" La beauté est dans les yeux de celui qui la regarde."
-Oscar Wilde-
Aujourd'hui est un des plus beaux jours de l'année, aujourd'hui les hirondelles reviennent. Voir ces oiseaux traverser le ciel au dessus de toi, c'est magnifique. Elles reviennent pour nous annoncer que l'hiver est fini, que le printemps est là, et que bientôt ce sera les vacances. Quand ma mère était encore là, chaque année nous étions au rendez-vous pour les accueillir. A côté de moi, je sens que ma petite sœur s'impatiente. - "Augustin, elles arrivent bientôt ? Parce que ça fait longtemps qu'on les attends !"
Je pose une main rassurante sur son épaule en lui disant que nous ne savons jamais exactement quand elles arrivent. Je suis capable de rester comme ça des heures et des jours à attendre, mon cahier de dessin à la main. Depuis des années je m'entraine à essayer de les dessiner, mais comme elles ne prennent pas le temps de s'arrêter et de poser pour moi, c'est un peu compliqué.
C'est alors que j'aperçois la première, celle qui mène le groupe. Toutes ensembles, elles forment un gigantesque nuage gris mais si on les voit d'en bas je suis sûr que de près, elles sont toutes de couleurs différentes. Par contre lorsqu'on se rapproche on voit bien qu'elles ont toutes des préoccupations différentes, qu'elles ont toutes des habits différents, bref qu'elles sont toutes différentes. C'est comme les humains, si on les voit de haut ce n'est que plein d'hommes gris qui ont l'air d'avoir le même but, le même endroit où aller.
Pour la première fois depuis que je les attends, une hirondelle se pose près de moi. Je la regarde. Elle me regarde. Personne ne bouge. Je n'ose même pas respirer de peur qu'elle ne s'envole et ne reparte. Elle me regarde avec intérêt, comme si elle n'avait pas peur de moi, mais qu'elle venait de découvrir une nouvelle espèce d'oiseau. Puis tout doucement, elle se rapproche de ma main, je peux ainsi observer son coup rouge et bleu, son petit bec noir et ses magnifiques plumes noires et bleues qui pourtant si petites parcourent des milliers de kilomètres. Ce si petit être, si beau et si gracieux qui venait d'embellir le jardin par sa seule présence. Elle continue de me fixer et je me sens mal à l'aise quand elle croise mon regard. Ses yeux me percent et j'ai l'impression qu'elle me met à nu. Comme si elle arrivait à déceler tous mes secrets. Elle déploie ses ailes pour aller s'installer sur l'accoudoir de la chaise longue. Je ne manque pas de remarquer que sa queue se fend en deux lorsqu'elle vole. Puis, comme si m'observer l'ennuyait, elle détourna la tête et vola jusqu'à un seau d'eau posé près du tuyaux d'arrosage. Je l'ai vu se poser sur un bord du seau et commencer à boire. Je crois que je n'avais rien vu d'aussi beau. Pendant qu'elle buvait j'ai commencé à l'observer sous toutes les coutures afin de bien mémoriser les couleurs de sa queue, de ses ailes, de sa tête, la forme de ses yeux et la longueur de son bec. Lorsqu'elle eut fini de boire, elle me regarda, comme pour me remercier et je jurai par la suite qu'elle me souriait. Puis elle déploya ses ailes pour s'envoler. Je la vis partir vers le ciel, je vis ses ailes s'ouvrir et sa queue former une fente. A ce moment-là, j'avais envie de me transformer en oiseau et de m'envoler avec elle, partir et découvrir. Mais je ne pouvais pas. Je restais là mais je souriais parce que j'avais vu de très près une hirondelle.
Et le printemps venait d'arriver, je le savais.
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Derrière l'encre de ma plume
Short Story/ Recueil de mes nouvelles et textes / Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne, Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends. J'irai par la forêt, j'irai par la montagne. Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps. Je marcherai l...