Chapitre 1

18 2 10
                                    

        - Thaïs !

        Je me réveille vaguement en ouvrant un œil. Mon plafond blanc, froid, laid est la première chose qui m'accueille dans le monde des éveillés. J'entends à nouveau la voix de mon père m'appeler depuis le rez-de-chaussée. Honnêtement, ma voix n'est pas assez réveillée pour pouvoir répondre. Il faudrait peut-être que je me lèvre. Mais je n'en ai aucune envie. Paf, clic, paf. Paf, clic, paf. Paf, clic, paf. En entendant le bruit de ses pas dans les escaliers, je décide de me lever pour ne pas donner l'impression d'être un poids ou d'être inutile. Lentement, je lève mes bras en soulevant légèrement mon torse pour attraper la poignée de ma potence qui pend au-dessus de moi et pouvoir me relever complètement. J'ai les bras musclés mais alors mes jambes... On pourrait croire que c'est du chewing-gum. Je découvre mon corps de la couverture et mes draps puis vient le déplacer pour mettre mes jambes dans le vide, assise au bord du lit. À ce moment-là, mon père ouvre la porte. Il se tient devant moi, appuyé sur sa canne avec sa main gauche, la poignée de ma porte dans la main droite. Mon père est un homme grand à la peau bronzée, de longs cheveux bouclés poivre et sel qui tombent sur ses épaules – qu'il attache la plupart du temps en un chignon fait de manière rapide et non soigné –, des yeux chocolat, souvent habillé simplement d'un t-shirt de couleur et d'un pantalon noir avec un sweatshirt noir si nous sommes en hiver, avec son éternelle canne sculptée en bois. Mon père a toujours aimé s'habiller simplement. C'est un homme simple qui ne se prend pas la tête. Il me regarde avec un petit sourire avant de lentement s'approcher de moi. De sa main libre, il vient mettre mes cheveux derrière mon oreille gauche. Je lève la tête vers son visage et le regarde calmement. Mon père est plutôt calme et gentil – sauf si quelqu'un ou quelque chose l'énerve vraiment mais à vrai dire je ne l'ai jamais vu énervé.

        - Tu seras priée de me répondre la prochaine fois que je t'appelle. (Il continue de sourire en me regardant.)

        - Excuse-moi. Je n'étais pas vraiment réveillée mais je t'ai entendu. (Je le regarde un peu dans les yeux puis regarde autre chose sur son visage, c'est plus simple comme ça.) Pourquoi es-tu monté ? J'aurais fini par descendre.

        - Il est midi passé. (C'est vrai que je n'ai pas regardé l'heure.) Et je t'appelle depuis environ dix heures et demie. Je croyais que tu avec fugué par la fenêtre. (Même si je vois bien qu'il se retient de rire à sa blague pas terrible, je vois aussi que je l'ai vraiment inquiétée.)

       - Mais c'est que t'es un petit marrant. (Je soupire en tournant la tête vers la fenêtre. Je n'aurais jamais pu fuguer par la fenêtre, encore moins depuis le premier étage.) Je me suis juste endormie tard alors j'ai mis du temps à t'entendre mais tout va bien. (Je tourne à nouveau la tête vers lui.) Tu n'as pas à t'inquiéter. Vraiment.

        - D'accord. (Ses lèvres se posent sur mon front alors je sens mon cœur se réchauffer.) Je t'aide à te passer tes habits et on dit que dans vingt minutes maxima tu es en bas ?

        - Mais je n'ai rendez-vous qu'à treize heures trente. J'ai le temps.

        - Oui mais ton taxi arrive dans quarante minutes et j'aimerais que tu goûtes ma nouvelle pâte à tartiner. J'ai rajouté du crunchy dans celle-ci. Puis il reste du pain que j'ai fait hier. (Mon père adore cuisiner depuis que je suis petite.) Alors on dit ça ? Tu es en bas dans vingt minutes ?

        - On dit ça.

        Alors mon père ouvre mon armoire pour y attraper les habits que je lui indique. Comme nous sommes en janvier, j'opte pour un pull laine noir sur lequel il y a un croissant de lune blanc, un haut à manches longues noir et un pantalon noir un peu déchiré au niveau des genoux. Il m'apporte aussi mes Dr Martens sur lesquels j'ai ajouté de petites chaînes pour faire plus rock et aussi un ras-de-cou en dentelle noir avec une petite boule d'onyx pend. J'ai fabriqué ce ras-de-cou moi-même ! J'aime énormément fabriquer de petits objets que n'importe qui pourrait ajouter à leurs tenues pour faire un petit plus. Mon père dit que je suis une artisane et que mes doigts sont mon talent. J'ai plutôt tendance à le croire. Je sais qu'il ne ment pas quand il fait des compliments. Il a horreur de mentir. Alors oui, sûrement, je dois avoir un talent avec mes doigts.

Les jambes de ThaïsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant