Chapitre 23: Maladresse

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- Non mais ça va pas ?! S'écria-t-il en reculant et repoussant le cuistot brutalement, la colère embrasant ses sens.
Debout, il regardait avec effarement les fines lignes sanglantes sur la peau diaphane du cou de son compagnon, puis leva les yeux pour croiser ceux azur, surpris.
- T'es vraiment qu'un abruti ! Lança-t-il rengainant ses sabres et en se détournant.

Il ne voulait plus le voir, lui et son regard d'océan.
Comment ce rustre pouvait-il l'embrasser ainsi après tout ce qu'il avait vu ?
Il n'aurait jamais cru que cet idiot puisse ainsi jouer avec les sentiments des autres, qui plus est ceux de ses compagnons d'aventure.
Alors qu'il marchait sur le sentier, il entendit le cuistot l'appeler désespérement, puis sentit une main glacée se poser sur son épaule.
Il se dégagea brutalement, fit un bond en arrière tout en se retournant et posa la pointe de son fourreau blanc sur le torse du cuistot, le maintenant à distance.
- Ne t'avise plus jamais de m'adresser la parole !
- Mais je...
- Ferme la ! J'aurai dû te laisser crever sur cet arbre ! Prie pour que Nami n'apprenne jamais ce qui s'est passé ici!
Il refusa de le regarder, il avait du mal à maîtriser sa colère. Il tourna les talons et s'en alla d'un pas rapide, alors qu'une faible complainte métallique résonnait dans un coin de son esprit...
Il resserra sa prise sur le Wado, repoussa sa "voix". Il n'avait pas besoin que ses armes s'en mêlent plus, il avait failli faire assez de dégâts comme ça sur le cuistot.
Mais l'homme qu'il avait eu en face de lui n'avait plus rien en commun avec le cuistot qu'il aimait.
Même s'ils étaient toujours membre du même équipage, ce baiser avait fini de briser l'estime et la loyauté qu'il ressentait envers leur Coq.

Il avait fini par penser que son côté coureur de jupon n'était qu'une façade, une manière d'être qui masquait quelque chose de plus profond et moins joyeux. Et il avait appris à le tolérer. Jamais il n'aurait pensé que le cuistot l'était réellement.
Pourtant, il venait de l'embrasser alors que cet abruti était avec Nami.
Passe encore la serveuse sur l'île hivernale... Il pouvait le comprendre.
Jouer avec ses sentiments, soit. Ils n'étaient pas vraiment tendre l'un envers l'autre. Il pouvait encaisser.
Mais tromper ainsi leur navigatrice, jamais il ne lui pardonnerait.

La confiance était le socle de leur équipage et le cuistot venait de tout faire voler en éclat.
Comment avait-il pu se tromper à ce point sur lui ? Comment avait-il pu aimer quelqu'un comme ça ?
De rage, il frappa un tronc d'arbre, qui s'éclata sous le choc.
Il le regarda et réalisa ce qu'il venait de faire.
Il était en dehors de l'enceinte de la clairière, il ne devait pas faire usage ainsi de sa force, au risque de mettre en danger les jeunes élèves qui venaient l'espionner.
Il soupira: décidément, le cuistot le mettait dans tous ses états, que ce soit d'un extrême à l'autre.

Il regagna sa chambre et eut un léger regret en voyant le deuxième futon installé.
Même s'il s'était révélé un vrai salaud, il n'avait pas été tendre avec le cuistot et ce dernier ne méritait pas qu'on lui souhaite de mourir. Il avait suffisamment morfler sur l'ile du coeur pour qu'il en rajoute ainsi.
Il soupira, se laissant tomber sur son futon, s'asseyant la tête dans les mains.
Le cuistot était un goujat. Mais il venait de se comporter d'une manière aussi peu honorable.
Au final, il s'en voulait d'avoir été aussi dur.
Ils avaient partagé tellement de choses, surtout dernièrement, que son compagnon ne méritait pas une telle violence verbale.
Et il ne pouvait pas se voiler la face, il le détestait autant qu'il l'aimait.
Ce qui faisait de lui un bel idiot.

Il resta longtemps ainsi, à contempler la neige qui tombait de plus en plus dru, virevoltant sous les bourrasques de vent.
La nuit tomba, le cuistot devait sans doute filer un coup de main en cuisine.
Il souria tristement. Il l'imaginait tournoyer, maniant ses couteaux avec ce sublime sourire si particulier quand il cuisinait. Il aimait ce sourire, toute la joie qu'il exprimait, son côté passionné.
Il aurait du mal à tourner la page avec lui.
Même s'il avait déjà eu quelques relations éparses, il n'avait jamais aimé quelqu'un comme ça.
Cela l'effrayait presque parfois.
Il savait désormais que ses sentiments non partagés allaient entraver son rêve, et c'était pour cela qu'il avait demandé à rester sur cette île perdue.

De La Haine À L'amour [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant