📞 𝚈𝚘𝚞 𝚌𝚊𝚖𝚎? 𝚈𝚘𝚞 𝚌𝚊𝚕𝚕𝚎𝚍.

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Il est parti. 

Comme un mistral. Comme les oiseaux à la fin de l'été. Comme un homme que la mort a appelé. 

Il est parti, aussi soudainement qu'il était arrivé. 

Je nous revois, il y a 3 ans, notre rencontre dans un moi de juin ensoleillé. J'étais tranquillement entrain de lire un roman d'amour sur la terrasse d'un café. Il est arrivé. Ses cheveux blonds ébouriffés, ses yeux bruns que le soleil rendait presque dorés, il avait la tête du type libre comme le vent, allant où bon lui semble, se laissant porté par les vagues de la vie comme un petit bateau tranquille. 

Il s'appelait Ambroise. 

Il est arrivé, m'a regardé durant quelques instants, assise sur cette terrasse, et a prit place à côté de moi. Un coup d'œil à la couverture de mon livre et il a lancé avec un grand sourire: 

- Hé, ça te dis qu'on vive ensemble une histoire semblable à celle que tu lis? 

J'ai bégayé, je ne savais pas quoi dire. Il était beau, il me parlait, il me souriait, et il me proposait de sortir. Ce n'était pas la première fois qu'un garçon m'accostait. Mais de cette façon, avec ce sourire si grand, et ce regard si profond, si assuré... si, c'était bien la première fois. Alors j'ai murmuré ce qui ressemblait à un oui, il m'a prit la main, et il ne l'a jamais lâché. 

Jusqu'à aujourd'hui.

Ce ne fut pas une séparation grandiose, comme dans les films, ou les protagonistes se crient dessus sous un pluie battante, avant de s'embrasser éperdument une dernière fois, les vêtements et le cœur trempés de larmes et de pluie. Non. Ça s'est fait dans le calme, presque dans le silence. Après tout, on s'aimait. On s'aime toujours je crois. Alors il a simplement pris une dernière fois mes mains entre les siennes, ses grandes mains chaudes dans lesquelles les miennes avaient pris l'habitude de se réfugier. Il m'a regardé dans les yeux, comme ce premier jour, et m'a murmuré: 

- Il est temps de refermer le livre. 

Il a lâché mes mains. 

Et il est parti. Loin. A l'autre bout du monde. Là où il pourra exercer le métier qui lui plait, là où il pourra photographier la vie comme il le souhaite. Sans un petit bout de femme comme moi pour l'entraver, pour attendre son retour, pour souhaiter qu'il revienne la voir. Il est parti pour me libérer, nous libérer. 

Mais n'aurai-je pas été capable de supporter toute la distante, toute la solitude, toute l'attente pour lui? N'aurai-je pas été capable de partir à l'autre bout du monde avec lui?

Non Margot, nous en avons déjà parlé. Une grande carrière t'attend, tu n'as pas besoin d'un petit photographe sans succès pour entrever tes pensées, je ne veux pas que tu te fasses du soucis pour moi ni que tu m'attendes chaque soir. Quant à partir avec moi, tu n'y songes pas. Je ne peux pas t'imposer ça, comprends moi. 

Le comprendre. Je ne demandai que ça, de la comprendre. Comprendre, de sa racine latine comprendei, veut dire prendre avec soi. C'est lui que je voulais prendre avec moi, et il n'a pas voulu. 

Quand il est parti, j'ai regardé l'heure. 16h02

Je n'oublierai jamais les heures qui ont suivie. Je tournais dans la maison comme un oiseau en cage, tandis que lui volait au dehors, libre, se laissant porté par la vie comme au premier jour. Et moi je tournais et tournais. Tout me rappelait sa présence: les photos sur la cheminé, une chemise oubliée sur le canapé, un livre sur la table de chevet, un bouquet de fleurs fanées dans la cuisine. Et tout me rappelait aussi son absence, qu'il ne reviendrait pas. 

Il doit être un peu plus de minuit à présent. Je ne sais pas, je ne sais plus, j'ai perdu toute notion du temps. Il était ma boussole, mon soleil, il rythmait ma vie et mes journées. Rien n'a de sens sans lui. 

Et cette solitude écrasante! Je me sens si seule, mais cette solitude est comme une personne qui viendrait m'enserrer, m'étouffer. Loin d'être une amie, la solitude m'emprisonner et resserre encore un peu les barreaux de ma cage. Et j'ai beau m'ensevelir sous mes couvertures, serrer contre mon corps mon oreiller et allumer la télévision pour faire taire le silence, rien ne suffit à combler le vide. Ce vide immense qui m'engloutit. 

Je repousse fébrilement toutes mes couvertures, et ce fichue oreiller qui n'a pas sa chaleur, sa force et sa vitalité. Je me dresse sur mes jambes flageolantes, titube dans le noir jusqu'à ma commode et tâtonne jusqu'à trouver mon téléphone. Je fais défiler les contactes fébrilement, les mains tremblantes et le souffle court. Enfin, je trouve celui qui m'intéresse. 

La sonnerie du téléphone résonne dans la maison vide, et dans ce même vide au fond de moi. 

Bip. Bip. Bip. 

Au 6e Bip, j'entends l'interlocutrice décrocher, et je murmure d'une voix éraillée que je ne reconnais pas. 

- Viens Cerise, viens. Je... je n'en peux plus du vide. Tout ce vide Cerise...

Il n'y a rien besoin de dire de plus. Au bout du file, j'entends l'interlocutrice qui s'active. Je l'imagine passer sa grosse doudoune, enfoncer son chapeau de feutre noir sur ses cheveux coupé à la garçonne. Et elle me parle, de sa vois rassurante, elle me parle tout du long. Quand elle descend les escaliers de son immeuble, quand elle monte dans sa voiture, quand elle arrive devant chez moi. Et jusqu'à ce qu'elle pousse doucement la porte de ma chambre. 

Cerise, ma meilleure amie, la sœur que je n'ai jamais eu. 

Elle passe la scène en revue de ses yeux sombres. Ma chambre en désordre, le lit défait, les photos étalées sur le sol. Et moi, assise par terre, le dos contre le pied du lit, la tête sur le genoux et les bras passé autour de mon corps. Là elle ne dit plus rien et se contente de me prendre délicatement dans ses bras. Elle n'a pas la force d'Ambroise, ni la même odeur, les battements de son cœur n'ont pas le même rythme ni la même sonorité, mais elle est là. Elle est venu au milieu de la nuit pour moi. Elle n'est pas partie, elle ne partira pas en me laissant derrière elle pour faire le tour du monde. 

- Tu es venu. 

- Tu as appelé. 

Et ces simples certitudes suffisent à combler un peu le vide, à taire un peu le silence même si plus rien ne sera pareil.


📞📞📞

Bon encore une nouvelle un peu triste. Je crois que c'est plus facile en fait d'écrire des choses tristes, ou alors c'est juste moi je ne sais pas...

Cette petite histoire pour toutes les amies qui sont toujours là, dans les bons comme dans les mauvais moments. Prenez bien soin d'elles, ce sont des pépites. 

⚡️ BISE BISE ⚡️

✭ 𝑭𝑹𝑨𝑮𝑴𝑬𝑵𝑻𝑺 ✭Où les histoires vivent. Découvrez maintenant