma joue. Et mes pieds obtempèrent.

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ANARCHY
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