La pluie tombait continuellement. Le bruit des gouttes qui martelait la vitre me plongeait dans une sorte transe, comme si le monde se résumait aux gouttes qui s'abattaient sur le verre.
Le monde était gris.
Mes pensées étaient grises.
Tout était gris.
Je me laissai glisser le long du mur, les jambes remontées contre la poitrine, le visage enfoui dans mes bras repliés. Mes cheveux, aussi gris que le reste du monde, tombaient en une cascade scintillante sur mes épaules.
Les gouttes d'eau tambourinaient sur la vitre.
Tu es horrible, tu es horrible, tu es horrible, tu es horrible, tu es horrible, tu es horrible, répétaient-elles inlassablement.
Oui, je suis horrible.
Les gouttes d'eau qui cascadent sur le verre sont reflétées par celles qui coulent de mes yeux. Mes yeux gris, comme le reste du monde.
Lentement, je me relève. Ma robe grise, d'une coupe simple et élégante, tombe sur mon corps décharné telle une vieille loque. Je me traîne jusqu'à la porte, puis l'ouvre.
La tempête s'engouffre dans la pièce, les papiers volent dans tous les sens, les objets tombent sur le sol et se brisent en mille morceaux.
Je n'en ai cure.
Je sors dehors, sous la pluie, dans la tempête.
Tout est gris, comme mes cheveux, comme mes yeux, comme ma robe.
Je reste plantée là, sans savoir où je suis, ni même qui je suis.
Je reste debout, immobile dans la force des éléments.
Tout est gris. Comme mon cœur.
Tout est gris. Sauf cette silhouette, là-bas, à l'ultime limite de mon champ de vision.
Cette silhouette, immense et toute drapée de rouge.
Cette silhouette qui s'avance vers moi.
Mon cœur accélére, mon souffle se précipite, mes pensées tournent à toute vitesse.
Est-ce lui ? Est-il revenu ? A-t-il changé d'avis ?
Non, ce n'est pas lui. Ses cheveux ne sont pas blonds, mais noirs ; ses yeux ne sont pas bleus, mais marron châtaigne ; ses lèvres ne sont pas charnues, mais fines et délicates.
Ce n'est pas lui.
Il s'avance vers moi, sa cape volant derrière lui, lui procurant un aspect presque divin. Ses yeux ne quittent pas les miens, un tourbillon d'émotions se reflète dans ses iris.
Il n'est plus qu'à deux pas de moi. Deux minuscules pas. Deux pas gigantesques.
Il glisse timidement sa main derrière ma nuque. Le vent hurle à la manière d'un possédé. La pluie s'abbat sur nous comme une divinité enragée.
Ses lèvres se posent sur les miennes. Elles ont un goût de sel et de pluie.
Ce n'est pas lui. C'est lui.
Je ferme les yeux, goûte à ce baiser interdit.
Je les réouvre et pousse un soupir. Je suis dans la cuisine, la pluie tombe continuellement. Le bruit des gouttes qui martèle la vitre me plonge dans une sorte transe, comme si le monde se résumait aux gouttes qui s'abattent sur le verre.
Tout cela n'était qu'un rêve.
Je me lève. Il faut bien vivre.
Sur mes lèvres, un arôme de sel et de neige subsiste, infime mais présent.
~504 mots~
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Fleur de Vent
RandomDes mots. Rien que des mots. Des mots qui, je l'espère, traduiront mes pensées. Les mots sont puissants. Les mots sont vaillants. Les mots sont éternels, le reste est éphémère. Des pensées. Des questions. Des rêves. Des rendus de concours, aussi.