1e mercredi

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Nous étions 2 idiots. 2 demeurés à avoir eu la merveilleuse idée de sécher le discours - très - long et - très - ennuyant du Proviseur pour la nouvelle année.

Qu'est-ce qui m'avait pris après 4 ans d'assiduité ? Je n'en savais rien mais, je n'allais plus retenter, c'était sûr. Rien que le mois dernier, j'avais eu le courage d'être présente pour les 25 minutes qu'il avait pris pour parler de Noël - et de toute sa magie - alors pourquoi je n'avais pas serré les dents cette fois-ci encore ?

Je n'en savais clairement rien. Peut-être que j'avais perdu des neurones entre-temps ?

Le problème n'était pas vraiment l'acte en lui-même mais plutôt qu'aucun de mes parents ne voulait se justifier auprès de la scolarité, comme si le speech aurait pu m'apporter une illumination et aurait fait grimper toutes mes notes. Ne nous voilons pas la face, ça les arrangeait juste de se débarrasser de leur fille le mercredi après-midi. Plus égoïstes qu'eux, tu meurs.

Résultats : deux heures de colle par semaine pour tout un mois. Évidemment, elles tombaient en fin de journée, sinon ce n'était pas drôle. Franchement, quel plaisir de rester le mercredi, de 8h à 18h au lycée !

Est-ce qu'on pouvait avoir encore plus la poisse ?

Traînant des pieds jusqu'au fond du couloir, j'essayais au maximum de retarder le moment où j'allais devoir compter les mouches pour le bonheur du narcissique qui me servait de Proviseur. Dès que je serais libre, je vais voir avec les autres si on ne pourrait pas lui coudre ses lèvres pour en finir avec sa torture mensuelle. Sérieusement, j'aurais même préféré qu'il me donne des exercices en plus pour que ce temps soit un minimum productif !

Une fois arrivée devant la salle 205, je restai fixé devant, pensant que j'étais certainement la seule à devoir subir ça. En même temps, il n'y avait personne sur Terre qui avait aussi peu de neurones que moi ! A part peut-être Jeongin alias I.N, l'Irrécupérable Nouveau. Mais, il était un cas à part, trop chanceux pour faire partie du commun des mortels. 

La plupart des personnes d'ici se connaissent depuis la 6ème et il était bien une des rares personnes à avoir intégré l'école cette année, en plein milieu de la Première - inutile de préciser qu'il s'est fait tout de suite remarqué. Je m'entendais plutôt bien avec lui et j'aurais bien voulu qu'on passe le temps ensemble. Malheureusement, à cause de sa stupide option chant, il a réussi à passer à travers les mailles des enseignants. C'était clair et net qu'il était leur petit favori !

Ruminant dans mon coin, je ne vis pas la grande porte s'ouvrir et encore moins le professeur de Technologie me regarder en face, les bras croisés. Je continuais à avancer comme un vieil elfe de maison qui se plaignait de tous ses maîtres. J'étais rendu aux insultes commençant par la lettre T quand j'entendis soudain quelqu'un taper des mains, me causant un sursaut. Je m'écriai :

«Bon sang ! Vous m'avez fait peur !»

Les mains sur la poitrine, je regardai avec les yeux ronds ce professeur reconnu pour sa joie de vivre aussi éclatante qu'une nuit d'éclipse. J'ai peut-être des réactions un soupçon excessives mais, j'avais été à deux doigts de mourir d'une crise cardiaque !

Le vieil homme se mit sur le côté et me dit avec sa voix rocailleuse :

«Entrez au lieu de faire le pitre, et plus vite que ça.»

Évitant soigneusement de marmonner quoique ce soit à son encontre, je passai devant lui sans cacher mon ennui. Même si je n'avais pas pris d'oreiller, j'étais prête à m'étaler sur tous les bureaux qui étaient à ma disposition jusqu'à ce que la vue que j'avais m'arrêta net dans ma lancée. Je venais de l'apercevoir. Lui. Celui qui allait me hanter à partir de maintenant. Des cheveux blonds reflétant les rares rayons de l'extérieur, des yeux aussi écarquillés que les miens et un visage aussi fin que celui d'un élégant petit renard. On aurait dit qu'il avait été sculpté sur le marbre par une divinité. 

Et une heure de colle ! (Félix)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant