Chapitre 4. LOUIS

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Au fil des ans, Louis avait vécu trois journées vraiment atroces. De celles qu'on ne souhaite à personne de vivre. Pas même à son pire ennemi. La dernière en date, c'est lorsque Harry l'avait mis à la porte. Il a cru en crever. Il en garde un souvenir pire que son overdose. Durant celle-ci, il était tellement haut qu'il voyait le bouclé dans ses hallucinations alors, si Harry était là, c'est que tout allait bien.

La 2e était la mort de Raphaël. Louis avait toujours pensé que c'était ce moment-là qui l'avait fait vriller, l'entraînant vers des années d'errements. Mais, maintenant qu'il repense à sa vie, forcé de plonger dans ses souvenirs pour répondre aux interrogations de Lyset, il se demande si sa vie n'était pas tombée en lambeaux le 21 juillet 2007.

L'innocence de ses 16 ans s'était, en tout cas, envolée ce jour-là.

******

Une agitation inhabituelle. C'est ce qui le sort de son sommeil ce matin là. Il entend la voix de son père et des bruits qui proviennent de la chambre de ses parents. Pas le genre de sons habituels dans une maison, comme quand maman passe l'aspirateur ou que papa bricole. 

Qu'est-ce que c'est que ce boucan ?

Louis se lève, encore tout endormi, et enfile un short et un tee-shirt. Il ouvre la porte de sa chambre et reste figé dans le couloir.

Merde.

Des pompiers et un médecin pompier s'affairent autour du lit de Lyse. Ils ont posé au sol un espèce de gros sac avec du matériel et dressé contre le mur un brancard. Leurs gestes sont lents, doux, ils parlent à voix basse.

Ils ne s'activent pas pour la sauver.

Ils essaient de la soulager.

Le père de Louis se tient prostré dans un coin de la chambre, essayant de gêner le moins possible les secouristes. Louis s'approche doucement et son cœur rate un battement quand il aperçoit sa mère couchée dans ce lit. C'est comme s'il se rendait compte, juste aujourd'hui, à quel point elle est menue et semble fatiguée.

Elle tend difficilement le bras vers son mari et ce dernier s'empare de sa main.

- Ça va aller, chérie ! dit-il, la voix pourtant si mal assurée.

Un des pompiers s'apprête à lui faire une piqûre mais Lyse est si maigre qu'il doit s'y reprendre à deux fois et Louis a envie d'hurler "mais bouge ton cul putain" parce que sa mère geint et il peut l'entendre d'ici. Elle a mal putain.

Il a dû le dire à voix haute parce qu'elle tourne la tête et leurs regards se croisent. Louis sursaute. Il a peur de la voir dans cet état, peur de ce qu'il se passe. 

Peur d'avoir déjà compris.

Lyse s'agite et tapote faiblement sur le ventre de son mari pour l'alerter.

- Reste pas là mon grand... dit le papa lorsqu'il comprend ce qu'il se passe.

Le châtain regarde son père, puis sa mère. Mais quand un nouveau gémissement de douleur s'échappe du corps frêle et que Gérard se penche au-dessus d'elle pour resserrer son étreinte, il fait volte face et s'enfuit en courant. 

En bas, il enfile des baskets et sort. Une fois qu'il a passé la voiture de sa mère et le camion de pompiers, Louis se met à courir. Il court, il court, sans s'arrêter. Il dévale les rangées de vignes escarpées, il descend l'ensemble du coteau. Arrivé en bas, il laisse le domaine derrière lui et continue sa folle cavale. Il court le long de la route départementale et il court encore quand il se retrouve en ville. 

L'Acteur que j'aimais (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant