Chapitre 5

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Combien de temps que je suis ici maintenant ? Dix jours peut-être ? Ouais, ça doit être ça... Dix jours que je suis enfermé dans cette baraque... Plus d'une semaine sans sortir... Est-ce qu'au moins la police sait que j'ai disparu ? Je sais que Livio va revenir dans pas longtemps... Il a bien pris soin de fermer toutes les portes cette fois. Il a fermé celle de la cuisine et même la porte opposée à la cuisine qui est la salle de bain et des toilettes. Bon, au moins je peux toujours y accéder à cette pièce par une autre porte à l'intérieur de la chambre qu'il a – et heureusement – laissé ouverte.
Le son de la clé qui tourne dans la serrure parvient à mes oreilles et je redresse la tête. Merde. Il est revenu. J'entends ses pas dans le couloir et il ouvre la porte de la chambre, entrant avec un sourire gentil mais une once de folie dans les yeux.
- Coucou, chéri. Je t'ai manqué ? J'espère que oui. Tes profs m'ont encore demandé pourquoi tu n'étais pas en cours... Je leur ai dit que tu étais toujours à l'hôpital après cet « accident » et que tu n'allais pas revenir avant un bon bout de temps. Par ailleurs, ta petite Chloé s'est inquiétée, tu sais. Dommage que tu ne puisse pas la voir et qu'elle croit tout à fait au fait que tu as eu un accident et que tu es en train de subir des soins à l'hôpital ! Enfin bref, t'as peut-être faim à cette heure-ci. Je t'ai pris quelques trucs.
Il me tend un paquet de gâteaux à la fraise. En fait ce sont mes préférés. Il le sait très bien.
- Je sais que tu les aimes. Et puisque tu n'as pas tenté de t'échapper à nouveau pendant déjà plus d'une semaine alors j'ai voulu te récompenser avec ça.
Le fait que ce soit une récompense et qu'il me prenne presque comme un animal de compagnie en faisant ce genre de chose me dégoûte encore plus. Mais j'ai trop faim pour me plaindre actuellement et me jette presque sur le paquet en dévorant les gâteaux un à un. Je crois que je mange tellement peu ces derniers temps que j'ai perdu du poids. Je porte ses habits tout le temps et les change chaque jour. Ici c'est lui qui fait le ménage, la cuisine – de ce qu'il parvient à cuisiner du moins – ainsi que me nourrir et il m'achète à peu près tout ce que je veux tant que je le lui rend bien par me comporter comme il le voudrait. Mais j'en ai marre de cette vie. Je ne suis pas sorti et n'ai pas revu le jour depuis plus d'une semaine ! Je déteste être surveillé pratiquement en permanence comme ça ! Je déteste toutes ses petites attentions, ses caresses, son réconfort, tout ! Je sais qu'il est sincère mais moi je l'aime toujours pas et en plus c'est pas de l'amour, c'est de l'obsession ! Alors c'est décidé, si j'arrive à gagner sa confiance, il baissera sûrement sa garde... Tout ce qu'il veut entendre c'est que je l'aime. Alors il va entendre ce qu'il veut entendre.

Il est dix-neuf heures maintenant. Il est l'heure de passer à l'action et cette fois c'est la bonne. Je vais l'amadouer et lui piquer  son téléphone et je vais appeler les flics et si jamais je sortirai par la porte d'entrée après l'avoir assommé et piqué ses clefs.

Livio entre dans la chambre en souriant et pose une main sur ma tête, caresse mes cheveux et vient respirer leur odeur, les ayant lavé lui-même il y a à peine une demi-heure.
- On va bientôt passer à table, Akira, me susurre-t-il avec une voix douce pourtant capable de me donner des sueurs froides.
C'est le moment de me lancer. Pourtant je ne sais pas pourquoi, je me sens paralysé. J'ai encore trop faim. Je me sens faible et je ne sais pas si j'arriverai à lui faire face actuellement. Je le sens pas du tout. Je vais attendre d'avoir mangé et après je verrai.

De retour dans la chambre après le repas, je me racle la gorge et regarde Livio.
- Hum... Je voulais te dire un truc, dis-je avec un peu de nervosité dans la voix.
- Je t'écoute, vas-y, me répond Livio en écoutant attentivement.
- En fait je voulais te dire que t'avais raison. Je t'aime et je m'en veux de t'avoir traité comme ça. Tout ce que tu fais pour moi c'est tellement gentil et je crois que je suis tombé amoureux de toi aussi...
Je regarde chacune de ses expressions pour essayer de voir sa réaction face à ma comédie et par chance il a l'air de marcher en plein dans mon piège et s'approche de moi avec les larmes aux yeux et un sourire aux anges. Je m'efforce à sourire et lui saute au cou pour lui faire un câlin qu'il me rend en me serrant fort, pleurant presque contre mon épaule. À l'intérieur de moi je suis juste répugné d'oser l'enlacer après tout ce qu'il a fait mais je dois tenir le choc et garder cet air niais pour réussir à enfin sortir d'ici ce soir.

Je passe mon bras derrière son dos pour le caresser tendrement comme je peux et descend ma main proche de sa poche de pantalon et parvient à attraper discrètement son téléphone dans ma main. Je le coince contre ma peau et l'élastique de mon boxer et le recouvre de mon haut, rapidement. Je m'efforce de continuer mon geste et de frotter le dos de Livio d'une façon réconfortante pourtant à l'intérieur de moi j'ai juste envie de lui exploser la colonne vertébrale.

Il se calme enfin et me lâche en me remerciant, ses yeux sont rouges et il les frotte. Ça a marché on dirait. Il est tombé en plein dedans. Il respire un bon coup et sourit avec bonheur mais cette étincelle de folie reste coincée dans son regard.
- Chéri, reste là, je vais immortaliser ce moment ! Je vais prendre une photo de nous deux avec l'appareil photo que mon père m'a donné pour mes sept ans... J'y tiens beaucoup, c'est pour ça que je veux utiliser que celui-là, dit Livio avec excitation.
- Vas-y, je bouge pas...
Il se tourne et se dirige vers l'étagère de la chambre où se trouve le vieil appareil photo. Moi pendant ce temps là, je ne me carapate pas. J'attrape la lampe de chevet à piles et m'approche de lui discrètement, me préparant à le frapper à la tête par l'arrière. Une vague de rage me donne l'élan nécessaire pour lui asséner un coup assez fort pour être capable de l'assommer. Mais d'un coup il se retourne et attrape mon poignet, le serrant avec force pour me faire lâcher ce qui me sert d'arme. Il me regarde avec un air froid. Une rage sans nom dans les yeux. Je l'ai trahis, je lui ai mentis. J'ai joué avec ses sentiments. Mais moi je m'en fous car je suis pas son toutou et que c'est illégal ce qu'il fait. J'essaie de garder la lampe en main mais la force commence à me manquer. Il appuie sur un point de mon poignet qui me fait mal et je la lâche en grognant, mon regard rempli de haine et de dégoût envers lui.
- Je savais que tu me cachais quelque chose. Je le savais. Ton changement d'attitude était trop soudain et bizarre. Je te connais trop bien pour le savoir. Je savais que je devais rester sur mes gardes avec toi. Et en plus de ça tu m'as menti et tu as joué avec mes sentiments comme si ils n'avaient aucune importance ! gronde Livio avec fureur et froideur.
- T'as qu'à arrêter de me garder enfermer ici, espèce de taré ! Si tu veux que je t'aime d'abord arrête de me traiter comme un animal à m'enfermer ici chaque jour et t'occuper de moi quand tu reviens !
Il n'a toujours pas lâché mon poignet et le serre encore plus fort avec colère. Je lâche un gémissement de douleur et essaie de lui foutre des coups de pied pour qu'il me lâche et me laisse tranquille.
- Arrête ça tout de suite ou je t'amène ta petite Chloé ici et je la bute devant toi ! En plus tant que tes parents seront pas rentrés ils pourront jamais lancer un avis de recherche pour te retrouver puisque c'est moi qui leur envoie des messages à ta place ! Je sais tout copier de toi ! me crie-t-il avec un sourire complètement fou et effrayant.
Je le regarde en fronçant les sourcils et il me balance sur le lit, lâchant mon poignet par la suite puis sort de la chambre d'un pas lourd. Il claque la porte et ferme à clé derrière lui. Je l'entend zipper sa veste et sortir, fermant la porte à clé également derrière lui. Je pense qu'il est parti calmer ses nerfs dehors. C'est peut-être ma chance d'appeler mes parents et les secours depuis ici avec son portable. Mais puisqu'il est sorti récemment, je pense que j'aurai largement le temps de jeter un œil à l'intérieur de ses données personnelles et envoyer des preuves à la police car je suis sûr qu'il doit avoir pris des photos de moi ou d'autres choses que seul un psychopathe obsédé comme lui serait capable de faire...

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