Chapitre 3

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Mon article est publié trois jours plus tard. Quand je vais en cours le matin, tout le monde l'a dans les mains et chuchotent en me voyant passer. Je suis contente de l'effet que ça fait. La photo que j'ai choisi de Gabriel n'est pas la plus flatteuse mais il l'a mérité. Et mes propos, disons que mon directeur ne va pas être très content.

Gabriel non plus.

Après ma deuxième heures de rédaction, je me rends à la bibliothèque et tombe sur Léna, une fille de ma classe, qui semble chercher un roman. 

- Salut Belle ! Dis, tu es amie avec Gabriel ?

Je tombe des nues. Pourquoi est-ce que tout le monde s'imagine des choses comme ça ? Je pensais avoir été assez clair depuis le début. Tout le campus sait que je le déteste.

- Oula, pas du tout ! Pourquoi ?

- Il m'intéresse trop. J'ai su avoir son numéro de téléphone mais il répond à aucun de mes messages. 

Je hausse un sourcil, ne comprenant rien.

- Bah, autant l'oublier s'il ne répond pas.

- Facile à dire. Je suis vraiment amoureuse de lui. Mais il ne me regarde jamais. Je vais le voir tous les jours à ses entrainements. J'essaie de lui parler mais il m'esquive.

Je me retiens de rire et me détourne pour qu'elle ne voit pas tous les efforts que je fournis. Je fais semblant de chercher un livre sur l'étagère de romans policiers. Léna continue sa tirade, ne voyant pas ma réaction.

- J'avais l'impression que tu le connaissais bien vu que tu lui parles souvent.

J'aperçois une note de jalousie dans sa phrase. Elle ne risque pourtant rien de mon coté. Je ne suis absolument pas attirée par Gabriel Evans, malgré je l'avoue, son charme.

- Je le connais de très loin, si tu veux savoir. On est pas amis et on ne risque pas de l'être. Grand bien te fasse si tu aimes les tueurs de pigeon.

J'entends un petit reniflement de l'autre coté de la rangée de livres. Il n'y a que moi qui semble l'avoir entendu parce que Léna m'agrippe soudain le bras. Je me crispe en la regardant. Elle ne me croit pas. C'est quoi ce délire ? Ca se voit quand même comme le nez en plein milieu de la figure que je ne l'aime pas. Qu'est-ce qu'elle va s'imaginer encore ? Elle est barjo.

- Mais pourtant, je vois bien comme il te regarde. Je n'ai aucune chance. Il te kiffe.

Je ne peux plus me retenir. Je ris à en pleurer. Léna, choquée, me dévisage sans rien dire.

- Tu ris ? me demande-t-elle et je ris encore plus.

- C'est...je ris de nouveau puis me reprends, c'est la cho...chose la plus absurde que je n'ai ja...jamais entendue ahah.

Tout le monde me regarde dans la bibliothèque, se demandant surement ce que j'ai. Ce n'est que lorsque je vois une ombre sur les livres que je me retourne. Gabriel est justement là, les bras croisés, un sourire mystérieux aux lèvres comme il sait si bien le faire.

- Salut Léna, Belle.

Je suis dépitée. Il a tout entendu et bien sur, je le vois à son regard, il en est enchanté. Il n'est jamais à la bibliothèque ! Je le saurais car j'y vais une fois par jour.

- Oh salut Gabriel ! Tu as été génial au match de dimanche dernier !

Il la remercie par un sourire avant de se tourner vers moi.

- Je te ramène chez toi Belle ?

Je me retourne, croyant qu'il parle à quelqu'un d'autre mais non. Je secoue la tête. Marcher me fera le plus grand bien.

- Il pleut et tu n'as pas de capuche. Tes livres vont être trempés.

Je baisse les yeux sur la pile que je tiens dans mes bras et soupire. J'abdique et une lueur passe dans ses prunelles. Léna nous regarde tour à tour et si elle commençait à me croire, c'est fini.

- Allons-y, dis-je en ramassant mon sac et en me dirigeant vers la sortie. Plus vite ce sera fait, plus vite je serai débarrassé de toi.

Je ne me retourne pas pour voir la réaction du hockeyeur mais il me suit nonchalamment. Sa voiture est garée juste devant le bâtiment, ce qui est bien pratique. Sur le chemin, il me demande pour m'aider à porter mes livres mais je sais très bien le faire toute seule. Je le rembarre et m'installe en vitesse sur le siège passager.

J'habite littéralement à deux minutes de la fac, dans les logements qui l'entourent. Mon trajet est toujours court. Mais j'avoue qu'être sous la pluie, n'est pas l'idéal.

Gabriel démarre sa voiture, une magnifique mini verte, et mets le chauffage. Je n'ai pas pensé à mettre un pull ce matin car il faisait bon. La pluie n'était pas au programme. Le jeune homme tend un bras en arrière et me donne son veston, avec son numéro de joueur de l'équipe de hockey. Je ne proteste pas pour une fois et l'enfile. Son odeur m'envahit.

- Merci, chuchoté-je en regardant par la fenêtre.

- Avec plaisir Belle.

On arrive quelques secondes plus tard devant ma chambre. On a écrasé aucun malheureux pigeons heureusement. 

- On est arrivés, me dit-il en se tournant vers moi.

Surprise de sa proximité, je recule et me cogne contre le carreau. Il sourit et je grogne avant de me détacher et d'ouvrir la portière. Je veux enlever le blouson mais il dit :

- Non, garde le. Tu vas avoir froid. Au fait avant que tu partes, ton article était pas mal ! J'apprécie l'effort que tu as fait pour moi. Tu as bien capté les règles du jeu. Bravo ! me complimente-t-il de façon très sérieuse. Mais il faudrait qu'on parle de ma faille.

- Avec plaisir mais une prochaine fois si tu veux bien, répété-je et je m'enfuis de son carrosse tueur de pigeons.

J'entends son rire jusqu'à ce que je rentre dans ma résidence.

⛸️

La semaine passe à une vitesse folle. Je ne croise plus Gabriel. Du coup, c'est bien calme et presque ennuyeux sans nos joutes verbales. Tous les soirs dans la salle du journal de la fac, j'épluche des centaines d'articles des autres années. Mon nouveau thème pour ma chronique est assez difficile à exploiter. Je planche dessus depuis des jours.

Je suis seule dans la pièce depuis une heure. Je commence à avoir les paupières lourdes mais je résiste. Il faut que je trouve quoi écrire. J'ai de plus en plus difficile de trouver l'inspiration, les tournures de phrases. J'ai l'impression de ne rien savoir faire pour l'instant. Ça m'énerve.

J'écris des dizaines de phrases avant de les effacer. Je recommence encore et encore avant de m'endormir sur mon bureau.

Not loving yourselfOù les histoires vivent. Découvrez maintenant