Chapitre 10

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La semaine qui a suivi fut plutôt rude. Tout le monde à l'université avait l'air dévasté par la nouvelle. J'avais envie de leur dire « Ne faites pas semblant de pleurer, Ethan était un connard ». Mais on ne peut pas cracher sur le dos des défunts, c'est moralement répréhensible. Il a même eu droit à une minute de silence, afin que tout le monde puisse lui adresser pensées et respect. J'ai trouvé ça ironique, sachant que lui n'avait de respect pour personne. D'autant plus que la tristesse des gens n'est qu'une façade pour camoufler leur curiosité morbide. Ils se demandent tous ce qui a bien pu lui arriver. Je ne vais pas mentir, c'est aussi mon cas. Je ne doute pas du fait qu'Ethan avait de multiples ennemis, pour diverses raisons, et qu'il est donc fort probable que l'un d'entre eux ait été à l'origine de son meurtre. Mais je ne peux m'empêcher de penser que Jay pourrait être le coupable. Il avait un motif, et potentiellement une arme à disposition, s'il a pris celle de son père. Il éprouvait une telle fureur... Je me dis que, sous les effets de la drogue, sa haine envers Ethan s'est peut-être amplifiée, et qu'il est passé à l'acte pour me venger, ou pour lui faire payer le fait qu'inconsciemment, lui et moi nous soyons séparés par sa faute. Jay n'étant d'ailleurs pas revenu en cours après la mort d'Ethan, je décide d'aller le voir.

- Faith ! Attends ! entendis-je dans mon dos en m'apprêtant à entrer dans ma voiture.

Je me retourne donc et aperçois Tom, courant dans ma direction.

- Va pas chez Jay, ça sert à rien, m'indique t-il.

- Pourquoi ?

- Parce qu'il est pas chez lui. D'après John, il est en garde à vue.

- En garde à vue ? Depuis quand ? À cause d'Ethan ?

- Oui, j'crois. Apparemment il y serait depuis presque deux jours...

- C'est pas 48 heures, la durée maximale ?

- Si, pourquoi ?

- Dans ce cas, je vais l'attendre devant le commissariat.

- Attends une minute, me demande Tom en m'attrapant le bras tandis que je m'apprête à lui tourner le dos. Je sais que t'as des sentiments pour lui, mais les laissent pas obscurcir ton jugement pour autant. Il a peut-être tué un mec, Faith.

Il n'a pas tord.

- Je dois en avoir le cœur net, et ça ne sera pas le cas si je ne discute pas avec lui directement.

- Dans ce cas, je viens avec toi.

- C'est gentil, mais je ne pense pas qu'il m'avouera quoi que ce soit si tu es là à attendre sur le côté.

- T'as pas tord.

- T'en fais pas pour moi, ça va aller.

Lorsque j'arrive devant le commissariat, je me gare assez loin pour ne pas être juste devant l'entrée, mais suffisamment près pour voir Jay sortir du bâtiment. Les minutes passent, puis la première heure. Je me demande même, à ce moment-là, si je ne me suis pas trompé d'endroit. C'est alors que je vois l'un des battants de porte s'ouvrir, et Jay sortir de l'enceinte du bâtiment. Je me précipite donc en dehors de la voiture, et le rejoints une quinzaine de mètres plus loin. Lorsqu'il me voit, il reste figé quelques instants, et fronce les sourcils.

- Qu'est ce que tu fais là ? me demande-t-il sans esquisser un quelconque sourire.

J'observe alors son visage, et remarque que ses yeux sont rouges et cernés. Il semble épuisé.

- Je voulais te parler, lui dis-je simplement.

- Toi aussi tu vas me cuisiner ? s'énerve-t-il en sortant un paquet de cigarettes de sa poche de pantalon.

Don't Speak : ChooseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant