Ameline, premier décembre
Trois mois se sont écoulés depuis l'enterrement de mamie, je tente de m'en sortir. Son absence me tue peu à peu. J'ai trente ans et pourtant j'aimais quand elle me préparait mon repas préféré qu'elle seule savait cuisiner. J'adorais quand elle prenait du temps pour moi ou quand elle faisait un crochet par mon bureau avant de rejoindre le sien à l'entreprise. Elle m'emmenait déjeuner avec elle et était toujours d'une très bonne oreille.
Aujourd'hui, j'essaie simplement de survivre, de sourire, d'oublier. Je sais qu'il faut que j'avance mais c'est bien plus facile à dire qu'à faire. Alors, je me rabats sur le travail. Je ne vois plus la couleur de mes soirées, je ne mange plus que par simple nécessité et souvent sur le pouce. Mes nuits sont fréquemment courtes et quand j'ai la possibilité de faire une nuit blanche alors je n'hésite pas. Je ne peux pas laisser couler l'empire de ma grand-mère, je fais donc tout mon possible pour m'accaparer ce rôle qui est devenu le mien le lendemain de l'enterrement.
Moi, Ameline, la trentaine, célibataire et de nouveau orpheline, je suis devenue la directrice du deuxième cabinet d'architecture le plus grand et le plus célèbre du monde.
Élisabeth a ouvert cette entreprise alors qu'elle n'avait que vingt-cinq ans, et d'années en années elle devenait de plus en plus célèbre, jusqu'à devenir un des emblèmes des Vosges. Elle n'aurait jamais pensé que ça prendrait tant d'ampleur mais elle était fière de ce qu'elle avait accompli et me donnait cet exemple chaque fois qu'elle voulait me prouver que nos rêves se concrétisent toujours.
Je ne réalise pas encore totalement tout ce que ma grand-mère m'a laissé, une entreprise, une maison, un héritage. Elle m'a légué ce qu'elle avait de plus précieux. J'ai de nouvelles responsabilités, des décisions à prendre, des personnes à payer, des réunions à organiser. Heureusement que Louis, l'assistant de ma grand-mère, est là pour m'aider, et aussi que mon ancêtre est organisée à frôler la maniaquerie. Je pense qu'elle avait peur de perdre la tête vu le nombre de post-it que je trouve un petit peu partout dans son bureau comme avec le mot de passe de l'ordinateur, les affaires à régler, les archives des plans ...
Pour ne rien arranger, nous sommes le premier décembre. Qui dit décembre, dit calendrier de l'avent, chants de Noël, vin chaud, décorations et tout ce qui va avec. Je n'ai jamais détesté Noël, j'aime plutôt bien cette fête. Pouvoir se réunir autour d'un bon repas, pouvoir oublier les querelles, les disputes, les différends. Voir apparaître, sur le visage des enfants, des sourires et dans le regard des parents cette étincelle, qui nous montre que malgré le fait que le Père-Noël n'est qu'un mythe, nous continuons d'y croire et ça n'empêche pas la magie d'exister. Au fond de nous, nous sommes toujours ces gamins qui sont impatients d'ouvrir les cadeaux sous le sapin.
Sauf que cette année, je n'ai pas envie d'en entendre parler. Je ne souhaite qu'une seule chose, hiberner comme ces bons vieux ours et ne ressortir qu'au printemps. Pourquoi célébrer une fête familiale alors que je n'ai plus de famille ? Que la dernière que j'avais viens de partir. J'ai reçu un appel de Madame Garcia, la directrice de l'hôpital où s'investissait ma grand-mère, qui dit qu'il serait dommage que je ne perpétue pas son rituel. Elle faisait des petits sablés pour les enfants puis les décorait en leur compagnie tout en chantant des chansons ou elle inventait des histoires de Père-Noël qui passe par les cheminées afin de déposer les cadeaux sous le sapin.
En plus de mon travail, il va falloir trouver du temps pour aller auprès de ces chers chérubins préparer des couronnes pour décorer les couloirs et installer un sapin.
Pourquoi ma grand-mère me fait subir ça cette année ? Elle n'aurait pas pu mourir style en février, pour me laisser le temps de faire mon deuil tranquillement, sans penser aux fêtes qui arrivent. Je ne sais plus ce que je raconte.
VOUS LISEZ
Le Noël où tout a changé
RomanceAmeline Bertel a tout perdu, il ne reste rien d'autre que le bien le plus précieux de sa grand-mère : son cabinet d'architecture. Du jour au lendemain, elle va devenir directrice d'un prestigieux cabinet d'architecture, d'un orphelinat et au command...