le Sud

cet été

cet été, deux policiers sont morts et badou a rejoint Assa, là haut.
œil pour œil, dent pour dent
le quartier est en deuil, Momo l'avait dit
on est redevenu les sauvages assassinant la justice.
le café a fermé, Amir et Hassena sont partis, maman fait nos valises
amina ne sort plus, et sa mère ne nous ouvre plus la porte, kylian est en colère, il dit que la guerre n'est pas terminé
et du haut de ma fenêtre je vois Momo jouait seul dans la rue, avec son vieux ballon de foot, pensivement

dans quelques semaines, je rentre en cinquième dans mon nouveau collège, j'entendrais les autres enfants parler de leur vacances dans le sud que j'ai quitté
ils parleront de cannes, nice et saint tropez
ils ressasseront les souvenirs des ports éclairés, des bateaux luxueux, des repas en terrasse
ils parleront sûrement des policiers morts, de la sauvagerie des gamins de banlieues, du danger des réfugiés.
et moi je leur dirai, je leur parlerai des pastèques sur la plage, des plans pour venger la mort d'un frère, je leur raconterai ce même frère, les souvenirs, le vieux port et clarisse
je leur parlerai des copains, des étés plus joyeux, du sourire d'amir.
je leur parlerai de mon ancien appartement, du bisous que j'ai échangé avec amina, au pied de notre vieil hlm presque mort
je leur raconterai l'humour de kylian et la sagesse de Momo, les fou rires autour du domoda de ma mère.

Je leur dirai que cet été était comme les autres,
sauf que la mort s'y est mêlé, la mort d'un innocent un peu con qui a entraîné celles de trois autres cons
je leur dirais à quel point il a fait chaud, que pavarotti sonnait toujours aussi bien, que momo a encore balancé le ballon de foot à l'eau et qu'on a fait dansé amina sur la plage.
que la guerre ça ravage, que je suis en colère, et triste d'avoir quitté mes meilleurs copains
triste d'avoir quitté mon sud et ma banlieue poisseuse
trsite qu'assa soit mort
et que les glaces pirulo n'avaient pas le même goût sans lui.